Fou à tuer : Mon voisin le tueur

Chaque éditeur vidéo a sa collection dédiée aux films d’horreur ces derniers temps et le prolifique Sidonis Calysta ne fait évidemment pas exception. Dans sa collection sobrement intitulée ‘’Cauchemar’’, Sidonis a donc édité Fou à tuer, disponible depuis le 17 février dernier dans une édition Digibook avec Blu-ray, DVD + livret de 24 pages écrit par l’incontournable Marc Toullec. Et on sera d’ailleurs reconnaissant à Sidonis de nous faire découvrir ce film, véritable curiosité réalisée en 1986 par David Schmoeller (à qui l’on doit également Tourist Trap et le premier Puppet Master) et produit par le prolifique Charles Band.

Karl Gunther, fils d’un médecin nazi, est le propriétaire d’un immeuble dont il ne loue les appartements qu’à des jeunes et jolies femmes. Voyeur, Gunther se faufile régulièrement dans le vide sanitaire de l’immeuble (le crawlspace du titre original) pour observer ses locataires quand il n’est pas occupé à assassiner des gens et à garder prisonnière dans une cage de son appartement une femme dont on ne sait rien et à qui il confie toutes ses pensées. Rongé par d’affreuses pulsions, hanté par les actes de son père et conscient de la gravité de ses crimes (il joue à la roulette russe après chacun de ses assassinats, mettant sa vie dans la balance le temps d’un jeu de hasard et conclut chaque détonation qui ne part pas d’un ‘’so be it’’ d’une voix lasse), Gunther a fait de son immeuble un véritable chausse-trappe où il a disposé des pièges sadiques. L’arrivée d’une nouvelle locataire va évidemment le faire basculer encore plus dans la folie…

Étonnant film que celui-ci, répondant à la demande du public de genre des années 80 (des meurtres sanglants, des jolies femmes dénudées) tout en creusant une veine plus atypique avec ce portrait à la fois terrifiant et presque empathique de ce monstre fou qu’est Gunther, personnage plus grand que nature portant en lui une nature tragique, faisant reposer les crimes de son père sur ses épaules et allant de plus en plus loin dans la folie à mesure qu’il assassine impunément. Si le sens du cadre et de l’espace de Schmoeller garantit de belles séquences claustrophobiques (on ne sort jamais de l’immeuble) et se montre parfaitement assuré, sublimé par la musique de Pino Donaggio, Fou à tuer ne serait évidemment rien sans la présence de Klaus Kinski. L’acteur, monstrueux de démesure, s’avère parfait dans un rôle dont il s’empare avec gourmandise. Son sourire étrange, son regard perçant, son attitude parfois enfantine et parfois carrément rigide élèvent le personnage de Gunther et sa prestation transcende un film qui aurait certainement été beaucoup plus fade sans lui.

Il faut dire que le scénario ne tient pas forcément toutes ses promesses et s’il a suffisamment de malice, de perversité et d’humour noir pour glacer le sang et se montrer palpitant, il n’exploite pas complètement toutes les possibilités de son potentiel et on l’aurait voulu encore plus sadique. Reste la composition de Kinski, acteur certainement aussi dingue que ses personnages et qui compliqua grandement la vie du réalisateur durant le tournage à tel point qu’en 1999, David Schmoeller réalisa un court métrage intitulé Please Kill Mr. Kinski. Il n’empêche que sa présence, aussi insupportable fut-elle pour ses partenaires de jeu ou ses réalisateurs, est capable de relever à elle seule nombre de films. C’est bien le cas ici avec Fou à tuer où Kinski dévore l’écran et fait d’une sympathique série B une véritable singularité à découvrir pour quiconque en soif de nouvelles sensations dans le genre de l’horreur, le film ayant une tonalité n’appartenant qu’à lui.

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