Wrinkles the Clown : Le premier boogeyman du monde réel

Ça y est, l’été est définitivement arrivé et avec lui les premières canicules ainsi que les cas COVID qui repartent à la hausse dans un contexte où mettre le plein d’essence dans sa voiture fait aussi mal qu’une fistule anale… Ça fait cinq ans qu’on nous enfile avec un bon gros Boeing des familles et les Français ouvrent à peine les yeux quand on essaie de faire passer les ailes… mais nous ne sommes pas là pour nous morfondre sur la réalité de notre existence. Non, il est hors de question de gâcher un si beau rendez-vous comme notre séance Shadowz hebdomadaire. Qui dit fin du mois, dit nouvelles exclusivités. Une fois n’est pas coutume, nous nous sommes aventurés sur un sentier qui nous a sorti de notre zone de confort afin de venir vous parler d’un documentaire aussi atypique que son sujet amène de solides réflexions. Wrinkles the Clown, réalisé par Michael Beach Nichols, revient sur le phénomène qui a inquiété les États-Unis en 2014.

Petit rappel des faits. En 2014, une vidéo YouTube terrifiante est mise en ligne. On peut y voir, à partir d’une caméra de sécurité, un clown émergeant du dessous du lit d’une fillette qui dort paisiblement. Il s’agit de Wrinkles, le clown du sud-ouest de la Floride que les parents peuvent engager pour venir terroriser leurs enfants turbulents. Son numéro de téléphone est placardé partout en ville et les parents n’ont qu’à laisser un message sur sa sinistre boîte vocale afin de s’allouer ses services. Entre peur panique chez certains enfants et fascination chez d’autres, la légende de Wrinkles le clown ainsi que le folklore autour de lui a très vite gagné internet. Retour sur une affaire qui a défrayé la chronique.

Si le sujet vous intéresse de prime abord, nous vous invitons grandement à stopper net votre lecture et à aller voir immédiatement le film sur Shadowz. En effet, le documentaire de Michael Beach Nichols se vit comme une histoire passionnante à la fois drôle, ironique et terrifiante. Ce dernier repousse les possibilités inhérentes à ce genre d’exercice et s’octroie même un twist en milieu de métrage qui remet tous les propos en perspective. Comme un bon thriller qui nous incite à prendre part à l’enquête afin de dénicher le vrai du faux, Wrinkles the Clown est de ces documentaires desquels on ressort forcément changé. Le sujet principal réside en la capacité qu’ont les gens à se faire manipuler par les images (chose que ne se privera pas de faire son réalisateur, voilà pourquoi ce serait un gâchis qu’on vous révèle le twist intentionnellement).

Par le biais de plusieurs intervenants (dont le véritable Wrinkles), le film de Michael Beach Nichols pose la question morale d’une telle entreprise. Jusqu’à quel point peut-on effrayer nos enfants sans engager de notion de maltraitance ? Voilà toute la complexité du projet. Et le constat est sans appel : les parents que l’on croise au cœur du film ne sont que d’odieux irresponsables. Très vite, Wrinkles the Clown dévie de son sujet principal, à savoir le mystère qui entoure l’homme derrière le masque, afin de proposer un portrait parental fort peu sympathique. Quel enfant n’a jamais tremblé sous la menace du père fouettard ? Est-ce que vous aussi vous avez grandi dans la peur d’être envoyé à « l’école des enfants méchants » ? Si ces menaces ne demeuraient que des paroles censées calmer nos ardeurs en défiance de l’autorité parentale, elles n’en restaient qu’au stade simple de mots. Que se serait-il passé si la menace avait pris une forme véritable ? La réponse est toute donnée avec Wrinkles. Il suffit d’entendre les hurlements de terreur des enfants lorsque les parents laissent des messages sur le répondeur du clown afin que ce dernier vienne les dévorer pour comprendre que la blague tourne sévèrement au vinaigre. D’aucuns apprécieront l’humour noir de la situation, mais force est de constater que certains parents sont entrés dans une spirale digne des plus grandes tortures psychologiques et donc, de facto, dans une forme de maltraitance qui peut être sévèrement punie.

Mais le coup de génie de Wrinkles the Clown est qu’il remet perpétuellement en question tout ce qu’il aborde. Michael Beach Nichols laisse place à toutes les thèses et antithèses possibles. Ainsi lorsqu’il interroge une fillette traumatisée par la menace de se faire dévorer par Wrinkles, il va confronter son expérience avec celle d’un jeune garçon qui admire le boogeyman au point de vouer une passion débordante pour les clowns maléfiques. Ce dernier ne craint pas Wrinkles, il l’encense jusqu’à tourner des vidéos grimé en clown et fantasmer sur ce qu’il demanderait à Wrinkles de faire à une potentielle victime. Ainsi, le basculement sociétal s’opère à partir du moment où le réalisateur ne fait plus qu’un seul et unique film sur un illuminé déguisé en clown, mais lorsqu’il vient questionner la responsabilité des réseaux quant à l’impuissance des plus jeunes face aux images qu’ils consomment en boucle. Pour un enfant qui saura prendre le recule nécessaire pour ne pas se faire bouffer par l’image, il y en a des dizaines d’autres qui auront besoin de longues années de thérapie derrière.

Par ce constat, le réalisateur touche également un mot sur le lobby des armes à feu et le rapport à la violence transmise par les convictions parentales. Il interroge aussi la transmission des folklores chez les enfants et surtout leur rapport face à certaines pratiques qui peuvent mettre leur intégrité physique et psychique en péril. Et c’est au moment où l’on décide de prendre parti et de conclure à la toxicité du personnage derrière le masque que survient le superbe twist qui remet tout en question. Nous ne nous épancherons pas plus sur le dernier tiers du film tant les images valent mieux que n’importe quel mot. Retenez juste que tout n’est qu’affaire de manipulation et que les jeunes enfants ne devraient définitivement pas avoir de téléphones portables, d’ordinateurs ou de tablettes avant d’avoir acquis un certain recul et esprit critique. Car sous la funeste blague du boogeyman dans la réalité, il y aura toujours d’autres illuminés nettement plus extrêmes pour prendre le sujet au sérieux.

Wrinkles the Clown est un documentaire démentiel qui parvient à décortiquer ce qui s’apparente à une mauvaise blague pour en tirer un vrai sujet de société. Envoyé avec un entrain certain par la qualité des intervenants qu’il emploie, Wrinkles the Clown possède un ton foncièrement léger qui permet de mieux faire la lumière sur les questions lourdes qu’il soulève. Un documentaire à ranger aux côtés des fabuleux Faites Le Mur ! de Banksy et de The Wild & The Wonderful Whites of West Virginia de Julien Nitzberg que nous nous hâtons de voir débarquer un jour ou l’autre sur Shadowz.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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