Deadstream : Found footage 2.0

Comme le chantait si bien Jean-Louis Aubert : « voilà, c’est fini » ! La saison Halloween 2022 s’en est allée aussi rapidement que votre diabète en a pris un sacré coup. On espère que vous vous êtes régalés avec tout un tas de films d’horreur bien traumatisants et que vous êtes déjà d’attaque pour préparer l’année prochaine. Et oui, sur Shadowz, c’est toutes les semaines Halloween. Bien évidemment, nous ne pouvions pas passer à côté de la dernière exclusivité événement de la plateforme. Lauréat du Prix du Public lors de la dernière édition du festival de Sitges, Deadstream, premier long métrage des époux Vanessa et Joseph Winter, est le raz-de-marée du moment qui retourne tout sur son passage. Nouveau chouchou du film d’horreur à petit budget, il jouit déjà d’une solide réputation auprès de la sphère cinéphile adepte des festivals de genre. Il faut dire que Deadstream amène un véritable vent frais dans le genre, et particulièrement dans la forme qu’il emploie : le found footage. Genre archi-éculé depuis les succès du Projet Blair Witch et de Paranormal Activity, on le pensait mort et enterré, et surtout dénué de tout intérêt. Bien mal nous en a pris puisque les deux jeunes réalisateurs pulvérisent le format en l’ancrant dans une ère 2.0 maîtrisée à la perfection. Bienvenue dans votre séance Shadowz, n’oubliez pas de vous abonner et d’activer la cloche afin de ne manquer aucunes notifications…

Après avoir été discrédité et ruiné à la suite d’une polémique sur internet, un streamer tente de regagner son public en se mettant en scène, seul et en live, dans une maison hantée abandonnée. Mais c’était sans compter la colère de l’esprit vengeur qui habite les lieux.

Comment faire du found footage à l’heure actuelle ? Ou plutôt : comment penser le found footage aujourd’hui ? Si le genre est très vite passé de fascination à désolation, il ne faut pas oublier que le found footage était d’abord utilisé comme une vraie mécanique de la peur en voulant persuader son audience que les images vues à l’écran étaient réelles. Provocant le dégoût chez Deodato pour Cannibal Holocaust ou tout simplement la peur de l’imperceptible chez Oren Peli pour Paranormal Activity, le found footage s’est très vite retrouvé limité dans ses possibilités de mise en scène. En matière de jump scare putassier, le genre en tient une sacré couche. Le procédé est quasiment mort-né puisqu’il n’est jamais parvenu à réellement convaincre en-dehors de quelques succès inattendus. S’il y a bien eu des essais concluants (on se souvient d’une séquence orchestrée par James Wan dans Insidious 2 qui nous avait sacrément fait suer ; ou le toujours inédit chez nous Megan is Missing qui nous aura fait hurler le temps d’une séquence traumatisante), il est impossible de citer ne serait-ce que cinq films incontournables en la matière. Le genre a essayé de muter en s’appropriant les dernières technologies. Il a rapidement laissé tomber le principe de vidéocassettes retrouvées par hasard pour aller se focaliser du côté d’internet. Ainsi, le spectateur pouvait renouer avec l’expérience found footage en ayant, cette fois-ci, l’illusion de regarder au travers un écran d’ordinateur (Searching, Unfriended, Open Windows). Malheureusement, l’histoire n’a retenu aucun de ces films, preuve ultime que le format n’est pas conçu pour perdurer dans le temps. Et pourtant, c’est en tenant compte de ces énormes avertissements que Vanessa et Joseph Winter se lancent dans l’élaboration de Deadstream. Le film s’inspire des tendances actuelles et voit un influenceur livrer ce qu’il risque être son ultime live Twitch. Avec une hallucinante connaissance des codes, Deadstream dynamite tout sur son passage dès son introduction. Il est évident que les réalisateurs ont été biberonné avec l’ère YouTube et ses médias adjacents qui ne semblent plus avoir aucun secret pour eux. L’illusion est immédiate et convaincante : Shawn a tout du vidéaste rejeton de l’époque Jackass qu’on prendrait plaisir à suivre pour ses vidéos extravagantes. Dès lors qu’ils parviennent à captiver leur audience d’emblée, les deux réalisateurs s’attardent à ne jamais faire baisser la tension.

Et pour ce qui est de captiver, Deadstream sait de quoi il parle. Le film convoque frontalement les classiques du genre afin d’étoffer son récit. Il évoque Le Projet Blair Witch en passant par Evil Dead tout en se permettant de chatouiller allégrement John Carpenter par le biais d’une bande son synthwave à tomber par terre. C’est un sacré bestiaire référentiel auquel nous avons droit et qui ne fait pas office de citation figurative puisque le film réussit dignement à s’en détacher afin de conjuguer l’envie d’infliger une véritable trouille à son spectateur tout en y amenant un humour sauvagement construit. Deadstream se vit ainsi comme un roller coaster en ayant parfaitement conscience de ses lacunes (financières pour la plupart). Il y a une ingéniosité de mise en scène qui est impressionnante et qui parvient à nous tenir en haleine au cœur d’une toute petite maison sans jamais provoquer l’ennui. Le film s’approprie totalement le principe du live stream pour en faire de vrais artifices cinématographiques et accentue le réalisme à son paroxysme en allant jusqu’à incorporer sur l’écran les réactions écrites de milliers de viewers. Deadstream dépoussière merveilleusement le film de maison hantée, le film de possession et la comédie horrifique en l’espace de moins de 90 minutes. Le tout est littéralement habité par Joseph Winter qui officie également devant la caméra. Il donne corps à un personnage aussi extraverti et stupide que profondément attachant. Il ne joue pas Shawn, il est Shawn. Il prend un malin plaisir à se glisser dans la peau de ce vidéaste casse-cou(ille) qui possède autant de courage qu’un éléphant devant une souris. De plus, il annihile toute réaction vraisemblable face au danger, ce qui rend les situations et leurs dénouements très inhabituels. Même le plus averti des spectateurs pourra se faire surprendre. Quel pied que d’être aussi enchanté par un film qui, sur le papier, s’appuie sur des poncifs triviaux qui ne font même plus sourciller.

Deadstream est un immense coup de cœur. C’est un film d’épouvante comme on rêve d’en voir tous les jours : imaginatif à souhait, distrayant et flippant. Il y a une vraie réflexion sur la manière de bousculer son spectateur afin de lui offrir l’expérience la plus saisissante possible. Vanessa et Joseph Winter ont clairement du talent à revendre et nous suivrons avec un vif intérêt la suite de leur carrière. Deadstream mérite amplement tous les éloges que vous avez pu lire à son égard. Foncez, c’est du très bon.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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