Beyond The Infinite Two Minutes : Mindfuck éclatant !!

Boucle temporelle, paradoxe temporel et plan-séquence représentent probablement trois des exercices de style parmi les plus difficiles à réaliser. Parvenir à construire un récit cohérent, parfaitement orchestré et qui tient la route peut rapidement perdre le plus motivé des réalisateurs. Autant dire que penser à rassembler les trois au sein du seul et même film est une mission suicide. Impossible n’est pas japonais puisqu’il s’agit du credo du film Shadowz de la semaine. Beyond The Infinite Two Minutes, premier long métrage réalisé par Junta Yamaguchi, est un immense raz-de-marrée qui vient secouer très fortement ce genre particulier. Le moment est venu de réunir toute la famille. Shadowz vous convie à une intense séance de remue-méninges pour une comédie qui fait passer Un Jour Sans Fin pour du travail d’amateur (en dépit du profond respect et l’estime que nous lui accorderons à jamais).

Kato, gérant d’un café, rentre dans sa chambre située au-dessus de son commerce. Son écran d’ordinateur s’allume et il s’y voit lui-même qui l’interpelle. Il découvre ainsi que son écran est relié à la télévision du café via leurs caméras respectives. Son écran montre des images se déroulant deux minutes dans le futur quand la télévision du café lui offre des images se passant deux minutes dans le passé. Avec une employée du café, Aya, et deux de ses amis, ils font quelques expériences de communication entre le passé et le futur afin de tenter de voir au-delà des deux minutes de la boucle temporelle dans laquelle ils se sont enfermés.

Si l’appellation de génie créatif est devenue galvaudée depuis des années, nul doute qu’elle sied parfaitement à Junta Yamaguchi. Comme si son expérience n’était pas suffisamment casse-gueule, il choisit délibérément de chronométrer sa boucle temporelle. En enfermant ses personnages dans une répétition d’actions toutes les deux minutes, il fait preuve d’un travail d’orfèvres. Le premier acte du film consiste à répéter les mêmes séquences en miroir où les héros se donnent mutuellement la réplique. Le jeu des questions/réponses se consolide de manière ludique. Non seulement il permet aux personnages d’éclaircir le mystère, mais il permet également au spectateur de les identifier. On ne s’ennuie jamais à revivre les mêmes scènes en boucle. Avec des traits caractéristiques très simples, Yamaguchi nous permet de nous attacher immédiatement à ses héros. Ils sont éminemment sympathiques et nous entraînent sans crier gare au cœur de leur enquête. Nous avons terriblement envie de savoir comment leur passé va faire écho dans leur futur. Pour ce faire, il faut saluer l’explosive mise en scène qui ne s’essouffle absolument jamais. Pensé comme un unique plan-séquence de plus d’une heure, Beyond The Infinite Two Minutes démontre qu’avec une note d’intention extrêmement détaillée, un téléphone portable pour être le plus mobile possible et une équipe rodée au cordeau, il est possible de réaliser de grandes choses. Que c’est épatant de bout en bout !

Difficile de décortiquer dans les moindres détails toutes les qualités de la mise en scène tant il faudrait s’attarder sur chacune des boucles (on doit approcher la trentaine bien tassée, autant dire mission impossible). Comme un immense puzzle, chacune des pièces s’imbriquent avec une maestria déconcertante. Beyond The Infinite Two Minutes justifie absolument toutes les actions de ses personnages. Rien n’est superflu et rien n’est à jeter. Et même lorsque le film menace de tomber dans l’excuse du paradoxe temporel pour y cacher une éventuelle faiblesse scénaristique, il parvient à contourner malicieusement le problème pour y apporter une conclusion indéniablement tendre. La finalité de l’histoire nous laisse sur une note sucrée, douce et légère. Le film est un vrai petit bonbon acidulé juste comme il faut et terriblement réconfortant. Le constat est sans appel : on ne veut pas quitter le café à la fin du voyage ! Preuve d’une franche réussite.

Afin de continuer dans les éloges, le film a la bonne idée de proposer une fin ouverte qui peut faire place à d’autres types de boucles temporelles. En effet, le dialogue final entre Kato et Megumi (la coiffeuse qui tient le salon à côté de son café) laisse présager une confrontation entre une vie passée et future en commun. En l’espace de quelques lignes de dialogue, Junta Yamaguchi nous permet d’assister à la naissance d’une potentielle histoire d’amour entre les deux héros. Nous voulons absolument savoir de quoi il en retourne. Que vont-ils devenir ? Que vont-ils décider ? Malheureusement, les meilleures choses doivent avoir une fin et Beyond The Infinite Two Minutes possède un sens du timing imparable. Il n’est pas trop long pour s’embourber dans d’éventuelles redites qui pourraient lasser le spectateur. Au contraire, il possède la durée adéquate pour susciter un vif intérêt, alimenter notre curiosité et nous laisser sur la nette appréciation d’un travail bien fait. On ne peut que s’incliner devant autant de création si bien pensée, bravo monsieur Yamaguchi !

Ne perdez plus une minute, Beyond The Infinite Two Minutes est à voir impérativement sur Shadowz. Le film vous enfermera dans un cocon chaud et douillet duquel vous ne voudrez plus sortir. Remarqué dans absolument tous les festivals dans lesquels il est présenté depuis deux ans, il débarque enfin en exclusivité sur Shadowz et se hisse d’ores et déjà dans le top des meilleures trouvailles de l’année de la plate-forme. Beyond The Infinite Two Minutes est une claque imparable, un uppercut franc et sévère, un exercice de style comme on n’en a rarement vu et qui atomise définitivement tout ce qui pourrait sortir dans le genre à l’avenir. Le film nous a littéralement bluffé, soufflé, ébahi, renversé, stupéfait, hébété, saisi, sidéré, médusé, ébloui, ahuri, épaté…qu’importe l’adjectif ad hoc, un nouveau remplace le précédent à chacune des boucles du film.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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