Folle à Tuer : l’instrument de la peur…

Disponible dans le coffret Blu-Ray/DVD numéro 14 de la collection Make My Day ! présentée par Jean-Baptiste Thoret en complément du superbe et très poisseux Canicule du même réalisateur, Folle à Tuer fait partie des films méconnus du franc-tireur Yves Boisset, cinéaste aux convictions proprement engagées tirant presque toujours à boulets rouges sur les institutions politiques, économiques et sociales de notre France et mère patrie. Rien ni personne n’est pour ainsi dire épargné chez Boisset, qu’il s’agisse d’un milieu policier certes pugnace mais délibérément ambigu (l’excellent Un Condé dans lequel Michel Bouquet livre une prestation admirable de justicier aigre et désabusé), des services secrets empreints de crapuleries en tous genres (L’attentat), de la France profonde et son racisme ordinaire ambiant (l’incontournable Dupont Lajoie) ou encore de l’infanterie infantile broyant ses représentants (Allons Z’enfants, l’un des meilleurs films de son auteur, ndlr).

Loin d’être l’une des réussites majeures du cinéaste Folle à Tuer fait l’effet d’un petit Boisset pavé de bonnes intentions, passant au crible certaines instances pour mieux montrer l’absurdité d’un système usant de subterfuges hypocrites à des fins potentielles. Récit d’une jeune femme débarquée à dessein de l’hôpital psychiatrique qu’elle occupait depuis cinq ans à l’orée du métrage ledit film présente un notable et son jeune neveu (respectivement joués par un excellent Michael Lonsdale et un Thomas Waintrop plus tête-à-claques que jamais…) l’accueillant dans leur noble intimité en tant que gouvernante du petit marmot. S’ensuivra dès l’ouverture du deuxième acte un kidnapping fomenté dans la plus pure des ambiguïtés, kidnapping mené à bien par un Tomás Milián impeccable en tortionnaire fraîchement sorti de La Rançon de la Peur de Umberto Lenzi. La jeune folle titulaire, interprétée peu ou prou correctement par Marlène Jobert, sera donc victime et instrument de persuasion dans le même mouvement de perversité dans un métrage néanmoins pétri de défauts et de grosses imperfections.

Le film tient toutefois plutôt bien la route, assumant fièrement un mauvais goût et une amoralité de tous les instants (les sévices et humiliations subis par le petit Thomas Waintrop au gré de la séquence de captivité siégeant au coeur du récit peuvent en témoigner). L’ensemble se suit donc sans déplaisir mais avec une certaine frustration, faute à un casting prometteur mais pas toujours bien exploité ; on regrette alors la présence trop rare de l’inénarrable Jean Bouise et celle du malicieux Michel Peyrelon, trop peu visibles à l’écran sur les 90 minutes de métrage constituant ledit thriller. Et pourtant Victor Lanoux et Michael Lonsdale parviennent à tirer leur épingle du jeu, le premier incarnant pour l’heure un chauffeur de taxi libidineux et pourri jusqu’à l’os lorsque le second brille de prestance tranquille lors d’une séquence revisitant le Alice au Pays des Merveilles de Lewis Carroll avec panache…

Un Boisset mineur donc, loin d’être déplaisant mais pas forcément captivant dans son déroulement un rien laborieux et cruellement hétérogène. Folle à Tuer s’agit d’un film à suspense clairement dans l’air de son temps, inégal mais nécessaire pour qui souhaite redécouvrir un réalisateur passionnant et audacieux. Une curiosité.

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