Le Chant du Loup : Immersion totale sous tension

Fort d’un casting 4 étoiles très éclectique, Le Chant du loup nous raconte l’histoire de Chanteraide, opérateur sonar à bord du sous-marin nucléaire d’attaque Le Titane, durant une mission particulièrement délicate. « Oreille d’or » du bâtiment, il a une capacité hors pair à distinguer les différents sons via sonar. La mission qu’il effectue l’amène sur des sentiers tourmentés où ses vies sentimentales et professionnelles ne feront que se chevaucher par leur incompatibilité.

D’Orsi (Omar Sy) et Grandchamp (Reda Kateb) rendant des comptes à leur supérieur

Scénario pleinement original, Le Chant du loup sonne comme une véritable tragédie shakespearienne, à noter en plus de cela que le film est construit en 3 actes. On y suit diverses intrigues qui évoluent et amènent les personnages vers des chemins tortueux qu’ils n’auraient pas cru se réaliser un jour. Les menant vers une rivalité et une opposition effroyable, il s’agit là d’un parfait film d’amour et d’amitié sur fond de guerre. Sur bien des aspects, le film n’est pas sans nous rappeler l’histoire de Stanislas Petrov, un militaire Russe ayant permis au monde d’éviter son anéantissement nucléaire.

Le Chant du Loup est un film supplémentaire venant tacler les médisants sur le cinéma français. On peut le dire sans trembler des genoux, ces derniers temps, le cinéma français à la fois sérieux et grand public nous gratifie d’une qualité très appréciable (Le Grand Bain, Première Année, L’Intervention). De quoi redonner un large crédit à nos productions hexagonales. Et quel crédit lorsqu’il s’agit du premier film du réalisateur, Antonin Baudry. S’étant fait connaître il y a maintenant quelques années avec le scénario de Quai d’Orsay, le réalisateur n’avait pas su à l’époque saisir l’opportunité et nous avait pourvu d’un scénario bancal et trop superficiel d’une adaptation de sa propre bande dessinée. Cette dernière étant déjà plus intéressante cela dit. Aujourd’hui, nous le retrouvons sur un film de guerre en sous-marin d’une qualité proche de celle de grands cinéastes. La mise en scène est soignée et particulièrement grandiose, avec des effets spéciaux et des décors réalistes, à l’image de Kursk. L’immersion est totale, dans tous les sens du terme. On y croit, on se sent aux côtés de ces militaires réalisant une mission d’exfiltration tendue où la moindre hésitation, la moindre décision erronée peut coûter la vie à des centaines d’hommes. Au cœur de cette tension, les enjeux, bien que très exagérés semblent cependant cohérents et probables. Tout part d’un postulat de base très simple, un scénario catastrophe par excellence tenant du génie tant ses tenants et ses aboutissants ont des répercussions sur un état moral humain et une géopolitique mondiale sous tension. Comme si la guerre froide n’était pas encore terminée. Un scénario plus que complet qui aborde de nombreuses thématiques par le biais de la hiérarchie et de l’affection de ses personnages.

Le Chant du Loup : Les mariniers en pleine concentration de décryptage du sonar

Dans toute cette aventure, ce qui est particulièrement passionnant c’est la force sentimentale infaillible que cette équipe a su créer et nouer entre eux. Ce sont des soldats pourtant entraînés à prendre des décisions pour servir leur pays, mais l’amitié qui les lie les pousse à remettre en doute une partie de leur code d’honneur. Les plus belles amitiés font souvent les plus belles histoires et l’évolution de la leur dans le film est particulièrement dure et poignante. Par extension d’une histoire d’amitié, il y a évidemment une histoire d’amour qui, malheureusement, fait un peu trop contraste dans le ce long-métrage. Si le lien qui unit les militaires est bien développé et ponctué de dialogues forts et inspirants, il en est tout autre de la liaison entre Chanteraide et Diane. La tendresse et le charme de leur relation fait vraiment contraste avec le sérieux et la discipline de la mission. Les dialogues manquent d’impact et sonnent trop à l’eau de rose pour ne pas les trouver légèrement ridicules par moment.

Le Chant du loup est cependant bien construit narrativement, les scènes s’enchaînent bien et de manière fluide, malgré une pause de tension à la suite du premier acte, celle-ci revient très vite jusqu’à la fin du film. On notera cependant un léger défaut au film qui n’en est un que si l’on s’attarde dessus, il y a une nette différence de jeu. Tous les acteurs jouent bien, mais à leur style. Ainsi on distingue le fond comique d’Omar Sy au travers de sa grande tentative à rester sérieux, le regard singulier de Reda Kateb ne l’aide pas à dévoiler le personnage plutôt protecteur qu’il est et François Civil donne trop l’impression de n’être qu’à moitié investit dans les enjeux qui se déroulent en face de lui. Il en va de même pour Mathieu Kassovitz, exceptionnel derrière la caméra mais un tantinet lent et en manque de conviction lorsqu’il est devant. Il s’agit de 4 acteurs très performant, y compris dans ce film, ayant chacun un style de jeu, une attitude et une prestance trop singulières les uns des autres n’offrant pas une homogénéité de jeu.

Le Chant du Loup : Cérémonie funéraire des mariniers.

La plupart des quelques défauts du film sont totalement masqués par sa qualité intrinsèque. Un excellent film sur un thème peu fréquent au cinéma et encore plus dans le paysage français. Pour un premier film, le réalisateur frappe fort et bien. Une tension quasi constante, des acteurs très convaincant et une histoire bien menée par un scénario quoiqu’un peu exagéré. La conclusion quant à elle atterrit bien loin des standards de l’happy ending pour une dramaturgie complète.

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