After Love : Deuil touchant pour une expiation maladroite.

After Love a été repéré lors de sa présentation online aux Arcs Film Festival 2020, après s’être révélé à la Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2020 où il a remporté le prix de La Fondation GAN. En salles de cinéma le 29 septembre 2021, After Love se déroule entre Douvres et Calais et suit Mary Hussain qui, après le décès inattendu de son mari, découvre qu’il cachait un secret à seulement 34km de l’autre côté de la Manche, à Calais. Alors, elle part sur les traces de la vie secrète de son mari. 

After Love est né du désir de son réalisateur, Aleem Khan, à parler de sa propre expérience entre deux mondes, deux peaux. Enfant Anglais et Pakistanais, l’homme a grandi entre deux cultures. Puis à l’université, il comprend son désir pour les hommes, lui musulman. Il a toujours évolué au cœur d’une dichotomie qui l’a fait ne se sentir nulle part chez lui. Les traditions s’opposant aux modes anglaises et ses désirs se confrontant à sa religion. After Love reflète tout cela avec justesse et douceur par le rôle de Mary incarnée brillamment par Johanna Scanlan. Pure actrice anglaise, l’actrice est habituée des rôles tiers, parfois figuratifs outre son rôle dans la série The Thick of It qui l’a fait connaître à la télévision britannique. Aleem Khan lui offre donc un beau rôle à défendre d’une Anglaise convertie qui apprend la vie parallèle de son mari. Jamais révoltée, mais déboussolée, elle s’immisce dans la vie secondaire de son mari pour comprendre. Elle se rattache alors à ses moments volés par des mensonges. Le récit est classique, évident sur sa trajectoire dont on connaît le moindre ressort. After Love ne surprend pas, mais émeut par les liens qui se tissent entre Mary et Solomon, enfant qui se perd à attendre un père absent. La relation du jeune homme avec Mary, notamment un repas improvisé ou l’accolade finale bouleversante, est le sel d’un film développant l’effondrement d’une femme n’ayant jamais fait le deuil d’un enfant mort-né et cherchant la clé d’une vie partie subitement avec son mari. Elle se rattache alors à cette vie secondaire, laquelle n’a jamais eu lieu pour elle et qui se délite devant elle. Elle essaye d’être le lien avant que tout explose. Une tentative louable qui ne sauve malheureusement pas le film d’un classicisme lourd et d’un nombrilisme peinant à atteindre son spectateur.

Pour apprécier les tenants d’After Love, il faut être renseigné sur la trajectoire du réalisateur qui nourrit personnellement son film pour expier des années de doutes. After Love est le premier long-métrage d’Aleem Khan suite à un beau parcours en festival avec ses courts-métrages. Sundance, Locarno entre autre l’ont soutenus dans ses démarches pour atteindre la possibilité d’un premier long-métrage bien trop personnel pour toucher la majorité des spectateurs. Le désir d’expiation l’emporte sur le développement d’un cinéma. De cinéma, il y en a peu dans ce film qui emporte parfois par son émotion et sa tendresse. Mais le récit est trop académique et ficelé pour convaincre complètement faisant preuve par endroit de lourdeurs dans l’appui du comportement du mari dans sa seconde vie. 

After Love se découvre être une proposition accrocheuse, mais trop perfectible pour convaincre dans sa globalité. Aleem Khan exorcise une jeunesse remplie de doutes au cœur d’un premier long-métrage tendre par séquences, mais cousu de fil banc. Les situations sont rabattues au service d’un jeune metteur en scène trop « vert » pour réussir à concilier idées personnelles et de cinéma. After Love peine donc à atteindre le spectateur en dépit de la composition de son actrice principale touchante soutenue par Nathalie Richard faisant preuve d’une présence forte à l’écran. Malgré un premier essai en demi-teinte, Aleem Khan reste un jeune metteur en scène anglais à suivre.

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