Rent-A-Pal : Vivre et mourir par procuration

Les hostilités sont lancées sur Shadowz. La plate-forme ouvre en grand les portes du mois d’octobre et nous promettent un programme extrêmement riche pour nous aider à patienter jusqu’à Halloween. Ce mois-ci, il sera difficile de faire un choix, tant la sélection promet d’être costaud. En effet, les bougres ont annoncé 40 nouveautés pour venir nous aider à patienter comme il se doit à célébrer Samhain. Oui, vous ne rêvez pas, cela représente l’ajout d’au moins un film par jour jusqu’au 31 octobre. Nous avons eu la chance d’avoir un aperçu de la programmation, ça va faire très mal ! S’il y a bien un moment propice pour souscrire à un abonnement Shadowz, c’est maintenant. Mais comme vous êtes des lecteurs assidus de nos chroniques hebdomadaires, nous ne doutons pas que vous soyez déjà abonnés. Quoiqu’il en soit, les festivités ont commencé copieusement avec l’ajout de deux nouvelles exclusivités, parmi lesquelles Rent-A-Pal, qui a furieusement piqué notre curiosité.

David est un quadragénaire, vieux garçon, qui mène une morne existence qui consiste, pour l’essentiel, à s’occuper de sa mère atteinte de démence. En cherchant une partenaire via un service de rencontres vidéo, il découvre une étrange cassette VHS appelée Rent-A-Pal. Animée par le charmant et charismatique Andy, la bande offre à David de la compagnie, de la compassion et de l’amitié. Mais cette relation n’est pas à sens unique et il y a forcément un prix à payer.

Premier long-métrage du réalisateur Jon Stevenson, Rent-A-Pal est le film idéal pour se lancer dans un marathon de films de genre. Il s’inscrit dans une mouvance que certains qualifient d’elevated horror, soit un film d’horreur qui ne passe pas nécessairement par l’abondance d’effets gores pour effrayer et marquer son audience. L’elevated horror est un terme inventé pour regrouper tous les films de genre ayant une démarche « auteurisante » envers l’horreur et le fantastique. Une horreur nettement plus intellectuelle qui prend le temps de s’attarder sur son histoire et sur les messages à véhiculer afin de mieux impacter les esprits au moment de lâcher les chiens. Une catégorie récente qui regroupe des films divers et variés où l’on recense beaucoup de films du catalogue A24 (It Comes At Night, Hérédité, The Witch). Rent-A-Pal aurait pu être une production A24 que cela ne nous aurait pas étonné. Le film de Jon Stevenson traite d’une horreur quotidienne, une horreur qui s’immisce en nous tel un venin et qui nous empoisonne à petit feu. David a été élevé dans l’amour de la famille. Après la mort de son père, il a tout lâché pour rester auprès de sa mère. Son quotidien se résume à s’occuper d’elle et visionner les diverses VHS envoyées par l’agence matrimoniale dans l’espoir de trouver le bonheur qu’il mérite. David est un garçon introverti, d’une extrême gentillesse et d’une patience hors-norme, tant est si bien qu’il ne réalise pas qu’il se coupe du reste du monde. Il endosse la maladie de sa mère par procuration. Il y a une énorme souffrance qui le tourmente et qui laisse poindre une fêlure psychologique qui pourrait le rendre, à tout moment, hors de contrôle. Ce sentiment de malaise et d’instabilité, Jon Stevenson (qui signe le scénario de son film) en jouera au maximum, retardant l’inévitable basculement jusque dans un final glaçant à souhait. L’important n’est pas la chute du personnage, l’important est de comprendre ce qui l’y a amené. Parvenant parfaitement à maintenir une tension qui ne se relâche jamais, Stevenson doit énormément à l’excellent travail de Brian Landis Folkins qui parvient autant à émouvoir qu’à effrayer totalement.

Si le travail d’écriture de Jon Stevenson est prodigieux, sa réalisation ne manque pas d’élégance. Rent-A-Pal aurait pu souffrir du syndrome du premier film et sombrer dans les patterns inhérent à ce genre de projet, à savoir l’excès de générosité. C’est exactement l’effet inverse qui se produit ici. Ce qui frappe d’emblée réside dans cette amour de la VHS. Pour sûr que Jon Stevenson est un enfant de la VHS. Le temps de plusieurs inserts, il arriverait presque à nous faire ressentir le plaisir qui nous animait lorsque nous mettions une cassette dans le magnétoscope. Jonglant entre les inserts à l’intérieur du magnétoscope et les gros plans sur les yeux de David qui se perdent dans son programme, Stevenson nous fait ressentir tout ce qui définit son héros : la toxicité de son amour. La relation qu’il entretient avec sa mère est la même que celle qu’il entretient avec sa VHS dans laquelle il retrouve Andy tous les soirs : il s’oublie et se détruit par altruisme. Cette destruction passe par la mise en scène qui nous inonde d’informations à notre insu. Stevenson nous contamine par la démence de ses personnages. Sans que nous nous en rendions compte, il installe une routine entre son film et nous. Les mêmes gestes sont répétés à l’infini, les mêmes répliques sont envoyées des dizaines de fois. Et tout coule tellement de source. Le film ne nous enfonce pas ses idées avec de gros sabots. Il nous prépare pour l’inéluctable chute. Il tient nos sens en éveil pour ne rien perdre du basculement définitif de son héros et que nous ayons tous les codes en main pour le comprendre immédiatement. Rent-A-Pal peut laisser pantois le temps de certaines séquences, mais à aucun moment, lorsque le générique de fin apparaîtra, on ne pourra crier à l’incompréhension. Jon Stevenson fait preuve d’un travail titanesque et d’une force de frappe immense. Bloqué dans un décors minimaliste, il détonne d’inventivité. C’est un réalisateur qu’il faudra surveiller de très près. S’il fournit autant d’effort pour ses prochains films, il ira vraiment très loin.

Rent-A-Pal est un drame psychologique poignant qui nous aura complètement retourné. S’il bascule dans le film de genre le temps d’un final saisissant, il prouve surtout que le Shining de Kubrick n’aura jamais fait autant d’émules qu’avec ce film. Rien n’est plus effrayant que de sentir une psyché partir en vrille. Avec une réalisation minutieuse et gérée au cordeau, Jon Stevenson délivre un grand film dans lequel chaque plan n’est pas superflu. Un vrai régal et un vrai coup de cœur en ce qui nous concerne. Rent-A-Pal figure parmi les meilleures Exclusivités Shadowz, et de loin !

Abonnez-vous sans crainte à
SHADOWZ – L’unique plateforme de SCREAMING !

Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*