Vent Chaud : Cet obscur objet du désir

Depuis que nous suivons le festival Chéries-Chéris et son actualité, nous nous sommes rendus compte de la diversité du cinéma sud-américain et des nombreuses propositions qu’il a à nous offrir sur la thématique LGBTQ+. Des propositions qui ne trouvent pas toujours de distributeurs en salles à quelques exceptions près, Outplay et Optimale Distribution étant toujours prêts à prendre des risques. C’est d’ailleurs Optimale qui sort Vent Chaud en salles, le film s’étant fait remarquer à la dernière édition de Chéries-Chéris (où il a remporté le Grand Prix du Jury dans la catégorie Fictions).

Et ce n’est pas pour rien que Vent Chaud, du brésilien Daniel Nolasco, a été récompensé car il s’agit d’un film hautement singulier, véritable proposition de cinéma, sommet d’érotisme embrassant le désir de ses personnages sans tabou. L’intrigue se déroule près d’une compagnie minière. À la fin de ses journées de travail, Sandro retrouve son collègue Ricardo dans la forêt avoisinante où ils ont des relations sexuelles. Mais Sandro est attiré par Maicon qu’il observe régulièrement à la piscine. Quand Maicon vient travailler dans la compagnie minière, le désir de Sandro se transforme en obsession et cela empire quand il réalise que Maicon et Ricardo ont une aventure…

Réflexion vertigineuse et envoûtante sur le désir et l’obsession, Vent Chaud est une œuvre prenant à bras-le-corps ses thématiques, travaillées dès l’écriture mais surtout fabuleusement mises en exergue à travers la mise en scène de Nolasco. Baignant dans une atmosphère chaude et des couleurs vives, tout le film a des allures de fantasme plus vrai que nature où le moindre désir de son personnage principal est exacerbé par la colorimétrie ou l’attention sur les détails, filmés de façon fétichiste. Tout chez Sandro est désir, jusqu’à l’obsession et c’est bien cela que Nolasco nous fait ressentir, comme si le film entier vibrait avec son personnage, traversé par les mêmes pulsions.

Des pulsions dont on nous gratifie à travers des scènes sexuellement explicites, allant de l’anulingus à la fellation montrée dans toute sa durée. Mais jamais gratuites, toutes ces séquences de sexe s’inscrivent parfaitement dans le récit (qui, en passant, ne manque pas de tendresse) et trouvent leur justification, servant à illustrer combien, dans cet endroit isolé et chaud, il n’y a pas grand-chose d’autre à faire pour les personnages que de se désirer, que de coucher ensemble. Construire quelque chose semble presque voué à l’échec, seul compte le plaisir comme si les désirs humains se mettaient au diapason de la météo du récit. D’où le titre joliment trouvé, Vent Chaud, qui charrie avec lui tout le désir que l’on peut éprouver quand l’été dure et que les corps se dévoilent. Daniel Nolasco joue d’ailleurs avec tout l’imaginaire autour du cinéma gay : objets phalliques dans le décor, figures de policier, de nageur, de cow-boy déclinées et fantasmées, c’est tout un attirail pop que le film dévoile, proposition d’autant plus frondeuse qu’elle est brésilienne et qu’elle s’impose comme un joli doigt d’honneur à Bolsonaro dont les propos homophobes ont plusieurs fois défrayé la chronique. C’est en tout cas un savoureux film que Vent Chaud qui ausculte comme rarement on l’a fait le désir et son inconscient pour un film troublant jusque dans son dénouement.

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  1. Je tremble, ô matador : Les tremblements du désir -

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