Debout les femmes ! : l’insoumission qui vient…

Debout les femmes ! : Non, ceci n’est pas un slogan pour la future campagne à la présidentielle 2022 du candidat Nicolas Dupont-Aignan, mais bel et bien le titre du troisième film documentaire du député LFI, journaliste-trublion et fondateur du média indépendant Fakir François Ruffin. Après Merci Patron ! et J’veux du Soleil (le premier ayant servi de film emblématique pour les nombreux rassemblements de Nuit Debout en mars-mai 2016 à l’aune de la Loi Travail, le second ayant été tourné durant le mois de décembre 2018 pendant le mouvement social des Gilets Jaunes, ndlr) le journaliste réalise à nouveau un film au titre proche de l’apostrophe, manière pour lui de s’adresser directement à ses spectateurs sous une forme à la fois populaire et faussement désinvolte.

Moins caustique que son premier long métrage et moins anecdotique que le suivant (son J’veux du Soleil, malgré sa sympathique efficacité, se limitait parfois à une succession de témoignages peu ou prou illustratifs voués à rendre compte de la précarité des petites gens avec une paradoxale légèreté…) Debout les femmes ! fut donc tourné en plein pic de la pandémie du Covid-19, période critique et particulièrement ardue pour un bon nombre de travailleuses sociales fatalement nécessaires à la (sur)vie de tout un pan de la population française : ainsi François Ruffin livre encore une fois un documentaire proche du reportage humain et humaniste, allant à la rencontre de toutes ces femmes-courage prenant à bras-le-corps leur profession en dépit de leur salaire de misère et de la pression sociale intrinsèque à leur statut et au fléau sanitaire. Auxiliaires de vie, AESH et AVS (respectivement Accompagnant des Élèves en Situation de Handicap et Auxiliaire de Vie Scolaire, ndlr), techniciennes de surface à l’Assemblée Nationale : autant de métiers relevant de la pure vie concrète et du terrain tenus le plus souvent par des femmes de tout âge et de toute origine, condition sine qua non au bon fonctionnement du système social français de plus en plus en proie au rendement économique et au pouvoir d’achat…

Une chose frappe au regard du troisième film de François Ruffin : une tonalité comique et ironique de bien moindre importance que dans ses deux précédents longs métrages. Et pour preuve : le mot d’ordre de Debout les femmes ! n’est autre que celui de tendresse, cette même tendresse que Bourvil chantait avec émotion il y a près de soixante ans dans sa chanson éponyme, chanson que Ruffin et son co-réalisateur Gilles Perret utilisent à quelques reprises en guise d’illustration musicale proprement efficace de l’empathie de toutes ces professionnelles. Pressurisées par l’État, très peu reconnues socialement et payées au lance-pierre lesdites femmes témoignent devant la caméra de Ruffin, exposant entre autres choses leurs conditions de travail particulièrement précaires, certains de leur patients, impotents ou encore handicapés ayant eux-mêmes connu les causes de leur burn-out ou de leur accident de travail, tristes retombées d’un système néolibéral broyant ses chaînons sans scrupules aucuns.

Le ton est simple, humble malgré une certaine propension à la démagogie de la part du fondateur de Fakir, propension forcément pardonnable car inévitable compte tenu du contexte. En outre l’objective dangerosité de la situation se voit pertinemment traduite par l’étonnante collaboration de François Ruffin avec le député LREM Bruno Bonnell : clairement antithétiques (Ruffin tient son cœur à gauche alors que Bonnell garde visiblement l’arme à droite d’un point de vue économique) les deux hommes vont dès les premières minutes du documentaire s’allier afin de rédiger un texte défendant les droits de toutes ces actrices des métiers du lien. En résultera une entente inattendue servant à merveille la cause de toutes ces femmes appelées à se redresser puis à garder la tête haute par le député LFI, symbiose parfaite contre la soumission à un État sourd et aveugle face à ces ressortissantes le constituant courageusement. Un bon film.

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