Tiny Cinema : Peut-on encore rire de tout ?

Nous avons découvert Tyler Cornack il y a quelques mois à l’occasion de la sortie de Butt Boy sur Shadowz. Nous vous renvoyons vers la longue chronique que nous lui avions consacré à l’époque pour plus de détails, mais sachez que nous avions lourdement adhéré à l’univers du bonhomme. Par le prisme d’un sujet graveleux (un serial killer qui inhale ses victimes par l’anus), Cornack délivrait un film inspiré par tout un pan du cinéma américain allant de John Carpenter à David Lynch. Butt Boy est une belle manière de montrer que l’on peut mettre en scène avec panache la plus salace des vannes. Shadowz ne s’était pas trompé sur son choix et voilà pourquoi nous n’avons pas hésité à nous ruer sur la dernière production du bonhomme. Tiny Cinema est un film à sketches qui prolonge la série éponyme créée en 2016 par Cornack. Le but de la série est d’aligner des histoires courtes, loufoques et politiquement incorrectes. Le film se vit ainsi comme une sorte de compilation, le moyen de rester 90 minutes devant un long programme sans avoir à switcher éternellement entre les épisodes. Bien évidemment, comme n’importe quel film à sketches, Tiny Cinema est inégal entre ses histoires. Certaines sont plus intéressantes que d’autres, mais il y a tout de même largement de quoi passer une bonne soirée entre potes à se fendre la poire devant toutes les excentricités que se permet le film. Installez-vous confortablement dans votre canapé, Shadowz nous a déniché une nouvelle exclusivité qui vaut son pesant d’or.

Un mystérieux étranger raconte l’histoire tordue d’inconnus apparemment sans lien entre eux, dont les vies vont changer à jamais et de manière incroyable. Voici ce que l’on peut lire à propos du film un peu partout. Difficile de résumer un film à sketches sans trop en dévoiler. Voilà pourquoi il demeure souvent plus facile de se rattacher au fil rouge, en l’occurrence ici, une personne en situation de handicap chargée de connecter les histoires ensemble. Ce que nous pouvons vous dire, c’est que Tiny Cinema se moque allégrement de la bienséance et brise absolument tous les tabous : de l’inceste à la nécrophilie en passant par l’autosexualisation, il y en aura pour tout le monde. Avec un ton résolument décalé, le film est une comédie noire à défaut d’être un film d’horreur en bonne et due forme. Même s’il semble facile de se moquer de sujets qui a trait à certaines formes de déviances sexuelles, n’oubliez pas que vous êtes sous la houlette de Tyler Cornack. Sous ses airs assumés de sale gosse se cache un auteur indéniablement cinéphile qui parvient à lier classicisme de mise en scène avec un état d’esprit punk plus que bienvenu. Le réalisateur convoque ses piliers de Sam Raimi à John Carpenter en passant par Martin Scorsese, Robert Zemeckis ou encore toute la nouvelle scène humoristique apparentée à la clique de Judd Apatow. Tiny Cinema est un concentré de tout ce qui fait vibrer son auteur, saupoudré par toutes les pires vannes salaces qu’il peut avoir avec ses amis. Il n’a que faire de la durée d’une histoire tant qu’il y a une bonne vanne à mettre en scène. On pense notamment au récit avec les mafieux qui ne doit son existence qu’à une simple vanne puérile lancée au sein d’une discussion entre une bande de mâles testostéronés jusqu’à l’os. Le segment ne doit pas dépasser les cinq minutes, et pourtant on y perçoit tellement de cinéma en son sein. Tyler Cornack réussit l’alliance parfaite entre le charisme d’un Martin Scorsese des Affranchis avec la radicalité d’un Nicolas Winding Refn de l’époque Pusher et englobe le tout dans un malaise tiré de l’épilogue de Massacre à la Tronçonneuse 2 avec le grand-père à moitié momifié. Si ce qu’il se passe à l’écran est d’une hallucinante débilité, impossible de ne pas saluer la superbe forme employée afin de nous mettre dans sa poche.

Tiny Cinema est une succession de tableaux plus ou moins réussis. La premier chapitre donne le ton : le spectateur doit abandonner toute logique et tout bon sens. En dépit du fait que l’histoire soit bancale dans le sujet qu’elle tente de traiter (la folie), il faut accepter de se faire prendre par la main afin d’entrer dans ce théâtre des bizarreries. Telle une excursion morbide dans un musée bien particulier, le film aligne les pires anecdotes avec une énergie sans équivoque. Au fil de notre visite, nous sommes confrontés à la solitude d’une femme qui retrouve goût à la vie en trouvant un cadavre abandonné (Swiss Army Man et Nekromantik n’ont qu’à bien se tenir), les problèmes érectiles d’un homme qui n’a plus que ses amis comme unique moyen de connaître l’orgasme, à la rencontre d’un homme avec son « moi » du futur qui lui fait une proposition très indécente afin de sauver le monde d’une proche extinction ou encore le deuil d’une fille qui cherche à retrouver son père décédé dans le cœur/corps des hommes qu’elle rencontre… Un programme riche et vaste duquel nous nous gardons de trop vous dévoiler tous les tenants et aboutissants tant l’imagination perverse de Tyler Cornack semble sans limite. Enfant illégitime de Trey Parker et Matt Stone, Cornack n’en oublie jamais de soigner sa réalisation. Il ne s’agit pas d’être irrévérencieux sans en oublier la beauté de l’art qu’il conçoit. Tiny Cinema jouit d’une réalisation éclectique et clinquante où chaque histoire possède sa propre identité visuelle. Aidé au scénario par ses acolytes de toujours, Ryan Koch et William Morean (respectivement producteur et directeur de la photographie sur Butt Boy), Tyler Cornack prouve définitivement qu’il est un jeune réalisateur inspirant et inspiré. Tiny Cinema donne sérieusement envie de se procurer l’anthologie de 83 épisodes de la série éponyme afin de prolonger le plaisir du film.

Tiny Cinema est une comédie noire teintée d’une horreur irrévérencieuse à vous en faire exploser les zygomatiques. Tyler Cornack est définitivement un auteur à suivre et Shadowz ne s’est pas trompé en le mettant en avant par deux fois cette année. Et même s’il n’est pas exempt de défauts, Tiny Cinema est le genre d’œuvre politiquement incorrecte qui fait sacrément du bien au milieu d’un genre qui ne parvient plus vraiment à s’amuser de ce qu’il est originellement. Tiny Cinema est un revival de cette époque où les séries B étaient légion et ramenaient toute une jeunesse en quête de sensations fortes au sein des drive-in. Tout un pan du cinéma de genre qu’on se congratule de ne pas voir mourir par le biais d’auteurs aussi fous que Tyler Cornack à qui nous adressons un franc et massif merci !

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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