Extra Ordinary : Pas anormales activités

La diversité est essentielle lorsqu’il s’agit de rendre une plate-forme de SVOD attractive, d’autant plus lorsque cette dernière se focalise sur un genre de cinéma bien spécifique. Dans le cas de Shadowz, nous n’avons eu de cesse de vous vanter sa ligne éditoriale aux petits oignons et son envie de toucher à la fois le public de niche connaisseur ainsi qu’un public plus large désireux de découvrir tout un univers bien plus riche que la plupart des grosses sorties dans nos salles et bacs vidéos. Cette semaine, la séance Shadowz revient en grandes pompes avec l’un des films les plus atypiques que nous ayons eu à traiter depuis que nous nous sommes lancés dans cette chronique hebdomadaire. Extra Ordinary est une comédie fantastique qui devrait ravir les amateurs d’absurde, les amoureux du second degré et les estomacs un peu fragile réticents aux abus d’hémoglobine. Le premier film de Mike Ahern et Enda Loughman s’adresse aux deux publics susmentionnés. Non content de glisser moult clins d’yeux aux classiques du genre, les deux réalisateurs tentent le pari fou d’oser faire aimer un genre aux personnes récalcitrantes à l’horreur. C’est le moment d’aller chercher votre bonne vieille maman encore traumatisée par L’exorciste et de vous installer confortablement dans votre canapé pour votre séance Shadowz de la semaine où vos zygomatiques seront plus que sollicitées.

Dans une province irlandaise reculée, Rose est une monitrice d’auto-école à la vie monotone et triste. Elle a le don de pouvoir communiquer avec les fantômes et est capable de pouvoir exorciser n’importe lequel d’entre-eux. Suite à la disparition tragique de son père, par sa faute, elle décide de raccrocher afin de ne se consacrer uniquement qu’à son activité de monitrice. Martin est père au foyer depuis la mort de son épouse. Hanté par le fantôme de la défunte, sa vie est un enfer, dicté par l’esprit de sa femme. Il décide d’entrer en contact avec Rose pour qu’elle lui vienne en aide. Rose refuse. Mais lorsque la fille de Martin se retrouve en proie à un rituel satanique initié par une rock-star, Rose accepte d’utiliser à nouveau ses dons pour lui sauver la vie.

Les amateurs d’humour noir britannique seront aux anges avec Extra Ordinary. Le film d’Ahern et Loughman se rapproche beaucoup de ce qu’ont pu développer Reece Shearsmith et Steve Pemberton à la télévision anglaise avec des séries comme Psychoville ou Inside N°9. Extra Ordinary mise absolument tout sur l’absurde. Nous sommes immergés au sein d’un univers où les fantômes et les esprits ne font pas uniquement partis du folklore : ils sont réels et parfaitement intégrés dans le quotidien des vivants. En posant du fantastique comme point d’ancrage à leur histoire, les deux réalisateurs peuvent immédiatement rentrer dans le vif du sujet. Et les vannes pleuvent dès l’ouverture du film pour ne jamais cesser. Bien conscients que leur humour ne sera pas du goût de tout le monde, Ahern et Loughman ne tentent jamais d’arrondir les angles. Soit on adhère au film, soit on passe totalement à côté. C’est un film qui ne laissera que très peu dubitatif tant il fait appel à la sensibilité humoristique de chacun. Le flegme britannique étant bien particulier, il faut savoir où l’on met les pieds avant de se lancer dans Extra Ordinary. Et ce n’est pas parce que l’on a adoré le travail d’Edgar Wright sur la trilogie Cornetto que l’on sera forcément client d’Extra Ordinary, bien au contraire. Si l’on retrouve des similitudes (avec Shaun of the Dead surtout) dans le traitements des personnages qui semblent complètement hors du temps, hors de tout, Extra Ordinary possède ce ton anglais bien plus prononcé que chez Wright qui s’arrange toujours pour tenter de généraliser son cinéma afin de l’ouvrir au monde entier. Extra Ordinary fera vraiment appel à vos capacités à pouvoir vous immerger dans un cocon de douceur, de naïveté et d’amour. Parce que, sous ses airs de profonde absurdité, le film prône un désir d’émancipation. Son héroïne est une rêveuse, amoureuse transie et mal dans sa peau. A la fois femme forte et terriblement fragile, Rose est l’élément qui synthétise toutes les ambitions du métrage : celles de saluer le courage et l’acceptation de tout un chacun sur ce qu’il est, sans fioriture ni langue de bois.

Co-production irlando-belge, Extra Ordinary convoque des situations issues des meilleures comédies belges. Si l’on ne peut nier l’influence de films comme C’est Arrivé Près de Chez Vous ou encore Dikkenek sur la culture populaire, impossible aussi de blâmer les gens réfractaires à ce genre d’humour particulier. Extra Ordinary en est emprunt de chacun de ses pores. Sa force de mise en scène, simpliste au possible et réduisant au maximum ses effets-spéciaux pour mieux nous en mettre plein la tête quand il faut lâcher les gaz, est à souligner. Le film parvient à nous immerger dans un monde surnaturel en invoquant très peu ses éléments fantastiques. Notamment grâce à la force de persuasion de son casting formidable. Maeve Higgins, qui interprète Rose, est un bonbon de délicatesse et de douceur. Elle illumine les scènes de son aura impressionnante. On se prend immédiatement d’affection pour cette femme perdue et abattue par la disparition de son père, incapable de trouver l’amour car elle ne s’accorde pas la confiance suffisante pour croire en elle. Son sourire ingénue combiné à la détermination qu’elle transpose lorsqu’elle doit affronter des esprits la rendent belle. C’est un personnage tellement doux, tellement fragile et fort en même temps. Tout le tempo comique du film repose sur ses états d’âme. D’une seconde à l’autre, elle est capable d’exorciser un démon, puis d’avoir envie d’une pizza twistée avec du tabasco et du basilic, puis d’ensuite être absolument terrifiée à l’idée de perdre d’autres êtres chers. Persuadée d’être une personne à part dans un monde si parfait, sa naïveté lui ferme les yeux sur le monde absolument tordu qu’elle côtoie au quotidien. Tous les personnages du film sont littéralement bêtes, de vrais personnages de cartoon. Parce que, oui, même lorsqu’il bascule dans le gore, Extra Ordinary est vraiment un immense cartoon. Toutes les vannes ne feront pas mouche, mais le tout est tellement généreux qu’il est impossible de ne pas y succomber si l’on est sensible à ce genre de projet.

Auréolé de nombreux prix dans les festivals où il a été présenté, dont le prix du jury lors du BIFFF 2019 et le prix du public à Sitges la même année, Extra Ordinary jouit d’une solide réputation auprès des communautés l’ayant vu lors de ces festivals. Son arrivée sur Shadowz lui concède une visibilité qu’il n’aurait probablement jamais eu ailleurs par chez nous tant son humour particulier peut rebuter les distributeurs à miser dessus. Quoi qu’il en soit, le premier film de Mike Ahern et Enda Loughman est un bonbon sucré et acidulé, à la fois doux et piquant, qui ne saura vous laisser indifférent. Littéralement l’une des meilleures surprises qu’il nous ait été donné de voir via une plate-forme de SVOD. A voir absolument !

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Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la plateforme Shadowz.

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