L’Anniversaire de Tommy : Une fête pour grands et petits

Le jour de ses cinq ans, le lapin Tommy se retrouve sans sa famille partie emmener la petite sœur chez le docteur. Quelle tournure va donc prendre cette journée dont le déroulement se révélera surprenant et instructif ? Le film du réalisateur suédois Michael Ekblad, adaptation des livres de l’autrice Rotraut Susanne Berner, nous narre une folle expédition, en salles le 8 juin.

La scène introductive des portraits permet la traditionnelle présentation des personnages (cf le récent Encanto, la fantastique famille Madrigal) et annonce en filigrane les désagréments éventuels que subira le héros, même si le cadre semble extrêmement bienveillant. Les animaux sont humanisés (parole, habits, vie sociale…), mais sont accompagnés d’autres qui ne le sont pas et correspondent à nos bêtes de compagnie ou à la nature non domestiquée. L’animation est assez classique, la mise en scène est dynamique, avec une grande présence des tons pastels et un grand soin des ambiances grâce à une belle gestion de la couleur (de sublimes camaïeux de verts). Doublage et effets sonores sont également de qualité. Le film est parsemé de chansons, dont on peut regretter qu’elles ne soient qu’ébauchées (notamment lors de la drôlatique scène des grenouilles).L’univers de la diégèse est sans surprise, même si une scène onirique se démarquera par son inventivité (le sommet en animation restant peut-être celle de la marche des éléphants de Dumbo).

Quoi de pire, le jour tant attendu de son anniversaire, que de se retrouver esseulé ? C’est pourtant grâce à ce non-événement perturbateur que Tommy va évoluer et mûrir. A partir d’un rejet du vivant, du repli sur soi qu’illustre une tristounette scène de jeu de chevaux avec ses peluches inanimées où la voix de l’enfant ne trouve aucun écho, le récit va se mettre en mouvement. L’expédition de Tommy va être source, via de menus et amusants périples, de régénération : éclosion de l’empathie y compris avec les plus frêles créatures (papillons, escargots…), valorisation de l’entraide et des encouragements (avec, par exemple, la scène de Bello le chien baveur qui est à la peine lors d’un exploit herculesque) et abandon d’une posture égocentrique, résolution euphorisante des dissensions (entre les jumeaux, entre Tommy et Julie, entre Tommy et sa sœur), affirmation d’une résilience salvatrice (comme en atteste le nombre impressionnant de chutes diverses et variées dont on se relève toujours). A la fin de la journée, avec sa famille retrouvée, Tommy aura bien grandi.

Même si les péripéties du voyage de Tommy appartiennent à un univers à peu près réaliste, de nombreux éléments renvoient plus ou moins explicitement à ceux des contes ou récits de chevalerie : le fait d’aller retrouver la grand-mère est évidemment une référence au Petit Chaperon rouge ; l’excursion picaresque du canari nommé Arthur et la quête de sa mère poule qui apparaît comme un comic relief (aspect burlesque du heaume de fortune sur sa monture pie); la princesse en détresse Julie en haut de sa tour… On peut même aussi songer, toutes proportions gardées, à l’aspect tragique convoqué par l’unité de temps et le risque tout relatif de disparition (celle hors-champ derrière l’arbre rappelant le hors-scène fatidique du théâtre). Un furtif aspect horrifique est présent avec la scène dans les bois évoquant celle de Blanche-Neige ou une scène d’orage (on pense à un court de Disney Le Vieux Moulin).

Alors, le renard représente-t-il une réelle menace punitive dans cet univers si mignon où règne une joyeuse insouciance ? Même s’il apparaît très tardivement, on pourrait le penser du fait de la mise en scène qui nous fait adopter son point de vue, tapi qu’il est derrière les branchages, tel un Michael Myers guettant son alléchante poussine Laurie Strode, attendant patiemment qu’elle se sépare du groupe pour mieux la croquer. Mais nous ne sommes pas dans un slasher pour têtards, ni même dans un avatar de Pierre et le loup (dont une adaptation extraordinaire en stop-motion a été réalisée en 2006 par Suzie Templeton) : ici, le danger demeure très modeste et est avant tout en soi, dans la brèche du ressassement et le gouffre du ressentiment. Au regard prédateur s’oppose une « longue vue d’anniversaire », fruit d’une inventivité ludique et aussi efficace que les jumelles initiales. A l’issue du voyage, Tommy sera même le conteur ravi de sa folle journée d’anniversaire (scène méta du drap).

Nous ne pouvons que recommander L’Anniversaire de Tommy qui, bien que clairement destiné à un jeune public, plaira à tout un chacun par ses qualités visuelles et ses nombreuses références au service d’une histoire simple, mais enthousiasmante.

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