Marché Noir : Brebis galeuse à Téhéran

Entre La Loi de Téhéran sorti en 2021 et Marché Noir ce début d’année, le cinéma iranien semble clairement nous indiquer que Téhéran n’est pas un lieu touristique à fréquenter. Suite indirecte au film de Saeed Roustayi, Marché Noir pourrait presque le compléter comme une sorte de dyptique sur Téhéran. Cette fois-ci, on se place de l’autre côté de la barrière en ne suivant plus le milieu judiciaire et carcérale mais bien l’environnement mercantile et ouvrier. Après avoir été appelé par son père dans l’abattoir dans lequel il travaille pour un accident ayant tué 3 personnes, Amir se retrouve emporté dans une histoire improbable. Embrigadé par le patron de son père et animé par un désir de justice, Amir (Amirhosein Fathi) est pris dans un étau moral dont il ne parvient pas à trouver la bonne solution. Il finit par se laisser porter par les rebondissements et contre-temps de cette histoire.

Tout comme son grand frère, il s’agit d’un thriller social à la mise en scène implacable. Bien que nettement moins impressionnant, l’ambiance y est tout de même glaçante. La tension est palpable et le récit très bien écrit. Le jeu d’acteur approfondie nettement la crédibilité de l’histoire. Le seul bémol de Marché Noir est une perte de rythme durant le second acte du film.

En réalité l’histoire n’a rien de compliqué. Elle est même assez prévisible dans le fond. Ce qui l’épargne d’une certaine évidence de réalisation est l’ambiance que le réalisateur à su instaurer. Tout au long du récit l’image est soignée et maîtrisée pour rester proche des protagonistes et de l’horreur qu’ils commettent. Si les personnages tentent d’échapper au sort qui leur incombe, l’histoire elle n’a rien à dissimuler.

Marché Noir est un nouveau thriller d’envergure au cinéma. Visuellement impeccable avec un casting solide, rien n’est laissé au hasard dans ce film a la thématique passionnante. Le seul problème est qu’il arrive bien trop longtemps après un film vraiment impressionnant. Sa perte de rythme et ses petites facilités scénaristiques ne l’épargneront pas de la comparaison avec La Loi de Téhéran. Les acteurs s’en sortent pourtant à merveille en incarnant des rôles particulièrement bien dessinés et caractérisés.

Au final il s’agit d’un film factuellement fort et visuellement percutant. L’histoire évolué de manière intéressante avec des rebondissements sincèrement inattendus. C’est la toile de fond qui est plus évidente et donne le sentiment d’une narration saccadée. On attend rapidement la vraie chute et l’élément qui la déclenchera. Le spectateur est vite mis au courant d’un élément central de l’histoire, l’obligeant à attendre une résolution qui n’arrive malheureusement jamais.

Le cinema iranien s’impose cependant à nous chaque année un petit plus avec des thématiques fortes et des réalisations abouties. Les films ne se valent pas tous de la même manière mais tous possèdent une puissance visuelle ou narrative extrêmement prononcée. Difficile de savoir si Marché Noir laissera une empreinte aussi forte que nombre de ses prédécesseurs au milieu de tant de films de qualité. Toujours est-il que son histoire et sa réalisation sont largement méritants malgré un classicisme un peu trop évident au sein du cinéma persan.

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