La Belle et le Corsaire : Le feu aux poudres

Pirates, corsaires, flibustiers, galions, caravelles, trésors, îles désertes… Qui n’a jamais fermé les yeux pour s’imaginer un instant aux commandes d’un navire voguant dans des eaux inconnues ou se préparant à l’abordage d’un bateau chargé de richesses ? L’univers de la piraterie fait rêver, il fascine, et ce seul mot est synonyme d’aventure ! La littérature abonde d’œuvres sur le sujet, qu’ils s’agissent de récits d’explorations tirés de journaux de bord ou de romans, comme ceux de Fenimore Cooper, Daniel Defoe ou Emilio Salgari, entre autres. Il était normal que le cinéma fasse sien ce registre narratif.

Le genre vivote au début du 20ème siècle puis sa production augmente d’année en année pour atteindre son apogée dans les années 50’ et 60’. D’illustres réalisateurs comme Cecil B DeMille, Tourneur père et fils, Raoul Walsh, se sont emparés du genre, et des acteurs comme Errol Flynn, pour ne citer que lui, ont dressé le portrait du pirate au grand cœur. Le pavillon à tête de mort séduit l’Amérique et s’exporte en Europe. L’Italie s’empare du genre et produit de nombreux films sans toujours dépasser ou égaler la qualité dont elle s’inspire.

Ainsi sort, en 1958, La Belle et le Corsaire, réalisé par Giuseppe Maria Scotesse qui compte plusieurs films sur la piraterie, le reste de sa filmographique étant majoritairement des documentaires à caractères religieux. A ses côtés, l’acteur John Derek ( A l’ombre des potences, Les dix commandements…) incarne le personnage principal, l’actrice Ingeborg Schöner joue la belle du titre, Gianna Maria Canale joue Catherine d’Autriche… Autant de vedettes réunies comme faire-valoir pour attirer le spectateur européen plutôt que pour leurs talents de comédiens.

L’écriture de ce film a nécessité le travail de cinq scénaristes, dont le réalisateur, ce qui laisse supposer beaucoup de discussions et de réécritures, et cela se ressent. Tout commence dans un petit château en bord de mer, sur la côte italienne, où résident un baron avec sa nièce et le commandant de garnison, un homme au passé trouble qui prétend vouloir épouser la nièce pour mieux mettre la main sur le château du baron. Un beau jour débarque le corsaire Nadir El Krim, joué par John Derek, qui met le feu aux poudres pour se venger. Jusque-là, l’histoire se construit simplement mais d’autres sous-intrigues viennent grossir le récit. L’on sent alors la volonté des auteurs de donner plus de corps et de profondeur à l’intrigue mais cela tombe à plat. La tension ne monte jamais vraiment et les péripéties s’enchaînent de façon trop linéaire. Malgré les facilités narratives employées, le récit reste cohérent et se suit jusqu’au dénouement final.

Si l’histoire n’est pas mémorable, il faut tout de même reconnaitre certaines qualités au film. La Belle et le Corsaire se remarque pour le soin apporté aux costumes, des dames aux pirates chacun porte dignement l’habit qui convient à sa classe, et la pellicule couleur révèle les tons chatoyants des tenues que le noir et blanc gardait pour lui. Les décors fourmillent de détails, chaque recoin du cadre est occupé par un acteur, un objet ou une fenêtre qui s’ouvre sur le bleu du ciel ou de la mer. Le format du film, tourné en cinémascope, offre par moment de beaux panoramas et certaines séquences, notamment les batailles et les chevauchées, sont rehaussées d’un souffle épique. La Belle et le Corsaire est un film en demi-teinte qui alterne constamment entre le bon et le moins bon, entre l’original et le réchauffé. Certaines références historiques et quelques pointes d’humour qui parsèment le récit l’empêche cependant de sombrer complètement.

Artus Films ressort un film qui s’adresse aux curieux, aux passionnés de piraterie et d’aventures, et aux cinéphiles qui trouveront dans le bonus du DVD une présentation du film révélant quelques secrets de tournage ainsi que le contexte de production.

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