Mission : Impossible – Fallout : Tom Cruise sans limites

À l’ère des films d’action sans saveur produits à la pelle, il est bon de se prendre des claques de cinéma. Des claques de plus en plus rares tant le cinéma américain grand public se fait de plus en plus désincarné, emballé à la va-vite, brassant des millions pour des résultats inégaux. Constante depuis ses débuts (en dépit d’opus 2 et 3 un poil plus faibles), la saga Mission : Impossible s’est rapidement imposée comme la série de films d’action la plus marquante de ces dernières années. Reconnaissables entre tous avec ses gimmicks, ses cascades incroyables, ses scénarios tortueux et ses morceaux de bravoure, les films Mission : Impossible ont toujours su allier grand spectacle et qualité avec à chaque opus l’envie de proposer au spectateur quelque chose d’encore plus fort.

D’où l’enthousiasme devant Fallout, sixième film de la saga dont on parle depuis déjà des mois entre la course-poursuite tournée à Paris, la blessure de Tom Cruise et la moustache d’Henry Cavill. Seul réalisateur à être aux commandes de deux films Mission : Impossible, Christopher McQuarrie, déjà responsable de l’excellent Rogue Nation en 2015, reprend les rênes pour une aventure toujours portée sur le spectaculaire mais avec un ton résolument plus sombre.

Décidé à donner du liant à la saga, McQuarrie s’autorise quelques références et marque avec cet opus une véritable réunion de camarades plus ou moins anciens : Ving Rhames, Simon Pegg, Rebecca Ferguson, Michelle Monaghan. Seul Jeremy Renner, déjà un peu en retrait dans Rogue Nation, est le grand absent du film car même Sean Harris et Alec Baldwin sont de la partie aux côtés des nouveaux venus Henry Cavill et Angela Bassett. Cette multiplication des personnages permet d’offrir à cet opus une portée émotionnelle absente des précédents films. McQuarrie confirme alors le virage abordé dans Rogue Nation et la saga se fait moins volontairement ludique, optant pour un ton résolument dramatique, parfois pessimiste. Ethan Hunt y apparaît plus fragile que jamais, émotionnellement tiraillé par ses décisions, incapable de supporter l’idée de perdre un de ses camarades même pour sauver des milliers de vie. Tom Cruise apporte alors une profondeur bienvenue à son personnage à mesure que les enjeux du récit se font carrément dramatiques.

Sur le papier, la recette de Fallout est similaire à celle des autres films de la saga : menace à grande échelle (nucléaire), course contre la montre, scénario à tiroirs basé sur quelques twists à base de masques, cascades incroyables… Les gimmicks de Mission : Impossible sont les mêmes et on trouve ici de tout : course-poursuite à moto dans Paris, course-poursuite à pied sur les toits de Londres, course-poursuite dans les airs (avec un hélicoptère cette fois), escalade à mains nues et combats au corps à corps brutaux. Sans rien offrir de neuf, Christopher McQuarrie confirme son intelligence du genre, conscient qu’il ne peut le renouveler mais ambitieux de faire plaisir au spectateur. Cela sert aussi l’ego de Tom Cruise, l’acteur assurant la plupart de ses cascades lui-même et faisant en sorte que cela se voit bien à la mise en scène. Comédien impliqué au professionnalisme incroyable, Tom Cruise porte Mission : Impossible avec un charisme de fou, semblant ne pas se laisser atteindre par les années qui passent.

Le résultat est alors sans appel : Fallout est clairement le blockbuster de l’année, renvoyant tous ses petits copains en maternelle. En dehors de quelques ficelles un brin prévisibles, le film s’impose comme un fleuron du cinéma d’action au rythme effréné, couplé à une écriture intelligente, sachant ménager quelques beaux moments à ses personnages notamment du côté de Luther et d’Ilsa Faust, seule membre féminin de l’équipe d’Ethan à avoir les honneurs de faire deux missions avec lui.

Plus long des films de la saga avec une durée de 2h30, Fallout prouve l’inventivité constante de la série, variant autour des mêmes gimmicks sans pour autant les user et lasser. Faisant preuve d’une maîtrise incroyable de sa mise en scène et de son découpage, Christopher McQuarrie aligne morceau de bravoure sur morceau de bravoure. Arrivant au milieu du récit, la course-poursuite parisienne tant teasée laisse tellement sans voix qu’on craint que la pression ne retombe. C’est sans compter sur l’hallucinant climax pour remettre les choses en place, imposer un côté bigger & louder redoutablement efficace, faisant de Fallout l’opus le plus réussi de la saga, celui condensant le mieux son esprit tout en le faisant évoluer vers d’autres strates. A ce train-là, ça commence à être difficile de faire mieux pour un septième film éventuel…