Mortal Kombat : Round 1, Fight !

Nous sommes au milieu des années 90, berceau de notre enfance. Une époque où la contradiction parentale nous autorise à regarder RoboCop, mais nous interdit absolument de jouer à un jeu violent qui se nomme Mortal Kombat. Le catalogue de Canal + était scruté avec minutie dans le programme télé que notre père achetait assidûment. On ne compte plus le stock de VHS vierges qui attendaient patiemment d’être programmées dans le magnétoscope. Douce époque où la découverte de films étaient un vrai parcours du combattant parfois. Alors, quand une adaptation en film de ce fameux jeu interdit vient pointer le bout de son nez sur le canal crypté, il n’en fallait pas moins pour élaborer une stratégie en bonne et due forme afin de mettre la main sur le précieux graal. Nous ne remercierons jamais assez nos voisins d’avoir été les complices de nos errances de cinéphile lorsque la désapprobation parentale faisait obstacle. C’est ainsi que Mortal Kombat de Paul W.S. Anderson a atterrit fièrement entre nos mains. Et depuis ce jour, et quelques centaines de visionnages plus tard, il aura été impossible pour nous de le voir autrement que par le prisme de nos yeux d’enfant. Vous l’avez compris, il ne s’agira pas d’une critique objective (ce que n’est jamais une critique véritablement), mais bel et bien une déclaration d’amour à cette gaudriole interplanétaire à la bande-originale mythique et au charisme benêt de Christophe « Raiden » Lambert.

Liu Kang, un chinois expert en arts-martiaux, apprend que son jeune frère a été tué au cours d’un combat contre le sorcier Shang Tsung. Ce dernier a promis à son maître Shao Kahn, l’empereur d’Outre-Monde, le contrôle absolu de la Terre pour que le mal et la désolation s’y installent pour l’éternité. Pour y parvenir, il suffit de remporter le Mortal Kombat dix fois de suite, un tournoi titanesque dont le vainqueur des neuf dernières éditions a toujours été le prince Goro, l’homme-dragon à quatre bras du royaume de Shokan. De son côté, afin de protéger la Terre, le seigneur Raiden, dieu du tonnerre et des éclairs, oppose plusieurs valeureux combattants à Shang Tsung. Parmi ceux-ci se trouvent Liu Kang, Johnny Cage, un acteur du cinéma d’action, et le lieutenant Sonya Blade, membre des Forces Spéciales.

Paul W.S. Anderson a désormais la réputation d’être un piètre metteur en scène, c’est un fait reconnu par beaucoup. Souvent comparé à Uwe Boll pour tout le mal qu’il a fait aux adaptations des jeux-vidéos qu’il a réalisé, nous faisons parti du club très fermé de ceux qui ne se cachent pas aimer ses films. Non pas que nous sommes en train de dire que c’est un très grand réalisateur, loin de là, mais il faut lui reconnaître son amour du matériau de base. Adapter Mortal Kombat était risqué. Adapter un jeu de baston est toujours un pari risqué, pour le simple fait qu’on peut difficilement faire tenir une histoire avec le peu d’éléments compris à la source. L’histoire du jeu Mortal Kombat se tient sur un carton à l’écran, et pourtant, Anderson parvient à caractériser les personnages phares, leur donner du corps et en faire un film qui se tient. Allant au-delà de la simple succession de bagarres sans queue ni tête, Mortal Kombat prend son temps pour nous dévoiler ses personnages. On ne peut pas reprocher à Anderson de pas essayer de bien faire. Chacun des héros aura un trait de caractère spécifique, et Anderson brodera autour avec le peu d’éléments à sa disposition. Les costumes sont fidèles au jeu, les pouvoirs et les styles de combat également…que fallait-il de plus pour convaincre ? De plus, là où le film se détache amplement d’une atrocité à la Dead or Alive ou Tekken, c’est qu’il n’essaie jamais de prétendre à autre chose. Mortal Kombat est un film qui parle d’un tournoi mortel, point ! Pas de sous-intrigue, pas de fioritures. On présente les héros et les antagonistes, on leur brode une quête, et on les fait se taper sur la tronche ! Parce que c’est l’essence même de Mortal Kombat : se savater sévèrement à mort. Tous les éléments iconiques du jeu sont au rendez-vous. A quoi s’attendaient les spectateurs de l’époque ? Tout est réunit pour plaire au public à qui le film se destine. Que c’est fun !

Alors, oui, il serait facile de taper sur Christophe Lambert qui cabotine comme un fou. Il serait facile d’évoquer le manque de charisme de certains personnages. Il serait facile de critiquer la mise en scène peu inspirée lors des phases de combat. Il serait facile de pleurer l’absence de Van Damme (qui a été l’inspiration des créateurs du jeu pour le personnage de Johnny Cage) qui lui a préféré le script de Street Fighter. Tout comme il serait facile de pleurer également l’absence de Cameron Diaz initialement prévue pour incarner Sonya. Et tout un tas d’autres défauts inhérents au projet, mais le constat demeure toujours le même après plus de 25 ans d’existence : Mortal Kombat est un film redoutablement divertissant. Sa générosité abondante pour lui parfaire un univers cohérent où coexistent des humains et des êtres surnaturels et toute la sincérité pour délivrer un film qui réunira les fans du jeu en font un film doudou, un film réconfortant, un film qu’on ne peut pas ne pas aimer. D’autant qu’il s’agit du second long-métrage de Paul W.S. Anderson et qu’il avait encore tout à prouver. Il ne s’enferme pas dans ses éternels tics de mise en scène et choisit de mettre à profit la solidité de ses personnages plutôt que d’essayer d’amener le film ailleurs. Mortal Kombat a tout compris de l’essence du matériau originel. On se tape à mort, on hurle « flawless victory », on jubile et c’est bien la seule et unique chose que l’on vient chercher chez lui. On pourrait lui reprocher un manque de générosité au niveau du sanglant, car la réputation du jeu s’est faite également à cause de son côté archi violent et gore. L’aspect propret du film est possiblement le seul défaut du film pour lequel nous serions d’accord d’admettre qu’il loupe le coche. Mais, une fois encore, le film fonctionne sur son public cible, et pas sûr qu’un R-Rated lui aurait desservit à l’époque. La jeune génération qui découvrait le jeu n’aurait pas pu se rendre en salle, et le film aurait fait un véritable four. De fait, on ne peut que congratuler l’intelligence d’Anderson d’avoir étayé et ménagé ses effets.

Mortal Kombat est un film intemporel. Le genre de série B nanardesque qu’on adore revoir en boucle car elle titille notre innocence enfantine. Peu importe ce qu’on peut en dire : la bande-originale aura traversé les générations, les personnages étaient iconiques et Paul W.S. Anderson obtenait son ticket d’entrée comme entertainer sur lequel on pouvait compter. Et la suite de sa carrière n’aura de cesse de nous convaincre. De Event Horizon à Pompéi, en passant par Resident Evil et Alien vs Predator, il demeure parmi ces réalisateurs détestés par le plus grand nombre pour lequel nous ne cesseront jamais de nourrir une tendresse particulière.

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