
Au cœur d’un cinéma stéréotypé, plastique, interchangeable et totalement ahuri avec des hommes en collant affrontant toutes sortes d’antagonistes avec des pouvoirs surnaturels, voir débarquer discrètement un cinéma intemporel, au rythme calme à la force de ses paysages somptueux et des personnages intègres procure un bol d’air vivifiant. L’un des Nôtres est l’exemple devenu trop rare d’un cinéma intact et intime autour d’une famille frappée par le malheur, bouleversé par le deuil et divisé dans la violence.

Au haut de l’affiche, on retrouve un couple croisé au détour d’un film de collant qui justement essayait un maximum de s’en écarter pour retrouver un cinéma traditionnel. À savoir Man of Steel, nouvelle transposition des origines de Superman par Zack Snyder dont Diane Lane et Kevin Costner incarnent les parents Kent. Dans L’Un Des Nôtres, les deux acteurs forment de nouveau un vieux couple au cœur des étendues du Montana. Ils viennent de perdre leur unique fils après une chute de cheval et leur belle-fille emmène leur petit-fils dans une nouvelle famille dans le Dakota du Nord. George et Margaret vont rapidement découvrir que la jeune fille est sous l’emprise de cette dangereuse famille menée par Blanche Weboy. Ils vont alors tout tenter pour sauver leur petit-fils et sa mère.

Sous ses airs désuets, L’un des Nôtres est un grand film sous l’égide d’un patriarche taiseux incarné avec sagesse par Kevin Costner, interprétant un shérif à la retraite. L’acteur se met pourtant en retrait pour laisser la lumière à la grande Diane Lane. L’actrice américaine n’a malheureusement jamais eu une carrière à la hauteur de son charme. Cependant, elle a toujours fait preuve d’une régularité surprenante collaborant avec Francis Ford Coppola, Walter Hill ou Adrian Lyne. Mais sa carrière reste jugulée d’oeuvres mineures et de productions bancales. On retiendra Chaplin de Richard Attenborough ou les madeleines de Proust Judge Dredd avec Sylvester Stallone et Meurtre à Maison-Blanche avec Wesley Snipes ayant égayés nos soirées vidéos-clubs. Rien de bien flamboyant jusqu’à son rôle de Martha Kent chez DC Comics pour Zack Snyder, mais surtout L’un des Nôtres, son plus beau rôle, certes tardif, où elle incarne une mère endeuillée qui va se battre coûte que coûte pour récupérer son petit fils. Diane Lane éclipse alors Kevin Costner dans un rôle intense, héroïne d’un western urbain tragique aux relents horrifiques.

L’horreur s’attache au film dans une seconde partie brutale et inattendue. Elle surgit de l’ombre caractérisée par la famille Weboy sortante de leur tanière pour protéger la meute. Une lignée crainte, imprévisible de par leurs actes, inspirant la mort dès leur première apparition telle la Famille Sawyer chère à Tobe Hooper. La fratrie est symbolisée par la matriarche incarnée avec jubilation par Lesley Manville remarquée chez Mike Leigh ou dernièrement chez Paul Thomas Anderson dans le chef d’oeuvre, The Phantom Thread. Dans L’un des Nôtres, elle incarne Blanche, une mère possessive auprès de ses fils, garde rapprochée prête à bondir à tout moment. Blanche est une dangereuse antagoniste à Margaret dans ce combat entre deux familles pour la possession d’un petit-fils. La force de cette adaptation d’un roman écrit par Larry Watson réside dans cette opposition matriarcale funeste pour la sauvegarde des liens familiaux. Deux mères qui souhaitent garder leurs progénitures auprès d’eux, l’une pour définitivement faire le deuil d’un fils et la seconde pour garder l’emprise maléfique sur une tribu barbare.

L’un des Nôtres était un pari loin d’être gagné. Notamment par la présence de Thomas Bezucha à l’adaptation et à la mise en scène. Responsable d’âneries telles que Esprit de Famille avec Diane Keaton (2005) et Bienvenue à Monte-Carlo avec Selena Gomez en 2011, L’un des Nôtres se destinait plutôt à Kevin Costner, adepte du genre nous gratifiant des meilleurs exemples contemporains ses trente dernières années. Le réalisateur d’Open Range s’incline ici à la production laissant Bezucha montrer toute sa capacité à signer un grand film désespéré appréciant les notions sur les liens et la protection familiale à en fendre l’âme. D’où l’étonnement à la sortie de la projection d’un long-métrage tragique par quelques séquences tétanisantes. L’un des Nôtres s’assure être une découverte inattendue pour un morceau de cinéma impactant.
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