The Trip : Jusqu’à ce que la mort…

Le cinéma de genre norvégien a connu une certaine mise en avant à l’international à la fin des années 2000. Les aficionados gardent des projets tels que Cold Prey, Troll Hunter ou encore, à sa manière, Babycall en très haute estime. Mais dans cette vague de réalisateurs, il y en a un en particulier que nous chérissons particulièrement : Tommy Wirkola. S’il a su animer nos soirées entre amis avec son incontournable Dead Snow en 2009, c’est véritablement en 2014 qu’il a arraché tout notre respect avec sa suite, Dead Snow 2, qui était un grand moment de comédie gore digne d’un Peter Jackson des débuts. Entre-temps, il s’était fait repérer aux États-Unis en 2013 pour sa version du conte Hansel & Gretel où il faisait s’affronter ses héros contre des sorcières dans des décors en carton de chez Ikéa. Un film pop totalement régressif qui n’a pas convaincu tout le monde, mais qui avait le mérite de secouer les formalités inhérentes à ce genre de production. En 2017, il réitère son expérience américaine pour Seven Sisters. Film d’anticipation aux ambitions certaines, mais qui semblaient étriquées par un moule de producteur bien trop conventionnel. Depuis, nous n’avions plus entendu parler de lui. C’était sans compter les envies de cinéma de son auteur. De retour en Norvège, il nous congratule de son dernier bébé directement en vidéo, The Trip, pour lequel il retrouve Noomi Rapace en tête d’affiche.

Un couple au bord de la rupture décide de s’isoler dans une cabane paradisiaque au bord d’un lac. Sous prétexte de se retrouver, les deux partagent en fait, sans le savoir, la même volonté : celle de tuer l’autre. Alors qu’ils cherchent chacun le moyen de mener à bien leurs plans respectifs, des visiteurs inattendus s’introduisent dans la maison. Ils vont devoir mettre leurs griefs de côté pour s’en débarrasser.

Méchant et terriblement succulent, The Trip est exactement le genre de défouloir qu’on attendait de lui. Tommy Wirkola se fend d’une proposition calquée sur la fameuse séquence dans la maison de Mr. & Mrs. Smith pour en pondre un long-métrage à la violence redoutable et à l’humour noir bienvenu. Pour les spectateurs accoutumés de ses projets norvégiens précédents (Dead Snow, Kill Buljo), le terrain sera conquit d’avance. The Trip se targue d’un postulat minimum tout juste prétexte à nous montrer des personnages s’en mettre plein les dents. Et à ce jeu, le casting s’en donne à cœur joie. Quel plaisir de voir des acteurs s’amuser comme des enfants à utiliser tous les ustensiles de leur environnement pour faire le plus de dégâts possible. Ça se tire dessus à la chevrotine, s’envoie des boules de billard à la figure et passe à travers les murs avec autant de dextérité qu’un enfant arracherait les ailes d’une mouche. Wirkola revient à l’essence même de son cinéma : un cinéma de sale gosse qui se moque des conventions pourvu qu’il divertisse. Soit on adhère soit on déteste, Wirkola fait rarement dans la demi-mesure et c’est une constante qui ne bouge pas chez lui. The Trip est une comédie noire d’une folle intensité qui ne relâche jamais la pression. Quel pied !

En plus de son casting extrêmement convaincant et de ses idées loufoques en pagaille, The Trip montre également toute l’ingéniosité de Wirkola à savoir tenir les rênes d’un huis-clos en bonne et due forme. Il utilise les bases de son art avec brio. On ne compte plus les divers fusils de Tchekhov disséminés aux quatre coins de l’image. Loin d’être des futilités de mise en scène, Wirkola suscite un plaisir malsain chez son spectateur. Chaque élément d’une pièce peut devenir une arme potentielle, on ne sait que choisir et on se régale par avance de ce qui sera utilisé ou non. Si nous évoquions le cinéma de Peter Jackson en préambule ce n’était pas un hasard. Wirkola est un grand fan de Braindead. S’il avait habillé l’un de ses personnages d’un t-shirt à l’effigie du film dans Dead Snow, il reprend le principe de la tondeuse à gazon ici dans une scène en passe de devenir anthologique où le troisième âge obtient enfin réparation de tout un pan du cinéma de genre bien trop souvent moqueur envers lui. L’espace d’une séquence extrêmement fun, Wirkola redouble d’ingéniosité avec pour seuls éléments à sa disposition une personne âgée, une tondeuse et une voiture électrique. Quand on vous dit que The Trip est un voyage caustique qui défie toutes les lois du vraisemblable, ce n’est pas un euphémisme.

The Trip est un film bête et méchant, un travail de sale gosse qui prend plaisir à malmener ses personnages dans le seul but d’arracher des rires francs et massifs à ses spectateurs. Tommy Wirkola n’atteint pas l’apogée de son irrévérence comme il l’avait fait pour Dead Snow 2, mais The Trip regorge tellement de séquences succulentes qu’il serait fort dommage de s’en priver. Un must-have instantané de vos futurs soirées pizzas entre amis.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*