Alibi.com 2 : L’arrosoir de l’arroseur arrosé

Souvenez-vous de combien nous avions fustigé Super-Héros Malgré Lui. Souvenez-vous de combien nous avions constaté la douloureuse descente d’organes de l’humour de la bande à Fifi qui ne parvenait plus à faire rire que par de l’humour vulgaire et bas du front. Souvenez-vous également de combien nous étions clients des premières réalisations du bonhomme. Lorsque nous vous parlions de son dernier film, nous avions conclu en invoquant l’incident de parcours. Philippe Lacheau n’est jamais aussi hilarant que lorsqu’il s’applique à faire du slapstick qui tâche, en flirtant avec le vulgaire sans jamais y céder facilement. Ses détracteurs diront qu’il a toujours été vulgaire et est inexcusable. Nous aimons à croire qu’il est bien plus malin qu’il n’y paraît et qu’il connaît parfaitement ses classiques. Quand survient Alibi.com 2 dans nos salles, nous sommes partagés entre l’envie de renouer avec des personnages que nous avons aimé et avec lesquels nous avons ri de bon cœur et l’envie de ne pas céder à la tentation tant le souvenir douloureux du film précédent était encore trop frais. Nous avons donc patienté jusqu’à la sortie vidéo afin de nous laisser un peu plus de temps de digestion. Sommes-nous réconciliés avec la bande à Fifi ?

Après avoir fermé son agence Alibi.com et promis à Flo qu’il ne lui mentirait plus jamais, la nouvelle vie de Greg est devenue tranquille. Mais lorsqu’il décide de demander Flo en mariage, Greg est au pied du mur et doit se résoudre à présenter sa famille. Seulement, entre son père escroc et sa mère ex-actrice de films de charme, ça risque fort de ruiner sa future union. Il n’a donc pas d’autres choix que de rouvrir son agence avec ses anciens complices pour un ultime alibi.

Vous avez aimé Alibi.com ? Vous adorerez inévitablement sa suite. Philippe Lacheau revient à ce qu’il sait faire de mieux : de l’humour corrosif, des gags slapsticks dans tous les sens et un rythme qui bat son plein sans jamais décroître. Lacheau est un amoureux inconditionnel de la comédie. Ses classiques, il les connaît sur le bout des doigts. Une grosse dose d’héritage de la troupe du Splendid, un pincée des Nuls et une bonne louche des ZAZ et vous obtenez ce que la bande à Fifi sait faire de mieux : nous faire rire de bon cœur. Alibi.com 2 possède cette aura particulière, à savoir qu’il montre un véritable amour pour ses personnages. A l’instar des deux films Babysitting, Lacheau démontre une vraie tendresse pour les personnages qu’il a créé. Tout comme pour Babysitting 2, il pousse les potards plus loin dans l’absurde, car ses héros ne peuvent s’épanouir autrement que dans des situations incongrues. Non content de faire jouer des grands noms comme Jugnot, Bourdon ou Baye, il y a, avant tout, comme un aveu d’enfant à peine dissimulé. Lacheau a grandi en regardant leurs films, Lacheau leur témoigne une réelle admiration. Il y a un passage de flambeau évident entre les générations auquel Lacheau tient énormément. C’est avec ce témoignage qui parsème la plupart de ses films que Lacheau nous semble le plus sincère et épanoui. On ne peut pas lui reprocher d’essayer autre chose, mais, une fois encore, Super-Héros Malgré Lui était une sortie de route pour laquelle il n’avait pas les bonnes clés en main. Alibi.com 2 témoigne donc d’une sorte de remise en question, comme si le réalisateur répétait une formule qu’il connaît par cœur pour se rassurer qu’il est bien légitime. Certains crieront à la fainéantise, d’autres dénonceront un manque probant d’originalité. Nous préférons y voir un regard avisé sur son propre cinéma. Qu’on adhère ou pas à son humour est une chose, mais reprocher à Lacheau de ne pas réfléchir à la recette qui fait une bonne comédie populaire serait une injustice.

On ne peut pas retirer à Philippe Lacheau le fait de savoir insuffler du rythme et de savoir s’y tenir. Comme toujours, le réalisateur nous concocte une avalanche de gags. C’est bien simple, il doit y avoir un gag toutes les 3 minutes. Certains ne font pas toujours mouche, certains sentent le réchauffé, mais grand dieu que le film se montre généreux pour nos zygomatiques. Alibi.com 2 est à l’image des comédies populaires qui pullulaient du temps du Splendid : des personnages caricaturaux, des gags comme s’il en pleuvait, un rythme indéboulonnable et une vraie envie de partager une dose de bonne humeur. Une fois encore, Lacheau s’appuie énormément sur le soutien des acteurs qu’il admire. Sans pour autant parler d’illégitimité vu qu’il n’est plus à son coup d’essai, il ne serait pas étonnant qu’il souffre d’une sorte de syndrome de l’imposteur. Au regard de sa filmographie, cela fait sens. Jusqu’à maintenant, il n’a proposé quasiment que des projets sur lesquels il cherchait l’approbation de ses pères en faisant jouer des acteurs comme Didier Bourdon ou Gérard Jugnot. La seule fois où il s’est essayé à l’exercice sans cet atout, il s’est lamentablement ramassé à coup de vannes franchement douteuses (oui, oui, on exècre Super-Héros Malgré Lui). Pourtant, ce n’est pas faute de lui allouer un certain talent pour savoir écrire des personnages simplets, mais jamais simplistes, et les porter à bout de bras. Il aime profondément ses personnages. De la confiance qu’il porte à ses acolytes en résulte souvent des scènes qui font mouche puisque la fluidité des échanges est toujours à son paroxysme. Les comédiens de la bande à Fifi se connaissent par cœur et savent pertinemment comment conjuguer leur talent pour faire corps. C’est une évidence qui transpire de toute part, et particulièrement pour Alibi.com 2 qui atteint le summum des capacités de la bande dans ce contexte-ci. Ne leur reste plus qu’à parvenir à s’extraire de ce modèle pour aller côtoyer d’autres cimes afin de prouver définitivement à leurs détracteurs qu’ils sont parfaitement légitimes et comptent pour beaucoup comme l’une des relèves de la comédie populaire actuelle.

Oui, nous avons retrouvé la bande à Fifi que nous adorons, oui nous n’avons pas boudé notre plaisir. S’il n’a rien d’extraordinaire ou de neuf, Alibi.com 2 témoigne d’une vraie envie d’offrir une continuité à des personnages que le réalisateur affectionne. On rit de bon cœur, mais surtout on se congratule ne pas voir Lacheau se rabaisser de nouveau à des blagues vulgaires et homophobes qui entachaient sérieusement son film précédent. Ne lui reste plus qu’à parvenir à s’émanciper de ses pères une bonne fois pour toute et prouver aux yeux de tous qu’il est bel et bien capable d’offrir une comédie solide sans devoir aller chercher les talents qui l’ont fait rêver étant gamin. Allez Fifi, on compte sur toi !

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