Les Bonnes Étoiles : Et les planètes ne s’alignent pas.

Hirokazu Kore-eda s’est fait une sacrée réputation dans le milieu cinéphilique. Aujourd’hui, son nom est souvent gage de qualité. Lui qui avait ému Spielberg avec son film Tel père, tel fils à Cannes en 2013, le cinéaste japonais a su très largement conquérir le cœur de ses spectateurs au fil des ans, et étendre son auditoire bien au-delà des frontières du pays du soleil levant. Son aura s’étend également à la réalisation de longs-métrages en dehors de ses propres contrées. En effet, Les Bonnes Étoiles s’avère être sa seconde production en dehors du Japon, après le film franco-japonais La Vérité. Ce film naît d’une volonté du réalisateur de travailler avec quelques grands noms sud-coréens qu’il apprécie et qu’il a pu rencontrer par le passé dans divers festivals. C’est ainsi que nous pouvons retrouver Song Kang-ho, Bae Doo-na, Gang Dong-won, Lee Joo-young et enfin IU (Lee Ji-eun), chanteuse star de K-Pop. Pour nous autres, occidentaux, il y a des chances que tous ces noms ne nous parlent pas ou peu, mais il s’agit en réalité d’un casting 4 étoiles pour un film coréen.

Comme à son habitude, Hirokazu continue d’explorer ses thématiques phares, d’interroger certains vices de société dans les cultures japonaises et sud-coréennes. Toujours relatif à l’enfance, la famille et les relations fraternelles, décortiquer la psyché humaine et ses dérives, bonnes ou mauvaises, représente jusqu’alors la quintessence de son univers. Dans Les Bonnes Étoiles, il s’agit de deux amis qui récupèrent les nouveaux nés abandonnés et en font leur trafic à destination de familles d’accueil ou centres d’éducation souhaitant offrir une seconde famille à des enfants malchanceux. Ils assistent donc à l’abandon d’un bébé par sa mère et semblent bien décidés à lui trouver un nouveau foyer pour le chérir. Regrettant son geste, la jeune mère tente le tout pour le tout pour récupérer son enfant. Par la force des choses, elle se retrouve à accompagner ces deux hommes dans un road trip insolite, rempli d’amour et de bonne volonté. Dans le même temps cependant, cette pratique illégale a attiré le regard d’une enquêtrice de la police, lancée sur la piste de ces deux hommes et de leur trafic infernal.

Ici, on explore totalement la question existentielle de la légitimité à faire des choses interdites pour le bien commun ou la nécessité de suivre sans état d’âme les règles et rester coûte que coûte dans le droit chemin. C’est assez impressionnant de voir qu’une thématique paraît à ce point tenir à son réalisateur, qu’il parvient sans cesse à renouveler son sujet et creuser des pistes de plus en plus invraisemblables et marquantes. Sous couvert d’une pratique illégale, le film dégage une positivité et un amour de la vie particulièrement aiguisés. En faisant intervenir la police, on place au centre de l’intrigue la problématique de l’illégalité. Les protagonistes ont pourtant tout sauf un mauvais fond. Ils détournent le système et ses vices dans un but plutôt noble, mais discutable. Toutefois, Hirokazu Kore-eda n’a jamais eu cette réputation de réalisateur clivant ou provocateur. Au contraire, on le connait pour sa profonde empathie pour des injustices humaines.

Malheureusement, au milieu de toute cette bienveillance, la sauce ne prend jamais vraiment. Si l’histoire est belle et le contexte intrigant, la narration laisse un sentiment d’inachevé. On s’ennuie, on peine à se sentir investi dans cette histoire. Si le sort des protagonistes nous intrigue et que l’on souhaite connaître leur destination, le spectateur reste sur sa faim. Jamais on ne quitte totalement l’expectative de ce qui se déroule au profit de la satisfaction de voir les enjeux se conclure. Les Bonnes Étoiles dure longtemps pour ce qu’il raconte finalement et même si les acteurs excellent dans leur rôle, ce sont leurs personnages qui ne sont pas aussi stimulants ou intéressant à suivre.

En définitive, malgré une histoire au demeurant intéressante, sa narration pêche un peu. La réflexion derrière ce scénario reste passionnant, mais sa durée n’aide pas à s’investir dans l’histoire. Difficile d’y trouver son compte et on passe un peu à côté de cette aventure invraisemblable. Après certains de ses précédents longs-métrages poignants, Les Bonnes Étoiles apparaît moins impactant, moins saisissant et plus oubliable. On espère vainement être touché comme on le fut pour Tel père, Tel fils. La tentative est belle cependant et l’exploration de ce concept demeure vraiment utile. Hirokazu reste dans nos cœurs avec un léger faux pas, nous attendrons la suite des évènements avec beaucoup d’attention.

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