Tout nous sourit : Un drôle de week-end !

Mélissa Drigeard signe sa deuxième comédie en tant que réalisatrice et scénariste. Après Jamais le premier soir sorti en 2014 (et qui manquait d’originalité dans le scénario), elle revient avec Tout nous sourit, une comédie centrée sur l’amour, la tromperie et la famille. Présenté lors du festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez en 2020, il a remporté le prix du jury ainsi que le Prix d’interprétation féminine pour Elsa Zylberstein et le Prix d’interprétation masculine pour Stéphane de Groodt, tous les deux dans les rôles titres.

Qui aimerait rencontrer la maîtresse de son mari lors d’un week-end avec son propre amant ? Et bien, c’est ce qu’Audrey subit. Si au niveau professionnel tout lui réussit, sa vie de famille au premier abord parfaite est en réalité illusoire. Il est difficile de tout mener de front, entre élever ses enfants et réussir sa carrière professionnelle, la vie conjugale peut être laissée pour compte. Au final, ce couple ne profite pas vraiment de l’un et de l’autre au point d’oublier la chance qu’ils ont.

Audrey (Elsa Zylberstein) et Jérôme (Stéphane de Groodt) forment donc un couple en crise. Chacun prend un amant et une maîtresse afin de s’échapper de la routine. Un jour, ils décident de partir en week-end chacun de leur côté. Audrey prétend devoir animer un séminaire et son mari un festival de rock. Lui cherche avant tout une nouvelle jeunesse auprès d’Yseult, sa stagiaire incarnée par Karidja Touré, magnifiquement agaçante dans son rôle de jeune étudiante en journalisme éperdument amoureuse de son patron. Quant à elle, c’est un petit voyage en Italie auprès du sulfureux Alberto, un chef cuisinier (Giovanni Cirfiera). Classique chez les plus de 40 ans, c’est la fameuse crise d’adolescence de la quarantaine passée.
Une ombre au tableau cependant : tout ce beau monde se rencontre (et se retrouve) dans la maison de campagne du couple marié. Gros quiproquo mais ce n’est pas tout : en effet les parents d’Audrey se joignent à eux ainsi que leurs enfants. Ils avaient eu la merveilleuse idée d’organiser une petite fête dans la même maison (dans le dos de leurs parents bien sûr). Ils sont rejoints ensuite par la sœur célibataire d’Audrey. Un long, très long week-end s’annonce…

La réalisatrice a fait le choix de plans rapprochés afin de suivre l’intimité des personnages. De telle sorte que la caméra est là pour les accompagner dans leur quotidien. Cela rend les scènes réalistes. Lors des monologues, il y a un rapprochement du champ visuel ce qui nous permet d’écouter ce que les personnages ont à dire. La caméra ne bouge pas. Pendant plusieurs minutes, elle est focalisée sur une même chose au cœur du champ. Comme une sorte de confessionnal, chaque émotion est ainsi capturée. On entre peu à peu dans leur intimité afin de comprendre les raisons des tromperies mutuelles. Puisqu’au fond, on ne connaît pas le passé des personnages, c’est à la caméra et à l’interprétation des acteurs de nous le révéler.

Le film commence par un moment de vie quotidienne. Rien de bien transcendant. Un petit-déjeuner de famille qui annonce plus ou moins la tournure que va prendre le film. Audrey et Jérôme sont réunis avec leurs enfants. Ils parlent de banalités, et de leur week-end respectif. La manière dont ils essayent de cacher leur future escapade n’est pas efficace puisqu’on devine le stress qui s’empare d’eux. Le père de famille est assez discret alors que la mère parle beaucoup. La culpabilité est trop forte pour elle tandis que lui se cache par son silence et ses changements de sujet.
La touche d’humour de cette ouverture provient des enfants. La fille ainée, Juliette (Chine Thybaud) une grande fan de rap, nous partage l’un de ses « très recherchés » textes pour le plus « grand bonheur » de ses parents. Un moment de complicité, mais dans toute cette chaleur familiale, la distance entre le couple est assez évidente. Ils ne sont pas proches et tentent de prouver le contraire. Un certain malaise se fait ressentir.

Le début est prometteur avec cette rencontre improbable et la gêne des personnages. Des longs moments de silence assez drôles, et des regards embarrassés gagnent à apporter de l’intérêt au film. Mais, malheureusement le tout tombe rapidement à plat. Les scènes sont longues avec un manque de rythme et les gags gâchés par une réalisation peu variée dans ses tonalités. Les répliques comiques et sarcastiques que sort Jérôme à sa femme sont assez bien trouvées et peuvent faire sourire mais le film n’ira malheureusement jamais plus loin.

D’une manière plus générale, le casting est bon avec la prometteuse Karidja Touré. Toutefois, elle semble être dépassée par les scènes et ses répliques redondantes. Son personnage manque de profondeur et, est assez mal exploité. Il aurait fallu que Mélissa Drigeard pousse le scénario plus loin dans ses retranchements afin qu’un sentiment de compassion vis-à-vis de son personnage puisse gagner les spectateurs. Au lieu de ça, les complaintes de son personnage sur « l’amour » compliqué qu’elle subit font sourire. Un certain ridicule s’en dégage, mais l’audace dont elle fait preuve ajoute un peu de piment dans l’enchaînement des scènes.

Le jeu d’acteur des personnages principaux n’est pas au rendez-vous. Elsa Zylberstein a beau avoir multiplié les partitions comiques ces derniers temps (notamment dans Adorables de Solange Cicurel sorti l’année dernière), elle a un peu de mal à offrir des nuances à son personnage, l’actrice en faisant un peu trop, une nouvelle fois dans un rôle de mère proche de l’explosion, angoissée, voulant être parfaite. On notera tout même son énergie dans ce rôle, l’actrice se donnant à fond même si elle ne convainc qu’à moitié.

À défaut d’être une comédie totalement réussie, Tout nous sourit parvient néanmoins à être une jolie réflexion sur le modèle familial. Au fond qu’est ce qui unit une famille ? Les liens du sang ? Le film montre que ça ne suffit pas. Il faut, avant toute chose, partager des simples moments de joies et de peines, ce qui le rend assez attachant . Cette famille est reliée par le patriarche, Henri (Guy marchand). Il ajoute une touche d’émotion et de tristesse dans ce long-métrage. Ses dialogues sont profonds et relèvent le tout. Et c’est bien le seul parmi les acteurs à apporter une véritable épaisseur à son personnage. Dommage, car l’utilisation de la tromperie comme moteur du film et la famille comme noyau aurait pu rendre cette comédie très intéressante à regarder du début jusqu’à la fin.

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