Édito – Semaine 28

Nous allons finir par croire que nous portons malheur. Il y a quelques semaines nous ruminions sur le potentiel sujet d’un édito alors que nous étions en pleine panne d’inspiration, au point de se demander si nous allions réellement prendre la peine d’en écrire un et nous finissions par apprendre la mort de Jean-Louis Trintignant. La semaine dernière, même chose : on songeait sérieusement à ne rien écrire sous peine d’être redondant et voilà que James Caan décède. Nous sommes loin de nous réjouir de ces disparitions au contraire mais il est vrai que rendre hommage à un acteur que nous aimions constitue un excellent sujet pour un édito. On peut en tout cas vous promettre que par la suite nous n’allons plus nous plaindre d’être en manque d’inspiration, nous avons trop peur d’apprendre derrière le décès de Clint Eastwood ou de Al Pacino !

Comment ne pas rendre hommage à James Caan ? Il fait encore une fois partie de ces acteurs avec lequel on grandit dans notre cinéphilie et dont la trogne de cinéma, une fois rencontrée, ne nous quitte plus jamais. En l’occurrence ce fut pour nous, comme pour beaucoup, le rôle de Sonny Corleone dans Le Parrain qui nous fit découvrir l’acteur. Le film est sorti en 1972 et Caan tournait pourtant depuis près de dix ans (on peut le voir chez Howard Hawks) lorsque son talent explose devant la caméra de Francis Ford Coppola qu’il avait déjà croisé pour Les gens de la pluie. Dès lors, Caan impose son talent, figure importante du cinéma américain des années 70, tournant avec les plus grands, s’aventurant même chez Claude Lelouch à plusieurs reprises tout en enchaînant les classiques, pour les bonnes raisons (Rollerball, Le Flambeur, Le Solitaire) ou les mauvaises (Tueur d’élite et ses ninjas, resté culte pour ceux qui l’ont vu mais clairement pas le meilleur Sam Peckinpah).

Grâce au Flambeur et au Solitaire, deux de ses plus beaux rôles, Caan s’inscrit dans l’imaginaire collectif comme une figure essentielle du film de gangsters, valeur sûre utilisée à bon escient chez James Gray, Guillaume Canet, Lars Von Trier (même si Caan a toujours clamé qu’il n’avait rien compris au délire de Dogville) et même Wes Anderson où l’acteur apparaît dans Bottle Rocket, le premier long métrage du cinéaste. Dans notre mémoire cinéphile, une fois que nous découvrons Caan dans Le Parrain, nous le retrouvons par intermittence avant de vraiment cerner sa carrière. Déjà sur TF1 dans la série Las Vegas où l’on se dit bien que cet homme nous est familier et puis aussi dans Misery de Rob Reiner, DVD acheté à l’aveugle sur un petit marché de Haute-Savoie pendant les vacances d’été et visionné dans la foulée sur notre PC portable pour un sacré choc, le film étant une des grandes réussites de la carrière de Reiner avec une partition inspirée de la part de Caan dans un rôle difficile puisque cloué dans un lit et un fauteuil roulant.

Acteur éclectique, à la carrière inégale mais au talent constant, promenant son charisme et une espèce d’insolence en toute circonstances, nous avions pu voir Caan en décembre 2018 à la Cinémathèque où il avait donné une masterclass suite à une projection du Solitaire (un petit bijou, comme tous les films de Michael Mann d’ailleurs). Il apparaissait déjà fatigué mais conservait un humour ravageur, revenant en détails sur son rôle et sur sa carrière. Bien que 82 ans soit un âge honorable pour nous quitter, on peut le dire, il va beaucoup nous manquer et nous aurions aimé le voir dans encore plus de films…

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