Docteur Patch : Thérapie de tous les maux

Tom Shadyac. Pour le commun des mortels, ce nom n’évoque pas grand chose. Pourtant, il est le réalisateur de plusieurs films devant lesquels vous vous êtes forcément retrouvés un jour ou l’autre. Que ce soit Ace Ventura, Le Professeur Foldingue, Bruce Tout Puissant ou encore Menteur, Menteur… Tous ont été réalisés par Tom Shadyac. Ce n’est pas le meilleur réalisateur de comédies qui existe, loin s’en faut. Pourtant, il possède un style reconnaissable entre mille. Il y a une vraie patte Shadyac. Non content de s’être appuyé sur des têtes d’affiche costauds, notre réalisateur a su se parfaire une identité propre…un poil trop propre, mais qui a le don de réunir toute la famille devant ses films. Académique dans la forme, il y a pourtant un film qui sort du lot dans sa filmographie. Thèse globale de tout son savoir-faire, Docteur Patch allie la recherche émotive des œuvres de son auteur par le prisme du rire. Et cette obsession chez lui colle parfaitement à la biographie qu’il met en scène ici.

Au début des années 1970, Hunter « Patch » Adams est un étudiant en médecine surdoué, mais excentrique qui, après une dépression et un séjour volontaire en hôpital psychiatrique, s’est découvert un don pour apporter du réconfort et de l’aide à ses semblables par le biais du rire. Il croit alors avec conviction en une approche révolutionnairement plus humaine et relationnelle de la médecine. Il développe, avec deux collègues étudiants et amis, un foyer humanitaire de soins qui aide des personnes ne trouvant pas le secours recherché auprès de la médecine.

Tom Shadyac trouve, avec Robin Williams, l’alliance parfaite qu’il recherche depuis ses débuts derrière la caméra. Qui d’autre que Robin Williams avait ce pouvoir de faire rire et d’émouvoir en même temps ? Ce rôle du docteur Patch lui était plus que destiné. Parmi la filmographie qualitative du regretté Robin Williams, Docteur Patch n’est pourtant pas celui que l’on retient toujours en premier. Difficile de rivaliser avec Hook, Madame Doubtfire, Jumanji ou encore Le Cercle des Poètes Disparus. Cependant, Williams n’a jamais été aussi touchant que dans Docteur Patch, même si ça se discute. Ce qui nous permet d’affirmer cela, nous oblige à évoquer la fin tragique de l’acteur. Retrouvé pendu à l’âge de 63 ans, la disparition de Robin Williams aura bouleversé le cœur des gens qui auront grandi avec ses films. Il représentait le gendre idéal, le bon ami, l’éternel enfant avec lequel rire devenait le remède à tous les maux…sauf les siens, malheureusement. Williams a toujours été un homme profondément dépressif. Et ce n’est pas anodin si le personnage de Patch lui colle à la peau. Docteur Patch s’ouvre sur l’internement volontaire de ce dernier. Il est en pleine recherche identitaire. Il aimerait offrir quelque chose au monde, mais ne sait pas comment y arriver. Son remède, il le trouvera dans la nature humaine. Doté d’une intelligence spectaculaire, il va bouleverser les institutions médicales et offrir son aide aux plus démunis. Docteur Patch ne traite jamais du système de santé américain, bien qu’il l’évoque à de multiples reprises. Un système de santé bancal où si l’on vit dans le besoin, il est presque impossible de s’offrir des soins décents. Patch se moque du statut social de la personne qui vient lui réclamer de l’aide. Sa thérapie est universelle : elle passe par le rire, la bonne humeur et l’écoute. Ce qui rend l’interprétation de Robin Williams authentique réside dans la quête personnelle de l’acteur à soigner ses propres maux. Le rôle de Patch est une aubaine, le moyen pour lui d’exorciser ses démons, sa catharsis ultime. Voilà pourquoi nous affirmions plus haut qu’il tient ici l’un de ses plus beaux rôles. Tom Shadyac déroule sa mise en scène avec aisance tant Williams domine tous les plans. Il n’a qu’à capter toutes les infimes émotions qui se jouent dans le profond regard de son acteur. Quel grand rôle !

On pourrait passer des heures à décortiquer les faits et gestes de Robin Williams dans le film tant il ne tient qu’à son seul talent. Pour autant, il serait malhonnête de ne pas citer la troupe de talents qui l’entoure parmi laquelle Monica Potter, Daniel London et Philip Seymour Hoffman se sentent pousser de belles ailes. Les comédiens sont formidables, Robin Williams leur fait atteindre des sommets. Nous prenons plaisir à suivre les années d’internat des personnages sans jamais décrocher une seule seconde. Le film ne s’embourbe pas des aspects rigoureux inhérents à ce genre d’étude. Il se focalise sur la passion qui anime les internes. Réussir à suggérer autant de rigueur par la recherche émotive rend le film absolument délicieux. Docteur Patch fait parti des meilleurs films sur la passion médicale jamais fait parce qu’il gère parfaitement l’émotion qu’il transmet. Le film ne bascule jamais dans le pathos de pacotille. Tout est abordé avec une justesse déconcertante. C’est brillant, absolument brillant.

Docteur Patch se redécouvre dans une sublime édition blu-ray paru récemment chez Elephant Films. C’est un film à (re)découvrir de toute urgence. Un film qui nous fait nous sentir bien, aimer la vie et nos semblables. Un film qui transpire l’immense générosité qu’offrait Robin Williams. L’un de ses plus beaux rôles, assurément.

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