Frères d’Arme : Quand le passé nous presse.

Présenté lors de la 8e édition du Champs-Élysées Film Festival en compétition du Meilleur Film Indépendant Français, Frères d’Arme s’est distingué en remportant le prix du Public. Des spectateurs convaincus par l’histoire prenante de ces deux frères immigrés des Balkans travaillant dur dans la zone portuaire de Brest. Les deux hommes sont marqués par un fait divers les impliquant dans la mort d’un homme dans leur pays natal ce qui engendra une vendetta meurtrière. Aujourd’hui installés à Brest où la famille attend la sortie de prison de l’oncle pour repartir au pays. Mais Emiljan leur annonce rester en France pour vivre avec Gabrielle sa compagne. 

Ce passif familial et la décision d’Emiljan (Vincent Rottiers) de rester en France vont être le socle d’un film dramatique et violent. Son frère, Stanko, incarné par le propre demi-frère de Vincent Rottiers, Kévin Azaïs, ne va pas accepter cette fracture déclenchant une colère et une haine envers Gabrielle. Frères d’Arme est un petit film ambitieux avec une certaine force de conviction. Sylvain Labrosse croit en son film et cela se ressent à travers chaque plan. Tout est minutieusement cadré, plans sur les gueules judicieusement choisies, que ce soient les deux frères, mais aussi la mère incarnée par Marika Vibik.
Étonnant aussi de voir la ville de Brest mise au cœur d’un film de cinéma. Le Havre est une concurrente facile pour la plupart des polars ou drames. Du haut de la pointe de la Bretagne, Sylvain Labrosse trouve l’espace nécessaire pour des courses poursuites dans les rues exiguës de la ville ou sa campagne entre petites maisons typiques et routes serrées. On prend l’air dans cette ville discrète, mais tout autant intéressante par sa faculté à nous inscrire immédiatement dans le réel. 

Ce qui rassure pour mieux exposer le drame fraternel qui va se jouer. Une promesse non tenue, un avenir incertain, un passée ayant créé une frustration, des remords et des non-dits ayant entraîné la mort. Un besoin de repartir sur les terres natales comme un dû envers un père qui s’est sacrifié, mais dont l’aîné semble laisser pour l’amour de Gabrielle.
Il y a alors comme des relents shakespeariens dans ce drame familial où ça casse beaucoup d’objets, où ça crie sans jamais nous ménager. Kévin Azaïs donne tout (peut-être trop) dans le rôle de ce frère meurtri se sentant abandonné par un Emiljan parfaitement incarné par Vincent Rottiers. Il y a une retenue chez lui, comme une acceptation totale du personnage créant d’emblée une crédibilité. Une franchise que l’on ne retrouve pas dans le jeu des doublures jeunes des deux frères qui ne collent jamais. Un détail qui a son importance de par les allers-retours dans le temps pour situer les rôles, pas évident au départ.

Pour son premier long-métrage, Sylvain Labrosse signe un drame familial intéressant. Il saupoudre intelligemment d’une touche de polar amenant la noirceur nécessaire pour épaissir le récit. Frères d’Arme est un film à l’histoire frêle maintes fois rabattue qui trouve une originalité par son cadre typiquement breton et sa noirceur instillant un caractère fort jusqu’à un dénuement évitant tout nihilisme inutile.

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