Rumba La Vie : Plus belle elle est !

Succès public, mais étrangement critique, Tout le Monde debout marquait en 2018 les débuts derrière la caméra de Franck Dubosc. Que l’on aime ou pas l’acteur, il est vrai que ce premier film a beaucoup de charmes. Une comédie romantique où l’acteur de Camping incarne un charmeur égoïste et misogyne pris dans un quiproquo sur fond de handicap. Le film profite surtout du charme et de la spontanéité d’Alexandra Lamy dans le rôle d’une paraplégique tombant dans le panneau d’un homme trop amoureux pour un mea-culpa. Pour les besoins de Rumba La vie, Franck Dubosc réexploite cette idée de faux semblant s’inscrivant à des cours de danses de salon pour se rapprocher de sa fille. Incarnant Tony, chauffeur de bus moustachu, il essaye de reprendre contacte avec ex-femme et enfant 20 ans après suite un malaise cardiaque.

Ce second long métrage prouve qu’il y a une patte Franck Dubosc. Il n’est pas un grand réalisateur avouant de lui-même s’entourer d’une équipe technique talentueuse. Mais il y a la façon « Dubosc » à peindre les personnages de ses films et ses scénarii. Le comique devenu une valeur sûre du cinéma français assure adorer l’écriture de scénario. À prendre comme une force et un compliment, Franck Dubosc n’écrit pas, mais peint des personnages face à leurs maux. Ses films ressemblent beaucoup à des bandes dessinées franco-belges et ses personnages sont dessinés au crayon gras, parfois caricaturaux, mais toujours bienveillants. Dans Rumba La Vie, Tony est un chauffeur de bus au style country des années 1970 avec sa petite moustache désuète et ses cheveux gominés. Il est un homme adoré par les petits élèves transportés chaque matin à l’école, lequel ils voient la nuque et entendent la voix leur faisant réviser l’anglais à sa façon. On imagine chaque situation dans des cases avec des bulles dont on se délecterait à lire l’été à l’ombre. Cela tombe bien, Rumba la Vie sort en ce mois d’août pour une séance dansante. Certes, ce second essai n’est pas un grand film, il ferait plutôt une excellente bande dessinée à rapprocher du travail de Pascal Rabaté à moindre mesure bien évidemment. 

Rumba La Vie profite de la force de Franck Dubosc à dessiner des personnages entiers. Et il vrai que l’on pense un peu au travail de Pascal Rabaté face à ce film. Prenons l’exemple de Gilles incarné par Jean-Pierre Darroussin. L’acteur, monstre du cinéma français, n’a presque rien à jouer, mais profite des bulles offertes par Dubosc pour exister le temps de quelques séquences. Celle fameuse où il récupère Tony abandonné sur un parking en banlieue ou leurs premiers échanges du film, si intactes et justes peignant un personnage simple, mais authentique. Le reste du casting est du même acabit. Il faut souligner l’apparition bougonneuse d’une Catherine Jacob à la répartie hilarante. Mais Franck Dubosc offre un beau rôle à la révélation du film : Louna Espinosa. Elle a relégué toutes ses concurrentes lors des auditions pour le film. Et à raison tant cette petite brune de vingt ans est un rayon de soleil qui apporte sa lumière et son caractère. Il ne faut pas lui faire, elle qui comprend à la moitié du film la position de cet homme qui se pointe en chaussure à claquette et blouson de cuir à ses cours. Elle reconnaît son père et Franck Dubosc profite de ce basculement à mi-film pour faire évoluer son histoire.
On passe alors à des retrouvailles père-fille. La question du père est importante pour Franck Dubosc, lui qui a eu des rapports taiseux avec le sien. Il faut voir son entretien avec Audrey Crespo-Mara pour Sept à Huit pour mieux comprendre ce film et certains détails disséminés ici et là. La nuque de Tony dans le bus, son style avec sa moustache et son style 70′. On comprend également un peu mieux Patrick de la trilogie Camping, personnage qui ne le quittera jamais, car étant un peu son père. Franck Dubosc au cinéma cherche son père. Il tâche de retrouver ce petit lien, ce fantasme d’un père aujourd’hui disparu à qui il a écrit un autre scénario, cette fois pour la télévision, La Dernière Partie réalisé par Ludovic Colbeau-Justin en 2021.

Rumba La Vie en salles le 24 août traite pareillement de paternité, d’abandon et de déception. Il y a ce malheureux concours de danse à Leeds puis cette dernière séquence en Espagne un brin superficielle venant conclure le film avec une petite émotion. Les raccords ne sont pas idéaux à l’image de certaines bandes dessinées dont il faut serrer les transitions pour arriver au bon nombre de pages. Étrangement Franck Dubosc nous fait le coup avec ce film qui se regardera bien à la télévision lors d’un passage un dimanche soir ou via MyCanal. Au cinéma le film reste bien trop modeste malgré le soin des dessins. À la réflexion, on se demande si Franck Dubosc ne serait pas un excellent auteur de bandes dessinées plutôt qu’un énième réalisateur de cinéma perdu dans la masse.

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