Daaaaaalí ! : Auto-psy d’un œuf au plat

Très attendu (au tournant pour ainsi dire, après un Yannick moins absurde et presque plus classique que ses précédentes productions et littéralement porté par un Raphaël Quenard au sommet de sa verve et de son inimitable et très attachante fantaisie, ndlr) le nouveau Quentin Dupieux demeure visible en salles depuis le 7 février d’une année 2024 porteuse de belles promesses cinéphiles… en demi-teintes ! Annoncé un peu partout comme l’un des films les plus aboutis de son réalisateur, monteur et scénariste Daaaaaalí ! a toutefois bien des peines à trouver grâce aux yeux de la rédaction de Close-Up Magazine, l’auteur de ces lignes appréhendant un film très « Canada Dry » et pétri de fioritures logiquement inhérentes à l’Oeuvre surréaliste et proprement illustrative du célèbre peintre espagnol du Siècle dernier : Salvador Dalí.

Récit d’une journaliste trentenaire précédemment boulangère et pharmacienne se voyant confier la réalisation d’un documentaire sur la figure excentrique et grandiloquente de Salvador Dalí par un producteur sexiste et un rien maniéré Daaaaaalí ! ne demeure ni plus ni moins qu’une pantalonnade décorative et finalement assez peu inspirée sur la longueur, Dupieux réitérant ainsi la structure-gigogne de son Réalité et l’étalonnage terne et insipide du film sus-cité sans prendre la peine d’insuffler à son nouveau long métrage de réelles et franches aspérités. Moins potache certes qu’un Mandibules ou qu’un Fumer fait tousser, Daaaaaalí ! a néanmoins bien du mal à rendre gloire ou un hommage digne de ce nom à l’auteur des Montres Molles ou du Grand Masturbateur, se contentant de déployer paresseusement des situations prétendument géniales et ubuesques en large partie inspirées des œuvres du peintre hispanique… n’en gardant à dessein que la carapace et la surface.

Si Anaïs Demoustier s’en tire plutôt honorablement en la figure presque effacée de la documentariste Justine (l’actrice n’a pas sa pareille pour interpréter les femmes imperturbablement ordinaires fleurant dans le même temps un parfum agréablement vanillé) il en est de même pour la poignée d’acteurs incarnant le protéiforme et paradoxalement irremplaçable Salvador Dalí : Jonathan Cohen, Pio Marmaï, Gilles Lellouche… tous parviennent à leur façon à prêter leur faciès prononcé à celui du peintre aux moustaches désespérément retroussées et au regard de fou furieusement animé. C’est étrangement le trop souvent exaspérant Edouard Baer (cet éternel bobo aux allures de pubard énervant à force de désinvolture et de légèreté estampillée « petit écran », ndr) qui s’en tire le plus élégamment dans l’affaire sus-citée, faisant presque oublier le gimmick imposé par Quentin Dupieux que le cinéaste semble directement avoir repris du médiocre – et raté dans les grandes largeurs – L’imaginarium du Docteur Parnassus de Terry Gilliam. Par ailleurs Romain Duris, encombré de ses tics habituels et néanmoins naturellement charmeur, reste un peu à côté de son rôle de producteur un rien précieux et ridicule, parvenant toutefois à nous faire décrocher les quelques rares – et mêmes les seuls – sourires que cette comédie prétentiarde semble tristement nous promettre.

Ce n’est donc pas la faute aux comédiens ni même celle de l’équipe technique si ce lourdaud Daaaaaalí ! nous semble raté… Hélas Quentin Dupieux s’en tient beaucoup trop aux effets décoratifs et/ou illustratifs de sa nouvelle création tout en conduisant son métrage sous le signe de la déclinaison systémique : le quintet de Salvador campant le célèbre peintre, la succession de mise en abyme faisant entre autres choses référence à l’autoportrait Dalí de dos peignant Gala de dos voir le leitmotiv musical composé par Thomas Bangalter achevant de conférer à ce Daaaaaalí ! des airs éhontés de film-concept renvoyant directement au thème obsédant et minimaliste de Philip Glass intrinsèque à la spirale méta-filmique de Réalité. A force de traits stylistiques outranciers et démonstratifs le nouveau long métrage de l’auteur de Incroyable mais vrai se prend littéralement les pieds dans la tapisserie, ne nous faisant pratiquement jamais rire, même jaune… Un film aussi plat que sa colorimétrie sinistre et surfaite dans le même temps, livrant ses incessantes mises en abyme jusqu’à la lassitude la plus impardonnable. Un gâchis confirmant les prétentions peu ou prou assumées d’un réalisateur qui se serait pris pour un grand démiurge plus malin que nul autre… et s’avérant finalement n’être qu’un masturbateur de pacotille.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*