
Capitaines ! est un regroupement de deux courts-métrages d’animation français distribué en salles par les Films du Préau. Les films font chacun 26 minutes pour une durée totale de 52 minutes et partagent une thématique similaire : celle de trouver sa place quand on est une jeune fille. Pour cela, nos deux héroïnes de neuf ans vont passer par une activité propre au titre de cette mini-anthologie : la première découvrira le bateau à voile tandis que l’autre s’imaginera en pilote de fusée spatiale. En quelque sorte, elles vont apprendre à devenir les capitaines de leur vie d’enfant, dans ce moment où la transition avec l’adolescence commence à s’amorcer. Avec légèreté, finesse et poésie, les créateurs et créatrices de ces films nous immergent dans les problématiques de ces jeunes filles pour mieux sublimer leur personnalité, leur envie d’émancipation et d’intégration.
Moules-Frites de Nicolas Hu
Synopsis : Noée, une fille de 9 ans, vient rejoindre sa mère installée depuis peu sur une île bretonne où elle a trouvé un emploi de serveuse dans un restaurant. Quand elle arrive, Noée découvre que tous les enfants de l’île se connaissent depuis toujours, qu’ils ont une vie plutôt facile et qu’ils font tous de la voile. Et ça, ça l’attire, Noée ! Sauf que sa mère n’a pas les moyens de l’inscrire au club de voile…
Moules-Frites, c’est le surnom que Gabin, jeune garçon en manque d’attention, donne à Noée pour se moquer d’elle. Attristée sans être dévastée, Noée ne répondra jamais aux provocations de son camarade, bien plus obsédée par son envie de faire de la voile comme tous les enfants de l’île dans laquelle elle vient d’emménager. Ce surnom, elle finira par fièrement le porter à la fin du film avec un costume à son effigie et ainsi gagner le respect des autres jeunes de son âge. Mais pour cela, elle devra se battre pour participer à la course puisqu’elle n’a pas les moyens de payer ses cours de voile ou encore sa participation à la course. Heureusement, son chemin rencontrera celui d’une grande voileuse qui a tout à lui apprendre, sans avoir forcément envie de le faire. Il est toujours bon de montrer le quotidien de gens qui n’ont rien, de ceux qu’on ne voit plus sur nos écrans, trop souvent accaparés par l’insipide vie de célébrités sans envergure. Ici, Noée doit se battre pour accéder à sa passion. Cette barrière pourrait en décourager plus d’un et beaucoup l’auraient été dans la vraie vie, mais pas Noée. Heureusement, la communauté de proches qu’elle s’est formée pendant son entrainement lui permettra d’arriver à ses fins. La bienveillance avec laquelle les situations problématiques sont résolues est particulièrement reposante.

Les Astres immobiles de Noémi Gruner et Séléna Picque
Synopsis : Chenghua a 9 ans et doit préparer un exposé sur l’espace avec son meilleur ami. Elle ne parvient pas à trouver le temps nécessaire puisqu’elle est sans cesse sollicitée par ses parents comme traductrice. Ces derniers ne parlent pas français et sont dépendants de leur enfant, ils ne se rendent plus compte du poids qu’ils font peser sur elle. Chenghua va chercher à s’émanciper de sa famille et son envie d’espace et son enthousiasme naturel l’aideront à franchir le pas.
La barrière dans l’intégration de Chenghua est bien différente que celle de Noée, puisqu’il s’agit de celle de la langue. La jeune fille doit servir de traductrice pour de nombreuses taches du quotidien (lecture de contrat, rendez-vous avec un technicien pour installer une box internet…) au détriment d’un exposé qui lui tient à cœur avec son meilleur ami, lui aussi petit-fils d’émigré. Chenghua doit alors apprendre à parler de sa situation aux autres et ne pas garder son malaise pour elle. Car, pour que son ami et sa professeure la comprennent, elle doit se confier. La communication, thème principal du film, est instillé dans tous les choix narratifs visuels opérés par les réalisatrices. Les dialogues en chinois entre Chenghua et ses parents ne sont pas traduits, forçant le spectateur à se sentir extérieur et comprendre ce que doivent ressentir les parents au quotidien dans un monde où ils ne peuvent être compris. Pas complètement bilingue en chinois, cette seconde héroïne a elle-même du mal à communiquer avec ses parents. Une magnifique scène vient imager cette difficulté. Lorsqu’elle essaye d’expliquer sa passion pour l’espace et Thomas Pesquet, les mots maladroits de Chenghua se transforment en desseins que ses parents ont du mal à déchiffrer, mais qu’ils finissent par accepter avec joie. L’espace n’est finalement qu’un champ onirique dans lequel Chenghua peut s’échapper quelques instants à l’intérieur de la fusée bricolée qu’elle s’est construite dans le jardin. La dernière partie du film nous met d’ailleurs dans la peau de la mère à la recherche de sa fille, obligée d’utiliser un logiciel de traduction automatique pour la retrouver, et, à termes, dégager le poids qu’elle fait porter à son enfant.

Capitaines ! est donc une petite gourmandise pour les enfants et les plus grands qu’il est bon de découvrir sur grand écran.
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