Maria Rêve : d’une nouvelle vie

Maria Rêve est le premier long métrage du couple de réalisateurs Lauriane Escaffre & Yvo Muller qui ont remporté le César du Meilleur Court Métrage en 2020 pour leur film Pile Poil déjà avec Grégory Gadebois. Ils retrouvent leur comédien (fétiche ?) pour leur passage au format long en compagnie de Karin Viard dans le rôle principal. Elle incarne la fameuse Maria du titre, femme de ménage, mariée depuis 25 ans, réservée, timide et maladroite qui ne quitte jamais son carnet à fleurs dans lequel elle écrit des poèmes en secret. Lorsqu’elle est affectée à l’École des Beaux-Arts, elle rencontre Hubert, le gardien fantasque de l’école, et découvre un lieu fascinant où règnent la liberté, la créativité et l’audace…
Dans ce monde si nouveau, Maria, qui a toujours été dévouée et discrète, va-t-elle enfin se laisser envahir par la vie ?

Voilà la grande question de ce premier film fort réussi de la part du jeune couple à la réalisation. Nous n’avons pu rattraper Pile Poil, mais Maria Rêve convainc par son approche de personnages à la marge, femme de ménage ou gardien d’école, voire artisan. Et au milieu d’eux virevoltent une bande d’artistes illuminés qui créent des œuvres fantasques et surréalistes. Cette émulsion va perturber cette femme réservée et maladroite supportant son trajet en RER chaque jour pour rejoindre sa petite maison de banlieue. Son mari est en arrêt et ne parle plus à leur fille unique. Ce vieux couple s’engonce dans un quotidien morne. L’effervescence du lieu Les Beaux Arts et sa rencontre avec Naomie (sauvage Noée Abita) va ouvrir les yeux de Maria vers d’autres possibilités. La vie n’est pas que de petits poèmes écrits contre la vitre du RER dans son carnet, mais une émulsion de couleurs et de sensations, de rencontres également notamment avec le gardien taciturne de l’école. 

L’amour après 50 ans est une chose permise qui peut arriver à tout le monde. Maria rêve au loin d’une autre vie. Son mari un brin fainéant commence à l’ennuyer avec ses amis lourdingues et sa brouille avec sa fille qu’elle ne voit plus, donc. Maria est triste et donc rêve, des sentiments qui vont s’animer au contact des élèves. Les étudiants vont lui ouvrir la porte de l’émancipation, de l’acceptation de sa condition de femme et de son corps. Elle est acceptée comme telle nouant une relation forte avec eux qui l’intègre dans leurs processus de création. Elle va se laisser poser nue pour Naomie puis pour des classes entières, libérant également ses collègues femmes de ménage réservées n’ayant jamais osé passer le cap. Puis le nu se fait sous l’oeil amoureux et frétillant de Hubert, massif et doux Grégory Gadebois, qui est ce gardien bourru rêvant lui de sa cabane au Canada. Il n’est jamais sorti de l’école depuis presque toujours. Il s’échappe au contact de la créativité des élèves qui le soudoient de dessins potentiellement cotés selon le parcours futur de l’artiste en question. Alors il les garde précieusement tel un placement financier. Sait-on jamais, il pourra devenir riche avec un seul de ses dessins ?!!

Le coup de foudre entre Maria et Hubert est la fatalité de leurs deux vies. Leurs rêves passent inévitablement par cet amour fort et passionnel qui va leur permettre de s’échapper à tout jamais. Lauriane Escaffre & Yvo Muller peignent deux personnages tendres. La vie les attendait au détour d’une salle de cette école, carrefour de leurs vies, impulsion pour tout reprendre et attraper cette liberté émancipatrice. Si le couple de réalisateurs loupe un peu la folie de l’école malgré des intentions palpables, mais un brin trop tendres au cœur de ce premier essai, il capte parfaitement ce qu’ils connaissent, transmettre d’où ils viennent (une vie modeste) pour croquer un drôle et beau couple de cinéma. Il fallait y penser d’unir Karin Viard (formidable comme toujours ou presque) et ce nounours bienveillant qu’est Grégory Gadebois qui dans chaque rôle ou presque laisse entrevoir sa capacité à être un Obélix culte pour le cinéma. Il est né pour ce rôle, il est le personnage. Il faudra un jour lui offrir pour enfin lui permettre de gagner en popularité publique et permettre à tout le monde de rencontrer ce merveilleux Grégory Gadebois, incroyable également dans le film Chère Léa avec Grégory Montiel.

Maria rêve et nous enthousiasme au cœur de ce charmant film romantique mêlée à un film d’auteurs qui se découvrent pour l’avenir tant ce premier long laisse entrevoir beaucoup de promesses. Tout n’est pas réussi, mais force est de constater que Maria Rêve reste en tête, marquant par une énergie folle et le dessin de personnages forts attachants qui procurent cette envie de se détacher et de s’évader. Maria Rêve est un film d’espoir pour tout le monde. On pense – et on l’espère – que cet essai va permettre à beaucoup de gens de s’émanciper et d’enfin vivre la vie qu’ils méritent et rêvent depuis des années à l’image de cette petite Maria femme de ménage dont le destin va lui ouvrir des portes insoupçonnées pour s’évader vers sa liberté. Magnifique.

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