Abuela : Terreur du troisième âge

Ayant atteint une reconnaissance internationale comme nouveau maître de l’horreur espagnole en même temps que son compère Jaume Balaguero avec [REC], Paco Plaza n’a depuis jamais réellement confirmé ce statut, le cinéaste enchaînant les réalisations avec un sens de l’efficacité indéniable, cependant parasité par des scénarios s’avérant le plus souvent décevants et par une mise en scène reposant grossièrement sur certaines astuces… Et ce n’est pas Abuela – son nouveau film pourtant récompensé du Prix du Jury au dernier festival de Gérardmer – qui nous fera changer d’avis.

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir entre les mains un pitch soulevant des thématiques intéressantes. En effet, Abuela raconte l’histoire de Susana, jeune mannequin travaillant à Paris qui revient en Espagne après un AVC de sa grand-mère Pilar. Contrainte de s’occuper de cette femme qui l’a élevée et qui constitue sa seule famille, Susana s’inquiète cependant de voir le comportement de sa grand-mère devenir de plus en plus étrange et angoissant…

Des propres dires de Paco Plaza, Abuela est un film de possession dans lequel le démon serait la vieillesse. Une vieillesse diabolisée dans notre société actuelle, à l’heure où tout sur Instagram doit paraître beau et faire envie. Cette idée de filmer la vieillesse dans ce qu’elle peut avoir de terrifiant (et en même temps dans ce qu’elle a de plus naturel) est tout à fait passionnante, mis évidemment en parallèle avec le métier de Susanna qui, à 25 ans, est désormais considérée comme vieille dans le milieu où elle évolue. Malheureusement, Abuela ne fait jamais réellement honneur à sa note d’intention et après un début nous annonçant déjà pratiquement la manière dont le récit va se terminer, on assiste à un enchaînement de séquences que l’amateur de cinéma d’horreur commence à bien connaître : appartement flippant avec parquet qui grince et porte qui claque, grand-mère terrifiante, visions d’horreur assaillant l’héroïne… Paco Plaza ne se foule guère et derrière son approche pétrie de bonnes idées (tous les voyants sont au rouge pour que Susanna parte en courant mais la culpabilité à l’idée de laisser sa grand-mère seule la fait déraisonnablement rester auprès d’elle), il ne fait absolument aucun effort pour bousculer le spectateur.

Nous resterons donc relativement de marbre face à un film capable d’agencer quelques frissons sympathiques (Plaza est tout de même loin d’être un manche et témoigne d’un sacré savoir-faire même en utilisant des clichés) sans jamais transcender la toute-puissance de son sujet, se contentant de nous faire suivre un chemin tristement balisé. C’est d’autant plus dommage que le début du film en évente la fin, annihilant ainsi toute sorte de suspense ou de plaisir à élucider le mystère se tramant derrière le comportement étrange de Pilar. En nous donnant toutes les cartes, Abuela entendait peut-être étayer son propos mais il ne fait que se tirer une balle dans le pied, tout le film se montrant relativement programmatique et sans surprise malgré l’investissement de ses deux actrices principales. Il faut dire que sur le même thème, le film Relic sorti en 2020 était beaucoup plus réussi, trouvant une approche originale et insidieuse qui prenait aux tripes pour ne plus nous lâcher jusqu’à la fin. La comparaison est difficilement évitable et ne fait que rajouter un clou dans le cercueil de Abuela qui, de toute façon, n’est qu’un film d’horreur assez banal en dépit de ses bonnes intentions. Dommage.

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