Bloodshot : Une violence à la Marvel

Conséquence direct de l’épidémie de Covid-19 qui sévit ces dernières semaines, Bloodshot est de ces films qui n’a pas vu sa sortie en salle reportée. Sorti outre-Atlantique le 13 mars dernier, à peine un week-end avant le confinement et la fermeture des salles américaines, Sony a décidé de mettre le film sur les plate-formes VOD afin de pallier au démarrage catastrophique du film lors de ses premiers jours d’exploitation. Nous aurions dû admirer le premier film de adapté de l’univers Valiant Comics dans nos salles ce mercredi 25 mars. Il n’en sera rien puisque Bloodshot débarque aujourd’hui sur nos plate-formes VOD. Erreur stratégique ou une envie pour Sony de noyer un poisson sur lequel il ne croit pas du tout ? La question demeurera sans réponse. Quoi qu’il en soit, Bloodshot est adapté du comics éponyme créé par Kevin Van Hook, Don Perlin et Bob Layton. Premier long-métrage réalisé par David « Dave » Wilson, à qui l’on devait un épisode dans la première saison de la série Love, Death & Robots, il met en scène Vin Diesel qui essaie depuis des années de se faire une incursion dans l’univers des super-héros au cinéma. En dépit de son doublage sur Groot dans Les Gardiens de la Galaxie, ses demandes ont toujours été vaines lui qui, à sa manière, avait déjà interprété un super-héros d’un autre genre en la personne de Riddick.

Ray Garrison est un soldat tué en mission et ramené à la vie par RST Corporations, l’entreprise qui l’a transformé en super-humain. Des nanotechnologies coulent désormais dans ses veines, ce qui le rend invincible. Il est plus fort que jamais et capable de guérir instantanément de ses blessures. Mais RST ne contrôle pas que son corps. Ils ont également la main sur son esprit et ses souvenirs. Ray ne peut distinguer ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Sa mission est désormais de le découvrir.

Actuellement décliné en 6 tomes (un septième a été annoncé en 2019), Bloodshot est un concentré de tout ce qui a fait la pop-culture ces quarante dernières années. Imaginez un enfant bâtard issu d’une gigantesque fusion entre RoboCop, Terminator, Spider-Man, X-Men et autres Universal Soldier et vous aurez une petite idée de ce à quoi peut ressembler l’univers du comics. Il n’en fallait pas moins pour que Sony sente le filon et mette en chantier une adaptation au cinéma. Bloodshot est un film d’action classique, aux enjeux téléphonés, mais redoutablement efficace. Calibré pour un public de niche très orienté adolescent et consommateur de jeux-vidéos dans l’idéal, ce n’est pas un hasard s’il a été confié à Dave Wilson. Il s’est fait connaître en tant que réalisateur de bandes-annonces pour de gros titres du monde du jeu-vidéo. On lui doit notamment les bandes-annonces de Mass Effect 2, Star Wars : The Old Republic, BioShock : Infinite ou encore Elder Scrolls Online. Des jeux qui répondent à des codes précis que l’on retrouve dans son premier long-métrage ici. Dave Wilson occupe les espaces comme dans un jeu. Il colle son héros au plus près comme si le spectateur était acteur des actions qui s’y passent. Le découpage technique des séquences musclées ressemblent aux cinématiques qui parsèment nos jeux d’action préférés. Pour sûr que le film ravira tous les gamers. Malheureusement, son envie de plaire à un public plus familial l’empêchera d’aller au bout de son sujet. Il y a des séquences qui feront redoutablement penser à RoboCop, Terminator et Terminator 2. Des séquences qui pourraient verser dans le sanglant sans problème compte-tenu des pouvoirs du héros. Il n’en sera rien. A peine de quoi faire frissonner le petit garçon de 10 ans accompagné de ses parents. On ressent que Sony est désemparé à l’idée d’avoir perdu l’exclusivité sur Spider-Man et que le studio tente de se retrouver une poule aux œufs d’or. Bloodshot n’était pas forcément le bon choix à faire pour succéder à Peter Parker. Pas assez jusqu’au-boutiste pour être une adaptation ultra fidèle et trop sage pour sustenter pleinement l’amateur d’hémoglobine qui pense se retrouver devant un film adulte et à qui l’on sert un ersatz de Deadpool (que nous trouvions un poil trop sage pour ce qu’il est).

Cependant, Bloodshot assure le spectacle le temps que ça dure. On en prend plein les mirettes dans un rythme effréné qui ne s’estompe jamais. Vin Diesel est fidèle à lui-même. On connaît la star et ses exigences capricieuses sur les plateaux de tournage. Bloodshot ne déroge pas à sa réputation. Les plans iconiques qui ont façonné l’image de Vin Diesel sont au rendez-vous. Une fois de plus, il joue un gros dur au cœur tendre qui veut se venger de ceux qui lui ont fait perdre l’être qu’il aime le plus au monde. Archétype du héros invincible, on ne peut lui reprocher de faire tout le temps la même chose puisqu’on sait qu’il excelle dans l’exercice. Et même s’il a pu nous surprendre dans des rôles à contre-courant comme dans le délicieusement drôle Jugez-Moi Coupable de Sidney Lumet, ça reste tout de même dans son registre de gros nounours qui défonce tout qu’on l’aime le plus, on ne va pas se leurrer. Lui qui rêvait d’être le nouvel Arnold Schwarzeneggger et s’est vu piquer la vedette au fil des années par Dwayne Johnson (qui lui a valu d’être évincé de la franchise Fast & Furious), on ne peut pas dire qu’il croule sous la demande. Son ego démesuré aura eu raison du capital sympathie qu’Hollywood avait de lui. Quoi qu’il en soit, il nous revient en pleine forme et assure parfaitement le job dans les pompes du soldat Garrison. En face de lui, on se congratulera de retrouver Guy Pearce dans un rôle de manipulateur qui lui sied bien. L’acteur semble s’amuser comme un petit fou dans un rôle léger. C’est une vraie récréation et il s’en donne à cœur joie. Son machiavélisme est communicatif et devrait plaire aux plus jeunes qui se retrouverons en face du film.

Adaptation assez réussie, Bloodshot est le genre de blockbuster sans prise de tête que l’on aurait adoré aller voir en salle. L’action nerveuse et continue assure un spectacle efficace. On regrettera une violence timorée qui oblige le film à se conformer sur le moule Marvel pour plaire à un public familial. En dépit de quelques plans un peu plus virulents, Bloodshot est un film inoffensif, mais qui a le mérite d’assurer. Vu la catastrophe craint par beaucoup, c’est déjà pas mal. Espérons que son exclusion sur les rangs de la VOD lui permettra d’avoir une petite chance. Ce n’était pas mauvais au point de le jeter aux oubliettes.

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