Incubus : Pas de répit pour les maniaques sexuels

L’été approche à grand pas. Toutes les équipes de Shadowz se sont pliées en quatre pour assurer la venue des beaux jours avec classe. Et ce premier week-end du mois de juin ne déroge pas à la règle puisque la plate-forme nous congratule de trois films sévèrement couillus et cultes. Des bavures violentes de Matt Cordell chez William Lustig dans Maniac Cop aux étranges tours de magie d’Anthony Hopkins accompagné de sa marionnette dans l’excellent Magic de Richard Attenborough, Shadowz a clairement mis les petits plats dans les grands. Pourtant, nous nous sommes décidés de nous arrêter sur l’outsider de la semaine, mais non moins hypnotique, Incubus de John Hough. Oui, il fait beau, les hormones sont en feu et l’appel de filles nues était trop tentant pour ne pas vous en parler aujourd’hui. Mais éclaircissons directement les choses afin qu’il n’y ait aucun malentendus : Incubus n’est en aucun cas un film à valeur masturbatoire (auquel cas il faudra sérieusement penser à aller consulter). N’y voyez également aucune valeur sexiste dans notre boutade ci-dessus…disons que nous tapons ces lignes dans un état de fatigue colossal et que l’inspiration se fait quelque peu désirer sur cette introduction. Bref…attaquons !

Dans la petite communauté de Galen, le médecin Sam Cordell et le shérif Hank Walden doivent brusquement faire face à une série de viols étranges au cours desquels toutes les femmes sont mortes d’un traumatisme violent subi au cours des attaques. Un jeune garçon, Tim, fait des cauchemars récurrents dans lesquels il voit ces attaques et craint de pouvoir être sans le vouloir responsable de ces morts.

Sorti en 1981, année pivot pour le cinéma de genre américain avec l’avènement du slasher, Incubus est un pur produit de vidéo-club. Le genre de cassette vidéo que l’on se recommandait sans problème à l’époque tant le film de John Hough recèle de vraies qualités en dépit d’un budget clairement fauché. Le réalisateur de l’incontournable Maison des Damnés (et accessoirement du nanardesque Hurlements 4), convoque le slasher (jeune genre à l’époque et en pleine construction) en l’entrecroisant avec les codes du polar, un soupçon de giallo et d’ésotérisme. Incubus est une œuvre fantastique hybride, une curiosité bancale, certes, mais qui ne manque jamais d’audace ou d’idées. Adapté du roman éponyme de Ray Russell, le film compose du mieux qu’il peut avec les éléments forts du livre pour tenter d’assembler un puzzle bordélique au possible. En effet, le budget ridicule de 510 000 dollars canadien (soit environ 400 000 dollars américains) est une des plus grandes contrainte pour ce film d’horreur qui ne manque pas d’ambitions. John Hough est obligé de ménager ses effets et joue en permanence avec le hors-champ afin de mener à bien ses idées. Notons tout de même une séquence graphiquement superbe avec une pelle qui n’a pas pris une ride et qui imprime la rétine instantanément.

La qualité principale de Incubus réside en sa capacité à parvenir à imprimer des images fortes. Elles sont peu quantitativement, mais d’une qualité à toute épreuve. Il y a également ce sentiment d’urgence qui est mis en place rapidement. Les viols s’enchaînent à répétition et les deux héros ont à cœur de résoudre l’enquête le plus vite possible, il en va de la survie de la paisible communauté dans laquelle ils vivent. Pourtant, John Hough ne cède pas à l’hystérie. Bien au contraire, sa mise en scène prend le temps d’exposer les faits et laisse vivre les personnages. Le réalisateur semble bien plus concerné par ses personnages que par l’envie d’en mettre plein la vue à ses spectateurs. D’ailleurs, les problèmes de cut se feront surtout ressentir lorsque les actions s’emballent à l’image…et surtout les cinq dernières minutes qui bouclent tous les arcs narratifs encore plus rapidement qu’un éjaculateur précoce. Si Incubus possède un twist final imparable (difficile de le voir venir tant tout va trop vite dans cette fin dopée aux amphétamines), il lui manque vraiment de la substance pour parvenir à sustenter pleinement le spectateur.

Des fins abruptes et chocs, le slasher américain en a fait son credo à l’orée des années 1980 (que celles et ceux qui ont vu Massacre Au Camp d’Été ne frissonnent pas à la simple pensée de son plan final). Si cela ne manquait pas de charme jadis, le spectateur de 2022 non averti risque de rester sur sa faim. En effet, lorsque nous découvrons enfin le pot aux roses, il ne reste que deux ou trois minutes au film avant de balancer son générique final. Si vous vouliez prendre le temps de digérer l’ultime révélation, ce n’est pas ici que cela se fera. En revanche, Incubus renferme des idées de boucles (sous toutes ses formes) qui lui permet d’ouvrir une grille de lecture propice à un second visionnage. Que ce soit le plan similaire qui ouvre et ferme le film, une série de meurtres qui se répète tous les 30 ans ou encore le cauchemar qui tourne indéfiniment dans le crâne de Tim, il y a une vraie matière à disséquer. Et c’est par ce prisme que le film de John Hough jouit d’une réputation solide : Incubus est une vraie enquête passionnante qui vous poussera à continuer l’investigation au-delà du matériel filmique afin de mieux cerner les agissements du tueur. Pourquoi le viol entraîne-t-il la mort ? Que signifie-t-il réellement ? Sa partie ésotérique est survolée et vous obligera à vous débrouiller par vos propres moyens pour en saisir les nuances et les secrets.

Incubus a cette richesse indéniable dans sa mise en scène qui fait oublier les gigantesques trous de son scénario. John Hough a du faire des choix drastiques afin de rendre son histoire la plus plausible possible en dépit d’un budget plus que minime. Il peut compter sur la présence magnétique d’un John Cassavetes qui atomise l’espace. Il s’investit corps et âme au sein de ce projet qui fourmille de brillantes idées. Shadowz s’offre une pépite trop peu (re)connue du cinéma de genre américain qu’il était grand temps de réhabiliter à sa juste valeur.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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