Le Dernier Rivage : sous les nuages radioactifs

Le dernier rivage est un film américain réalisé par Stanley Kramer et adapté du roman de Nevil Shute, On the beach, dans lequel l’Australie est l’unique pays survivant d’une guerre nucléaire qui a dévasté le monde. Protégé par des kilomètres d’océan, le continent a été épargné par la pluie de bombes atomiques mais des nuages radioactifs se dirigent vers les derniers survivants. Ce n’est qu’une question de mois avant la disparition totale de l’humanité.

Porté par un casting de haute volée : Ava Gardner, Gregory Peck, Fred Astaire et Anthony Perkins, le film s’attarde sur les derniers instants d’une population condamnée à la mort. Contrairement à beaucoup de productions, y compris les premières du genre « post-apo », comme Panique Année Zéro que Rimini Editions se chargeait déjà de nous faire découvrir, il n’est pas question d’espoir. Une guerre nucléaire totale entraînerait notre mort à tous. Si l’espoir de survivre à une telle catastrophe est autant présent, c’est parce que nous savons l’Homme capable d’initier sa propre destruction. Un besoin de se rassurer face à notre folie.

Quelques mois, c’est tout ce qu’il reste aux habitants pour se réconcilier avec la vie et en profiter. Qu’il s’agisse de rester en famille, gagner une course automobile ou connaître le vrai amour au moins une fois, le réalisateur filme avec justesse et sobriété ces moments intimes. Il n’est pas question d’émeutes, de pillages et autres escarmouches entre survivants, non, Le dernier rivage est une affaire de pensée, que ferions-nous de nos derniers jours, serions-nous prêts à regarder la mort en face ou préfèrerions nous avaler une pilule pour mettre fin à cette interminable attente ? Avec ces questions, on ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec le film de Lars Von Trier, Melancholia.

Dépourvu d’effets spectaculaires, à part peut-être les plans embarqués sur un sous-marin prêté par l’armée australienne, le film de Stanley Kramer colle à ses personnages et prend le temps de nous les faire connaître. Le rythme lent surprend au début, surtout en le comparant à la frénésie des films d’aujourd’hui, mais l’on s’y fait et l’on se souvient que le cinéma d’il y a cinquante, soixante ans, n’était pas si pressé de raconter et conclure une histoire. Malgré ce défaut, surtout lié à des errances de mise en scène qui rallongent la durée du film sans aucune raison, nous nous attachons aux personnages et nous les accompagnons jusqu’au dernier rivage avec une pointe de tristesse. Le personnage de Fred Astaire, à contre-emploi et tout à fait surprenant, est une réussite d’écriture.

Malgré sa patine, ses baisses de rythme et quelques scènes engagées politiquement qui mettent en garde contre notre fascination morbide pour le nucléaire militaire, celles-ci font sourire tant on sent la volonté d’instruire les spectateurs de cette nouvelle menace qui pèse sur le monde, Le Dernier Rivage résonne étrangement avec notre actualité. Le film de Stanley Kramer s’inscrit dans la longue lignée des films post-apocalyptiques à la fois divertissants et porteurs d’un message qui vieillit moins vite que la pellicule. Une histoire à découvrir pour tous ceux qui souhaitent se rendre compte des évolutions et régressions d’un genre cinématographique qui a encore de beaux jours devant lui.

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