Les Producteurs : La première folie de Mel Brooks

L’été est décidément chargé du côté des ressorties cinéma : on a eu le droit à Platoon, Blood Simple, The Party, A Brighter Summer Day, La Ballade de Narayama, The Intruder… Pour au final une qualité toujours au rendez-vous, présentant un éventail des plus alléchants dans un été de cinéma confiné à quelques nouvelles sorties vraiment réussies (parmi lesquelles on peut citer Les Indestructibles 2, Une pluie sans fin, Mission : Impossible – Fallout ou encore Happiness Road). Parmi ces ressorties, on remarquera également celle du premier film de Mel Brooks fêtant cette année son cinquantième anniversaire dans une version restaurée 4K : Les Producteurs, distribué en salles par Carlotta et édité prochainement en vidéo par Studio Canal. L’occasion de redécouvrir toute la puissance comique d’un cinéaste inégalé dans son domaine, faisant preuve d’une inventivité constante.

Quand Mel Brooks écrit Les Producteurs, il a suffisamment d’expérience dans le monde du théâtre et de la télévision (il a co-créé la série Max la menace) pour pouvoir convaincre ses propres producteurs qu’il n’y a que lui pour réaliser le film. C’est ainsi que Brooks, la quarantaine, réalise son premier long-métrage (qui lui vaudra l’Oscar du Meilleur Scénario Original) avec une force comique à toute épreuve, charge féroce contre le monde du spectacle, ses extravagances et ses magouilles tout en ridiculisant au passage Adolf Hitler dans une comédie musicale tellement énorme que ça en devient hilarant. Et si certains n’ont pas vu tout cela d’un bon œil, Brooks a pu compter sur plusieurs soutiens (notamment celui de Peter Sellers qui afficha clairement son admiration pour le film) pour démontrer son talent et embrayer avec la carrière fructueuse qu’on lui connaît.

Dès le début, le film pose le ton. Max Bialystock, producteur de Broadway déchu, passe son temps à satisfaire tous les caprices de plusieurs vieilles dames dans le but de leur soutirer suffisamment d’argent pour survivre. Quand Leo Bloom, comptable venu mettre le nez dans ses comptes, réalise qu’il y aurait un moyen de se faire énormément d’argent en montant une pièce qui serait un échec immédiat, les deux hommes décident de concrétiser la chose. En montant Le Printemps d’Hitler, une comédie musicale faisant l’apologie du dictateur allemand, ils pensent tenir le gros lot. Ils font alors appel à de nombreuses personnalités du show-businness garantissant l’échec (ajoutons un metteur en scène qui aime se travestir et un acteur hippie à un auteur pro-nazi) pour s’assurer du triomphe de leur plan…

Féroce, bourrée de cynisme et de dérision, Les Producteurs donne une idée du style de Mel Brooks : un goût pour l’excès, l’acceptation du ridicule, l’amour des gags improbables, des ruptures de ton, un mélange de comique, de pathétique et d’hystérie joyeusement foutraque mais au service d’un récit malin. Certes, les films de Brooks sont inégaux, on y trouve toujours des gags qui tombent à plat, des idées moins savoureuses que d’autres. Mais le génie du cinéaste est tel qu’il sait souvent frapper juste et de façon particulièrement imprévisible. À le revoir, Les Producteurs n’est peut-être pas son meilleur essai, un peu trop hystérique et un poil trop court dans ses enchaînements. Mais il pose les jalons d’un cinéma comique qui nous manque (Brooks, encore en vie, n’a pas réalisé de film depuis 1995) et surtout nous offre un superbe duo de comédiens : Zero Mostel et Gene Wilder. Les deux, cabotins en diable, composent deux personnages d’escrocs particulièrement savoureux et dont l’alchimie basée sur leurs différences mérite à elle-seule la découverte de cette comédie folle furieuse.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*