L’été nucléaire : Où comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer l’atome

Que se passerait-il si la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine, la plus proche de Paris, rencontrait un grave problème technique ? Voilà le postulat de départ posé par le film. À l’heure où le futur énergétique de la France semble se diriger vers le nucléaire, s’interroger sur les risques possibles est une chose saine. L’été nucléaire ne dispose malheureusement pas de la nuance nécessaire puisque Gaël Lépingle prend clairement parti sans donner de solution. Car, malgré ses dangers ; dans un monde en pleine crise climatique, le nucléaire paraît être la seule alternative capable de maintenir une production énergétique suffisante sans polluer l’atmosphère plus que de mesure.

La reconstitution des évènements dans la première demi-heure est en ce sens assez convaincante. Journaux télévisés et reportages nous plonge dans l’urgence d’une situation qu’on cherche à minimiser le plus longtemps possible. Le message de prévention du ministère de l’Intérieur prend alors une tournure horrifique et infantilisante lorsqu’il utilise des personnages animés pour indiquer aux habitants les démarches à suivre. Quand un doute commence enfin à se propager parmi le groupe par rapport à la gravité de l’incident, l’un des jeunes rétorque qu’on est en France et qu’on nous le dirait forcément, ce qu’un autre contre-dit en parlant du silence des dirigeants japonais lors de Fukushima. Pour représenter les dangers des radiations, les leçons de mise en scène de l’excellente série Chernobyl ont été retenues. C’est particulièrement visible dans les différents plans larges où la caméra est trop statique, trop insistante, donnant la sensation d’être une créature observant ses futures victimes. On en revient presque à chercher les signes de ce danger dans le cadre, mais la menace est plus insidieuse. Elle se joue à l’intérieur.

Comme témoin de la catastrophe, Gaël Lépingle choisit un groupe de jeunes, coincés dans une maison bien trop proche de la centrale. On assiste à travers leurs yeux à la progressive dégradation de la situation et aux différentes réactions que cela peut engendrer. D’un côté, cela permet de tout de suite s’identifier à des civils qui cherchent juste à démêler le vrai du faux et surtout à s’en sortir. D’un autre côté, l’échelle du récit se retrouve considérablement réduite, nous coupant au passage du postulat de départ puisque les conséquences des évènements sur la capitale (évacuation, chaos…) sont complètement évacués. En ce sens, la démarche est similaire à celle de Signes de M. Night Shyamalan avec son invasion alien vécue dans une cave (le film cite aussi Phénomènes) sauf qu’elle s’inscrit ici dans un cadre réaliste et non métaphysique, ce qui peut être frustrant pour le spectateur. 

N’assumant pas le genre attaché à son pitch, Gaël Lépingle fait de son mieux pour esquiver les codes du survival et se concentrer uniquement sur ses personnages. Lorsqu’ils forment un groupe, ces jeunes, qu’on sent plus prolétaires que bourgeois mais pourtant tous experts en nucléaire, gagnent en crédibilité. Leurs relations font vraies même si leurs problèmes paraissent futiles au vu de la situation. Le souci, c’est qu’aucun n’est assez caractérisé pour justifier certaines actions frôlant parfois avec le ridicule. Les scénaristes sont dépassés par leur concept et se retrouvent obligés de créer des moments de tension complètement artificiels : des voleurs, une invasion de poules… Ou bien introduisent un fusil (de Tchekov), extrêmement mal développé et finalement inutile puisque son utilisation n’influe jamais le récit. Le final continue d’ailleurs sur cette trajectoire, n’assumant jamais la radicalité du propos que le film cherche à développer.

L’été nucléaire n’est donc finalement pas plus une dénonciation des dangers du nucléaire qu’une vidéo de prévention sur les choses à faire ou ne pas faire en cas de catastrophe. Le panneau final est sur ce point risible car il sert littéralement de mesure à l’intelligence des personnages. Il faut néanmoins reconnaître la qualité des effets spéciaux et de certaines envies de mise en scène (les plans de transition de la centrale en format Smartphone). Il faudra cependant prévenir le réalisateur qu’il ne suffit pas de faire des zooms sur des plans larges en courte focale pour développer un langage cinématographique.

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