Tokyo Tribe : Un long clip

Aimer le cinéma, c’est prendre des risques. Parfois l’on sort de sa zone de confort en choisissant un film parce que son affiche ou son titre nous a interpellé et l’on s’installe devant son film dont on ne connait ni le synopsis ni la carrière du réalisateur. Une version de la roulette Russe, évidemment sans danger sauf l’ennui, mais néanmoins excitante parce qu’elle est motivée par la curiosité et la découverte.

Tokyo Tribe est écrit et réalisé par Sion Sono, cinéaste japonais de soixante ans à la carrière impressionnante : une quarantaine de films, trois séries, le tout principalement écrit et réalisé par lui, et une dizaine de récompenses à la Berlinale, Deauville et Sundance entre autres. Cinéaste reconnu internationalement, déjà mis à l’honneur sur Shadowz, Sion Sono arrive tout de même à passer sous le radar des cinéphiles. Heureusement que la volonté de certaines plateformes de streaming n’est pas seulement de produire du contenu mais de faire exister et découvrir le Cinéma.

L’intrigue du film tient sur un ticket de métro : quatre clans s’affrontent pour le contrôle de Tokyo et au milieu de ce beau monde, un trublion prône la paix, l’amour et l’amitié. La même histoire sans nuance du bien contre le mal. Sous sa simplicité apparente, le film aborde les thèmes actuels de la société japonaise et résonne plus largement comme une critique de l’état du monde. Mention spéciale à la fin qui résume de manière (pas si) grotesque le pourquoi du comment.

Au-delà de son intrigue un peu légère et parfois confuse, c’est surtout par sa mise en scène que le film trouve son originalité et surprend. Tokyo Tribe est une comédie musicale hip-hop inspirée par la culture « gangsta-rap » américaine. Du flow des chanteurs, à la gestuelle et aux tenues, tout y passe. A tel point que l’on croirait une parodie, et l’on sourit tout du long de voir défiler les sosies d’Eminem, Lil Wayne et d’autres encore, rappant pour nous narrer leurs mésaventures. Sous ses airs doucement moqueurs, l’association avec l’esthétique japonaise donne un cocktail déroutant et rafraichissant.

Passé l’introduction, surprenant plan séquence qui résume les enjeux du film, on se retrouve happé dans un long clip virevoltant. Mais la frénésie qui anime l’ensemble frôle parfois le « too much », les pauses sont rares pour reprendre son souffle et l’on peine à y voir plus clair dans les sous-intrigues. Malgré cela, nous assistons à une réjouissante battle jusqu’au duel final.

Quelques fois inégal et mollasson lors des scènes de castagne qui auraient mérité un meilleur traitement, le film ne perd pas son intérêt tant le réalisateur sait nous prendre par la main pour qu’on le suive dans son délire. Qu’il s’agisse d’un ventilateur géant conçu pour aspirer et hacher quiconque se trouve piégé, ou d’une vieille dame balançant un son au milieu d’un marché, les inventions d’écriture et de mise en scène se succèdent si vite qu’on en oublie ses errances.

Tokyo Tribe n’est peut-être pas le film le plus représentatif de la filmographie de Sion Sono, mais il témoigne d’un esprit loufoque et délirant, ouvert à toutes les cinéphilies, capable de jouer avec les outils du cinéma pour raconter des histoires originales et mémorables. Une franche découverte qui incite à se plonger dans son univers.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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