Black Adam : Bien tenté mais c’est quand même mauvais

Toujours en quête d’identité qui pourrait lui faire enfin concurrencer Marvel, DC a souvent donné l’impression d’errer de film en film comme un poulet sans tête, les productions se suivant sans que l’ensemble ne soit vraiment homogène. En résulte un sacré bordel où l’on ne sait plus trop où en est la continuité et où en sont les films (Batgirl annulé après tournage, The Flash maintes fois repoussé, pas aidé par les déboires judiciaires d’Ezra Miller). À l’heure où le cinéaste James Gunn vient d’être nommé pour quatre ans à la tête de DC Studios avec Peter Safran dans le but de donner une direction claire à l’ensemble et au moment où Henry Cavill en tant que Superman fait de nouveau officiellement partie de l’univers après des années d’incertitude, Black Adam est donc la première pièce à un édifice tentant laborieusement de ne pas s’écrouler.

Malheureusement le film, introduisant finalement Dwayne Johnson après des années de teasing en Black Adam, est d’un manque d’inspiration flagrant de son début jusqu’à la fin, pompant encore et encore les poncifs d’un genre de plus en plus éculé. De son prologue ridicule à sa conclusion stupide, Black Adam n’est qu’un produit comme un autre, pensé pour cocher des cases sans jamais secouer le cerveau de son public qui se demandera encore une fois pourquoi il a bien voulu s’infliger ça. Reconnaissons cependant au film son rythme effréné qui ne perd quasiment pas de temps en exposition et c’est assez médusés que nous assistons à deux heures bien bourrines où Black Adam se bastonne à peu près avec tout le monde dans un déversement numérique arrachant les rétines, la mise en scène copiant allègrement Zack Snyder et ses ralentis tandis que le visuel nous rappelle aux bonnes heures (non) de Gods of Egypt.

Le film est laid mais son esthétique et ses effets visuels ont le mérite de se tenir dans une certaine cohérence avec des fonds verts moins visibles que chez Marvel. Cela n’empêche pas Black Adam d’être globalement indigent avec ses dialogues réchauffés, sa caractérisation problématique (Black Adam est un anti-héros tuant ses ennemis mais vu qu’il est joué par Dwayne Johnson et ses deux expressions de sourcils, il est tout de même sympathique) et ses séquences que l’on a toutes déjà vues ailleurs dans d’autres films, et en mieux. Dwayne Johnson oblige, le film est tout entier dédié à son ego de plus en plus énorme (et à une carrière de plus en plus lisse) et son charisme en peine se fait éclipser en cours de métrage, preuve que l’acteur est loin d’être aussi bon qu’il ne veut bien le croire. En effet, après Emily Blunt qui lui volait la vedette dans Jungle Cruise, c’est au tour de Pierce Brosnan – dans un rôle pourtant secondaire – de lui voler la vedette. En Doctor Fate hanté par ses visions du futur, Brosnan offre la seule composition valable du film, l’acteur dévorant l’écran de son charisme à chacune de ses apparitions et le plaisir que l’on a de le revoir avec sa belle barbichette et ses yeux pétillants de charme contribue pour beaucoup à nous faire passer un moment finalement pas si déplaisant malgré toutes les grosses ficelles perpétuellement tirées par le scénario (avec une mention spéciale pour Marwan Kenzari dont la carrière hollywoodienne ne ressemble définitivement à rien).

En dépit des grandes déclarations de Dwayne Johnson affirmant que Black Adam redresserait l’univers DC, force est de constater qu’il y a encore beaucoup de travail à faire et surtout beaucoup d’audace et de créativité pour éviter de nous resservir la même soupe encore et encore qui n’a pas toujours le même goût mais dont la consistance demeure la même : parfaitement écœurante surtout à force d’être ingérée plusieurs fois dans l’année. Espérons que Gunn, dont le Suicide Squad était un pur film de comic book ne sacrifiant jamais l’écriture de ses personnages sur l’autel du divertissement, redressera donc la barre prochainement à la tête de DC Studios, il en est grand temps.

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