S.O.S Fantômes : Who you gonna call ?

Indissociable de sa musique (un des plagiats les plus lucratifs de l’histoire), S.O.S Fantômes est un film dont on ne se lasse pas de revoir à chaque rediffusion. Originellement pensé par Dan Aykroyd qui voulait remonter au cinéma son duo avec John Belushi, S.O.S Fantômes est un film qui a connu énormément de modifications et d’embûches avant de sortir sur nos écrans en 1984. D’abord, la mort par overdose de Belushi a énormément affecté son comparse Aykroyd. Il réécrit le scénario avec Harold Ramis, un autre de ses compères du Saturday Night Live. Les deux amis proposent un script avec des protagonistes voyageant à travers le temps et l’espace au réalisateur Ivan Reitman. Ce dernier refuse jugeant le film financièrement irréaliste. Après une nouvelle slave de réécriture, Aykroyd et Ramis parviennent à monter un projet financièrement stable. Ivan Reitman est de nouveau sollicité. Alors en pleine ascension populaire après les sorties de Meatballs et Stripes (deux comédies extrêmement respectées aux États-Unis), il va exploser aux yeux du monde avec S.O.S Fantômes. Bill Murray endosse le rôle initialement prévu pour Belushi. S.O.S Fantômes sera un savant mélange entre film fantastique et comédie populaire. Est-il pour autant un vrai film familial ?

Les docteurs Peter Venkman, Raymond Stantz et Egon Spengler, des chercheurs de l’université Columbia de New York spécialisés en parapsychologie, sont accusés de mener des recherches farfelues. Radiés de leur poste par le doyen de l’université, ils décident d’ouvrir une société d’investigations paranormales. Engageant leurs derniers deniers dans cette activité, ils rachètent une ancienne caserne de pompier à l’abandon qu’ils rénovent et modifient, et partent chasser les phénomènes paranormaux partout dans la ville au volant de leur Ectomobile, une Cadillac blanche décorée au motif de leur société. Profitant du regain d’apparitions ectoplasmiques qui assaille soudainement la ville de New York, les trois compères sont bientôt débordés durant leur activité de chasseurs de fantômes et deviennent des vedettes locales, leurs interventions étant relayées dans les médias. Cependant, la résurrection d’un dieu sumérien voulant assouvir ses envies de destruction va donner du fil à retordre à nos chasseurs.

A bien reconsidérer la chose, S.O.S Fantômes est un film à ne pas mettre devant tous les yeux. Certes, le cabotinage incessant de Bill Murray peut faire rire, mais les monstres ancrent totalement le film dans un domaine horrifique qui pourrait heurter les plus jeunes. Pourtant, le succès du film sera tel qu’une série animée se chargera de populariser l’univers auprès de nos chères têtes blondes. Seulement, essayez de montrer les apparitions de Gozer à votre bambin de cinq ans, vous nous remercierez des nuits blanches à venir. Clairement dédié aux adolescents, S.O.S Fantômes est le genre de projet de divertissement comme on n’en fait plus. Le film prend le temps d’élaborer ses péripéties, de poser son univers et ses règles tout en n’omettant pas de divertir un maximum. Quand bien même l’attitude machiste de Venkman peut laisser dubitatif aujourd’hui (certaines vannes ne passeraient plus dans un projet post #metoo), on se congratule de le voir être contrebalancé par le personnage de Louis. Interprété par Rick Moranis, ce dernier est une machine à punchlines. Improvisant énormément sur le plateau, chacune de ses apparitions génère son lot de fous rires. Louis est le vrai moteur comique du film. Non pas qu’il vole la vedette à Bill Murray, car, outre sa beauf-attitude, Venkman est celui qui a droit aux meilleures répliques, mais Louis possède cette part insouciante et naïvement drôle qui le rend plus attachant que les autres. Et dans un style nettement plus subtil, Harold Ramis n’est pas en reste non plus. Son humour noir couplé à son regard scientifique (bien que grossier pour les besoins du film) le rend vraiment redoutable lorsqu’il s’agit de vanner. De ce point de vue, S.O.S Fantômes régale notre boite à zygomatiques. Entre absurde et vulgarité, le film parvient à se maintenir correctement pour continuer à nous faire rire près de 40 ans après sa sortie. Mais ce qui rend le film toujours aussi intéressant réside bel et bien dans son aspect fantastique.

Si S.O.S Fantômes prend le temps de ménager ses effets, ce n’est que pour mieux nous emmener vers sa bascule où il plonge littéralement dans le film d’horreur. Le point de rupture sera atteint lorsque Dana sera attaquée dans son canapé par l’un des gardiens de Gozer. Si l’on continuera de rire après cette séquence (on ne se remet toujours pas de l’improvisation en plan-séquence de Moranis qui enchaîne les speechs sur le détournement fiscal), ce sera uniquement pour désarmer une vraie peur qui est en train de nous assaillir. Lorsque Gozer se dévoilera avec ses yeux injectés de sang, le doute ne sera plus permis : nous serons face à un vrai film d’épouvante. Pourtant, une fois encore, Reitman désamorce le frisson avec un élément grossier dans le but de nous rassurer. Ainsi, le bibendum chamallow ajoute cet élément de douceur au milieu d’une séquence qui aurait pu être particulièrement éprouvante. La juxtaposition des genres est habilement dosée par Ivan Reitman. S.O.S Fantômes est clairement le film de la consécration pour son réalisateur. Celui dans lequel il allie parfaitement ses expériences passées entre film d’horreur (Cannibal Girls) et comédie (Stripes). De plus, sa casquette de producteur sur des films comme Frissons de David Cronenberg ou American College de John Landis renforce sa créativité. S’il ne sera jamais plus aussi bon dans le mix des genres, on ne peut nier le fait qu’il se sort avec brio de cet exercice périlleux. Il réitérera l’expérience pour la suite des aventures des chasseurs de fantômes, seulement, le cahier des charges étant différent, il ne pourra pas vraiment laisser libre-court à son imagerie fantastique. Il se consacrera plutôt à la comédie dans la suite de sa carrière (et ce ne sera pas sans nous congratuler de films mémorables comme Jumeaux ou Junior). Pourtant, avec S.O.S Fantômes, il avait de quoi égaler des réalisateurs comme Joe Dante qui excellent dans le mariage des genres.

S.O.S Fantômes ne démérite absolument pas sa posture de film culte des années 80. Dosant parfaitement son horreur avec de l’humour, parfois graveleux, parfois délicieusement subtile, il est de ces monuments qu’on ne se lasse pas de remettre encore et encore tant il est indissociable de notre culture cinématographique. Succès retentissant qui donnera naissance à des romans, des animés ou des jeux-vidéos, S.O.S Fantômes se bonifie avec l’âge. Non pas qu’il soit dénué de défauts pour autant, mais il possède une aura si puissante qu’on ne peut pas ne pas y succomber à chaque fois qu’on y goûte.

1 Rétrolien / Ping

  1. SOS Fantômes – l'Héritage : Place aux jeunes ! -

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*