Bianco Apache : Source Naturelle de Fun !

De qui, entre Bruno Mattéï et Claudio Fragasso, doit-on Bianco Apache et Scalp, deux productions tournées coût sur coût dans les fameux décors d’Almeria en Espagne ? Les deux métrages sont tournés en parallèle, Bianco Apache se revendiquant être, par certains, le travail de Claudio Fragasso. Western à l’italienne tardif, le film – édité dans une belle édition Blu-Ray par Le Chat qui Fume et disponible sur leur site – se montre anachronique dans le paysage des sorties cinéma à la fin des années 80.
Une décennie sous le joug des actionners, les têtes d’affiche étant Jean-Claude Van Damme, Chuck Norris, Sylvester Stallone ou bien évidemment Arnold Schwarzenegger. Les super-héros de l’époque entre Terminator, Conan Le Barbare, Le Contrat ou Tango & Cash. Mais les Italiens, en collaboration avec les Espagnols, continuent dans un dernier effort, mais sans argent, de produire des reliquats des succès d’antan. Ils ont bien essayé de surfer sur la vague des Rambosploitation (Strike Commando) et autres Terminator miteux. Mais en 1987, sur une idée de Rex Harrison, gloire vieillissante expatriée en Thaïlande, Bruno Matteï, soutenu par Claudio Fragasso, décide de remettre le couvert franchement et salement.

Bianco Apache est un western pro-indien qui débute sur le voyage d’une colonie naïve faisant halte à côté d’un cours d’eau. Il ne faudra pas attendre longtemps pour qu’une bande de mercenaires massacre tout le monde, des enfants en gros plan et en ralenti, vision déroutante d’un Fragasso sous influence Mattéï qui commence déjà à en faire trop. Puis c’est au tour d’une femme enceinte de se faire rouer de coups avant l’arrivée en fanfare d’Apaches qui la secoure. Elle mettra au monde un garçon avant de décéder. La tribu d’Apache décide d’adopter le jeune blanc baptisé Shining Sky.

Il y a des faux airs aux péripéties classiques entre Ben-Hur et Les Dix Commandements dans ce Bianco Apache où Shining Sky va devoir affronter les galères de son peuple d’origine pour mieux devenir le héros historique d’une tribu abusée. Enfant adopté et rejeté suite à une tragédie, Shining Sky est un référent direct au Moïse et Ben-Hur incarné par Charlton Heston. Incarné par le fils Harrison, Sebastian, il en a le physique et la blondeur. Malheureusement, il n’en a pas le charisme, l’acteur restant stoïque tout le long-métrage, tel un benêt que l’on fait taire pour éviter la catastrophe. L’acteur est prostré devant la caméra, l’oeil vide et les muscles saillants, telle une publicité glacée des catalogues de La Redoute. Héros malgré lui, fol amoureux de Rising Sun, la jeune femme détonne à côté de l’acteur par sa beauté enflammée et son œil pétillant. Elle est incarnée par Lola Forner, actrice espagnole qui sut s’imposer sur les tournages à Alméria par un physique avantageux. Bénéficiant d’une expérience non négligeable, on a pu voir l’actrice sur les productions hongkongaises de Jackie Chan tournées en Espagne comme Mister Dynamite ou Le Marin des Mers du Sud. L’actrice est le rayon de soleil d’un long-métrage où les protagonistes principaux ont tous un nom de jus de fruits Oasis.

Le scénario de Bianco Apache est dû à Francesco Prosperi qui s’inspire donc des écrits antiques pour développer un récit manichéen. Avec Matteï et Fragasso, il forme un trio crasseux qui se complaît dans la saleté et la brutalité. Auteur de Hercule contre les Vampires de Mario Bava, Prosperi fut également metteur en scène avec différentes propositions crapoteuses comme La Dernière Maison sur la Plage ou Mondo Cannibale. On retrouve son style aiguisé dans ce western aux gueules patibulaires notamment Charly Bravo (Tango ?), méchant vraiment très méchant qui se paye une Tomahawk pleine tronche, mais reste vivant pour une dernière chasse hilarante dans les montagnes.
Mais à qui doit-on véritablement la mise en scène d’un film oscillant entre vulgarité, idée géniale et absurdité totale ? Bianco Apache porte la griffe de Matteï par une violence exacerbée, un érotisme à fleur de peau et une mise en scène sans le moindre recul. Ça ne fait pas de ce western un mauvais film, mais plutôt une œuvre singulière et absurde divertissant le temps du visionnage. Le film porte également la patte Fragasso qui par instant recèle de jolies séquences, notamment les séquences d’actions et de fusillades plutôt bien troussées.
Avouons que l’on se marre bien entre les meuglements de Sebastian Harrison se lançant corps et âme dans le combat, la naissance ahurissante du bébé ou le plan final sur Shining Sky mort sur le corps de sa femme qui ne peut s’empêcher de cligner des yeux. 

Bianco Apache est un essai vain de revival d’un genre qui connaîtra ses derniers élans avec Terence Hill entre une adaptation de Lucky Luke, Petit Papa Baston ou encore le diptyque Doc West au début des années 2000. Bianco Apache est un nanar où les deux metteurs en scène se prennent au sérieux. Casting hilarant, intrigue pro-indienne mal dégrossie dont les deux réalisateurs ne réussissent jamais à en tirer la moindre sève par un manque flagrant de talent. Bianco Apache divertit au moins le temps de la séance, c’est déjà cela de pris. Qu’étions-nous venus chercher autre qu’une bonne tranche de rigolade avec un film signé par Bruno Matteï et/ou Claudio Fragasso ?

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