The Son : Tel The Father, tel The Son

Florian Zeller continue son expédition introspective familiale. Après The Father, c’est au tour du fils d’être mis à l’honneur dans The Son. Suivant la lignée de son précédent film, le réalisateur met de nouveau en scène un personnage en proie à ses émotions extrêmes et en incapacité totale à développer sa vie sociale. Nicholas, adolescent né de parents aisés, mais séparés, vit affreusement mal cette situation. Perpétuellement en marge de ce que lui impose la société, l’enfant sombre psychologiquement à mesure qu’il constate ne pas réussir à se fondre dans le monde qui l’entoure. Anthony Hopkins jonglait avec une maladie d’Alzheimer quasiment schizophrénique et obsédante. Ici, Nicholas Miller essaie de cohabiter avec une dépression avancée et dévorante.

En adaptant sa propre histoire, dont il est l’auteur, le réalisateur confirme son énorme talent de dramaturge. Ce que l’on ne peut pas lui retirer, c’est de savoir parfaitement raconter une histoire et développer ses enjeux. On vit littéralement l’histoire et on ressent en même temps que les personnages leur douleur et leur détresse. Avec The Son, l’auteur montre une véritable maturité à traiter d’un sujet aussi complexe et tabou que la dépression. Sa clairvoyance sur la maladie et la manière dont il parvient à écrire ses personnages force l’admiration. Tout semble si précis et si juste, que c’est à se demander s’il ne nous raconte pas un vécu profond.

Évidemment, son histoire est transcendée par deux éléments primordiaux. Le premier se découvre avec les acteurs époustouflants qui parviennent à magnifier les rôles qu’ils incarnent. Zen McGrath par exemple, qui incarne le jeune Nicholas Miller, l’enfant à problèmes, propose une excellente prestation pour une première. Son jeu est confondant de réalisme et on se demande si l’acteur lui-même ne puise pas en son for intérieur pour délivrer un texte, des dialogues et une émotion aussi forts que cela. Entraîné et guidé par un Hugh Jackman méconnaissable et tout simplement taillé au poil pour ce rôle. Il incarne avec passion un père attentionné et à l’écoute, essayant jusqu’au bout d’être la personne la plus à même de sauver son fils. Lui-même suivi par l’actrice Laura Dern et sa performance saisissante de mère parfois trop présente pour son fils. On ne peut pas mettre de côté l’acteur Anthony Hopkins, dont le rôle en toile de fond agit comme une ombre sur toute cette famille et dont il offre une aura délétère et antipathique avec un amusement pernicieux. Vient enfin l’actrice Vanessa Kirby qui achève le spectateur dans cette spirale par le seul lien qu’il trouvera afin de se raccrocher à cette histoire dont les enjeux finissent vite par le dépasser. Les acteurs et actrices parviennent avec une étonnante simplicité à se répondre et à se compléter dans une histoire qui tire son épingle du jeu par les relations entre les personnages et la complicité qu’ils dévoilent à l’écran.

Pour couronner le tout, The Son est littéralement propulsé par une mise en scène précise et diablement pensée. On pourra reprocher certaines ficelles, parfois grossières ou tout de moins poussives en terme d’attentes pour le spectateur. Le réalisateur nous a tous surpris une première fois avec The Father. L’artifice ne fonctionne malheureusement plus, et certaines idées de mise en scène manquent de renouvellement et d’originalité. On ne se laisse plus surprendre et les enjeux deviennent par moments prévisibles. Cela n’empêche pour autant pas de parfaitement répondre aux besoins de la narration. Et c’est tout ce qui importe pour un film de cet acabit. Avec un réel jeu sur l’attente, le hors-champ, les non-dits et la musique, The Son est un film qui se vit de la même manière qu’un film de James Wan : l’angoisse pendue au cou. Jamais un film dramatique n’aura eu à ce point des airs de film d’horreur tant la mise en scène se joue de notre patience. Florian Zeller semble lui-même serein à l’idée de ne pas surprendre autant qu’avec son précédent film, il réussit sans problème à faire pleurer votre cœur et mettre à terre vos émotions.

Florian Zeller sait parler de sujets souvent mis de côté et peu mis en avant au cinéma. Il avait fait forte impression en 2020 avec The Father dans lequel Anthony Hopkins était particulièrement époustouflant. Toujours avec sa maestria propre, il sait aborder le sujet de la dépression de la meilleure des manières. Il est d’autant plus difficile d’en parler qu’il s’agit avant tout d’un film qui se vit et se ressent. La narration est d’une justesse que seule la mise en scène parvient à sublimer, le tout emporté par des acteurs investis et inspirants. Le résultat est d’une efficacité et d’une virtuosité sans conteste. Nul doute que le long-métrage humidifiera les yeux des plus insensibles d’entre vous. On trépigne déjà d’impatience à l’idée de découvrir son prochain film qui s’intitulera certainement The Wife, à moins qu’il décide de parler du Saint-Esprit.

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