Devilman le Diabolique : Ciné Fumeux

Artus Films continue de garnir sa collection Ciné Fumetti avec un nouveau titre pléonastique, Devilman le Diabolique. L’ourson cinéphile poursuit son exploration des grandes heures d’un genre purement italien adaptant les titres phares de la bande-dessinée transalpine pour adultes. Nous avons ainsi découvert Satanik, Kriminal ou Superargo également disponibles chez Artus Films. Avec ce nouveau film réalisé par Paolo Bianchini disponible en DVD, nous faisons face à un grand méchant kidnappant d’éminents chirurgiens pour lui greffer un cerveau surpuissant.

Un sacré programme qui faisait la joie des cinémas d’exploitation de l’époque en dépit du succès modéré de cette proposition kitsch. Devilman était amené à avoir des suites et cela se ressent dans son final. Une exploitation opportuniste d’un personnage créé pour l’occasion s’accommodant des codes des Fumetti dans sa dernière partie après avoir écumé l’Euro Spy et le film d’aventures. Le film est une proposition bâtarde additionnant les styles et les genres pour satisfaire le spectateur et les modes d’alors. Devilman se rapproche surtout de Fantomas en cumulant espionnage, aventures et péripéties d’action après que la trilogie signée André Hunnebelle ait connu un succès retentissant en Europe quelques années plus tôt. Puis, quand Devilman se dévoile à la 51e minute, il ne fait nul doute que Fantomas demeure une inspiration franche. Personnage démoniaque au masque papier aluminium risible, il se montre tout aussi implacable que rapidement débordé par l’intrusion du journaliste dans sa base secrète. Un lieu qui renvoie aux décors de Fantomas, mais aussi à ceux de James Bond, autre référence forte d’un film bricolé avec des stocks-shot d’un autre film produit par le même producteur, Gabriele Crisanti, qui recycle une partie des séquences d’un film de 1965, Le Trésor de l’Atlas (I Perdoni Del Sahara) réalisé par Guido Malatesta. Le héros proche d’un Fandor se retrouve alors au Maroc, soutenu par des Bédouins dont la fille du chef a été enlevée par Devilman. Le film trouve des couleurs sous le soleil africain rappelant par séquence Lawrence d’Arabie, notamment par une attaque des Bédouins plutôt bien montée aux séquences additionnelles. La conjugaison des deux films trouve une osmose étrange et fragile (nous ne sommes pas dupes à la découverte) qui permet de dynamiser un dernier tiers pop et divertissant. 

Devilman le Diabolique est une contrefaçon bien réalisée avançant une intrigue rabâchée. Le film profite surtout des décors urbains de Rome pour l’approche de type « espionnage » de la première partie. On y suit les déambulations de la ravissante Liz Barett (Luisa Baratto), déjà croisée chez Artus dans Killer Kid avec Anthony Steffen, qui apporte dans ce métrage tout son charme. Actrice évanescente au cœur du cinéma italien des années 1960, elle ne compte que onze longs métrages avant de disparaître. Des titres glorieux comme son premier film Vierges pour le Bourreau (1965), on la retrouve dans 7 Winchester pour un Massacre en 1967 réalisé par Enzo G. Castellari ou encore dans Superargo contre les Robots en 1968, énième adaptation de Fumetti au cinéma. Elle conclura sa carrière en 1969 avec Colpo Di Stato de Lucinao Salce, comédie de science-fiction oubliée.
À ses côtés, le héros journaliste est incarné par un acteur plus confirmé et habitué du milieu. Guy Madison a fière allure dans cette copie modeste de Fantomas. Plutôt bon comédien dans la moyenne de l’époque, il est un bellâtre grisonnant, journaliste à l’attitude 007 qui va tout faire pour retrouver le chirurgien enlevé et vaincre Devilman. Des péripéties proches de celle d’un Tintin, une figure qui a muté le simple reportage en une périlleuse aventure héroïque. Guy Madison est un des nombreux acteurs américains débarqués de sa Californie natale pour faire carrière en Italie. Quentin Tarantino a bien résumé ses trajectoires dans son dernier film et en voici un nouvel exemple. Après une piètre carrière US, il se réfugie dans les péplums italiens avant de bifurquer dans le western et tous les autres genres phares qui vont juguler le cinéma transalpin de l’époque. Deux ans avant Devilman, il croise déjà la route de Liz Barett dans le fameux 7 Winchester pour un Massacre. Une carrière riche au cœur d’un cinéma qui a su exploiter adroitement ce faux air entre Paul Newman et James Dean, un flegme de vieux beau garçon dans des séries B qui avaient grandement besoin de ses gueules sûres à l’aspect américain. Une carrière sans accroc ni le moindre éclat, à l’image de cette tentative frauduleuse, certes amusante, malgré le bénéfice à gagner de revoir simplement Fantomas avec Louis de Funès une énième fois.
Devilman Le Diabolique est une fumeuse copie aérée à la narration confuse, mais concise, une rareté dénichée par Artus Films qui l’édite en DVD pour les amoureux de cette époque, une niche qui se régalera de ces pépites oubliées et oubliables que l’on reverra tout de même avec nos enfants jeunes et innocents qui s’en délecteront avant de comprendre la supercherie.

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