Cheap Thrills : Une nuit au bout de l’enfer

Rien ne nous prédestinait à voir un tel film sur la grande toile. Véritable OVNI sortant de nulle part, Cheap Thrills est ce que l’on peut appeler un coup de massue découvert lors de la 3e édition du Paris International Fantastic Film Festival. Dans la lignée de Funny Games de Michael Haneke, les deux films ont ce point commun de nous faire ressentir ce même sentiment nauséabond à la sortie. Émotions dérangeantes, ironie blafarde, excitations vibrantes, Cheap Thrills réveille nos plus bas instincts. Le diable qui est en nous prend le contrôle de nos pensées pendant que les deux protagonistes à l’écran s’infligent les pires sévices. Voir l’homme devenir le simple playmobil d’un couple de richard aux mœurs dissolues refoule nos plaisirs inavoués entre sexe et mutilations.

Premier long métrage coup de poing de E.L. Katz disponible sur la plateforme Shadowz et à découvrir urgemment si ce n’est pas déjà fait, le jeune réalisateur aborde les thèmes de la lutte des classes, du voyeurisme, du conditionnement de l’âme humaine et de nos limites face à l’appât du gain. Le film réussit son pari à placer le spectateur en empathie avec les deux héros, passant l’intégralité du film à vivre leurs choix en nous posant les mêmes questions: que suis-je prêt à faire pour de l’argent ? Suis-je prêt à me ridiculiser ? À transgresser la loi ou à renier mes valeurs ? À me mettre en danger ou à risquer la vie de quelqu’un d’autre ? 

Cheap Thrills ne brille pas par un scénario didactique. On y suit Craig partant au travail avec un avis d’expulsion sur sa porte, après avoir essayé de faire l’amour à sa femme mais coupé dans son élan par les pleurs matinaux de son nouveau-né. Quelques heures plus tard, il apprend son licenciement. Une journée de merde, 8h de chute libre qu’il va noyer au bar. Par un heureux hasard, il retrouve un ami d’enfance, Vince, pote d’école et de skateboard. Quelques verres plus tard, les deux acolytes légèrement alcoolisés sont conviés à la table d’un client inconnu. Au fil des verres, cet inconnu et sa petite amie, dont c’est l’anniversaire, mettent en place un jeu d’action sans la moindre vérité avec des dollars à la clé. Les épreuves s’enchaînent, montant crescendo dans la cruauté et les déviances sadiques. Une somme de 250 000 dollars à la clé va par conséquent faire rentrer en compétition les deux anciens amis pour une nuit qu’ils ne seront pas prêts d’oublier. Le récit possède l’intelligence de ne placer aucune contrainte physique sur les personnages. Constamment libres de leurs choix Craig et Vince assument, l’un pour payer ses dettes de 45 000$ et l’autre pour l’appât du gain. 
Nos bas instincts sont donc piqués au vif d’une curiosité pour savoir quelles épreuves vont être mises en vente. Le couple diabolique représenté par Colin et sa très belle femme Violet excite nos pulsions sans la moindre culpabilité. Ces « amis » d’une soirée qui s’avère pour eux exceptionnelle ne font quasiment que leur proposer de se resservir du champagne en étant aimable. La manipulation est psychologique, non brutale, mais la perversité du dispositif est là. Ils regardent sans toucher.

Violet. Quel beau prénom personnifié par un petit ange quasiment absent et muet. De par sa beauté froide, elle se révèle au fur et à mesure l’incarnation du diable en personne. Pernicieuse et perverse, Violet démontre des penchants morbides. Prenant en grippe Craig elle va s’enrouler autour de lui comme un serpent sur sa proie, le poussant aux pires méfaits. Elle osera même le pêché ultime dans un accouplement sclérosé et putassier. On ne cache pas que le petit minois de Sarah Paxton, déjà aperçu dans le Inkeepers de Ti West, fait son petit effet, beauté empoisonnée dont chaque homme se serait piqué au risque de cette forme d’envoûtement glacial et irrésistible. 

Cheap Thrills est un film où ironie rime avec méchanceté. Une escalade constante dans la dégradation humaine consentie alimentée par sa propre souche particulière de misanthropie sombre et comique. Un film sociétal extrême et sans concessions immortalisé par un plan final implacable.

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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