Des Fleurs pour un Espion : La Copie dans la Peau

Toujours la même rengaine avec le cinéma italien de la grande époque. En parallèle des productions classiques conduites par les fameux réalisateurs reconnus, le marché s’emballe à chaque émancipation d’un genre venant du cinéma anglo-saxon. À savoir, au détour des années 1960, de l’avènement de 007 incarné avec classe par Sean Connery qui connaîtra le succès au fil de ses aventures entre la Jamaïque, la Turquie et autres pays exotiques. Cela dure depuis 60 ans, seul héros intemporel et moderne à poursuivre ses cavalcades sous différentes allures.
Mais dans les années 1960, le succès du personnage créé par Ian Fleming a traîné dans son sillage une flopée de copies. Sachez que bien en amont de 007, le cinéma français avait déjà enclenché la première avec Le Gorille avec Lino Ventura, le Tigre avec Roger Hanin et OSS117 avec Kerwin Matthews pour une aventure en Corse sous la houlette d’André Hunebelle.
James Bond n’est donc pas le premier à avoir dégainé son PPK, mais reste le dernier d’une longue liste, même Jason Bourne n’ayant pas réussi à lui faire de l’ombre au tournant des années 2000. Alors pensez-vous, ce piètre Super 7, nouvel agent anglais envoyé en mission d’assassinat en Europe ne fait pas le poids, pire il accentue la caricature de l’agent secret suffisant au cinéma.

Super 7 n’est pas un mauvais agent et ses aventures restent divertissantes. Il aura le droit à deux films, le premier étant Super 7 appelle le Sphinx sorti en 1965 déjà réalisé par Umberto Lenzi. Ce dernier reprend son poste pour la suite tourné dans la foulée du succès du premier opus, le genre aujourd’hui baptisé EuroSpy étant une vague de productions qui a connu une forte popularité grâce à OSS117 et à James Bond dans la seconde moitié du 20e siècle.
S’écoulant entre 1955 (début en France du genre) jusqu’en 1967 en Italie – sans compter la suite des James Bond à part – l’EuroSpy s’est produit en parallèle des Westerns prenant la suite des Péplums en fin de vie dans les studios de Cinecitta à Rome. Le héros incarnant Super 7 vient justement du Péplum, acteur américain (parmi tant d’autres) ayant débarqué en Italie pour faire carrière avec son physique imposant et sa mâchoire carrée. Tout ce que représente Roger Brown, acteur ayant disparu des radars après la périclitation des films d’espionnages en Italie, en dépit d’une incursion dans les films de jungle par la suite. L’acteur est toujours en activité grâce à des participations à divers courts-métrages, mais depuis les années 70 et quelques apparitions à la télévision, c’est le calme plat. 
En super espion, Roger Browne a la carrure nécessaire pour assurer la prestance dans le costume et quelques séquences d’action bien menées par Umberto Lenzi. Mais avouons que le scénario ne sait pas bien quoi raconter. Tombant dans la caricature du genre, avec le recul d’aujourd’hui, Des Fleurs pour un Espion donne plutôt l’impression de faire face, la preuve sur pièce, à du pastiche sauce OSS117 par Michel Hazanavicius. 

Le long-métrage d’Umberto Lenzi aligne les tares qui ont fait le succès du genre par suffisance à l’époque. Ce qui a causé sa mort entre des missions aux décors fabuleux, mais tournant inlassablement en rond, l’espion courant incessamment après des gadgets pouvant causer la fin du monde pourchassé par des méchants patibulaires. Bref, la même rengaine sans la richesse d’un James Bond et sa force de frappe publicitaire. Super 7 se promène ainsi à Paris (merci les stocks Shot), à Genève pour se poser ensuite à Athènes, théâtre d’un final enlevé. Faisant preuve d’un manichéisme à s’en tordre les côtes d’hilarité, la masculinité ambiante et les échanges donneront le sel à un Jean-François Hallain n’ayant plus qu’à se servir pour pasticher le genre 40 ans plus tard pour Le Caire Nid d’Espions. Les rigolades au bureau entre agents, les différentes salutations avec noms à l’appui et la misogynie éclatante d’un cinéma réservé aux messieurs. Des Fleurs pour un Espion est l’exemple typique de la déviance d’un genre se prenant beaucoup trop au sérieux au contraire d’un James Bond n’oubliant jamais d’être un blockbuster, un divertissement pour toute la famille. Si la période Roger Moore a tendance à frôler cette déviance, l’humour sauvera la série permettant un succès toujours plus démesuré à la saga répondant aux attentes du public à chaque film et prenant le pouls d’une époque avec parfois un certain avant-gardisme effrayant (oui Moonraker c’est toi que je vise).

Des Fleurs pour un Espion est une production charmante et désuète nous embarquant dans une aventure bien menée et carrée par un réalisateur qui s’épanouira plus volontiers dans le néo-polar italien quelques années plus tard. En attendant, il orchestre une histoire classique manquant de pep’s pour accrocher son spectateur sur la longueur à travers des décors sympathiques et aux côtés de jolies femmes, notamment l’étonnante Yoko Tani qui aspire l’écran à chaque apparition, actrice charmante à la surprenante carrière auprès des plus grands de son époque.
Des Fleurs pour un Espion est disponible en DVD chez Artus Films, et si vous êtes un fan invétéré du genre, on ne peut que vous conseiller la découverte.

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