La Fille à la Valise : l’incomprise…

À l’occasion de sa ressortie en salles sur l’initiative des Films du Camélia, nous retournons, le temps d’un article, sur ce « little big movie » de la Nouvelle Vague italienne présenté en compétition officielle du Festival de Cannes 1961 : La Fille à la Valise de Valerio Zurlini. Film témoignant d’un budget relativement modeste, emblématique de son actrice principale (Claudia Cardinale est un peu au cinéma italien de l’époque ce que Brigitte Bardot est à la Nouvelle Vague française, cinégénie au charme tour à tour éminemment féminin et sauvageon, insolent et lumineux…) La Fille à la Valise est surtout – et avant tout – une histoire d’amour impossible, terrible, cruelle et profondément dolente tenant lieu dans les périphéries de Parme ; intrigue relatant les déboires sentimentaux de la ravissante Aida (Claudia Cardinale donc, dans son premier rôle important), La Fille à la Valise montre, dans toute son évidence et toute sa fatalité, l’impossibilité de l’équilibre amoureux liant deux êtres, quel qu’ils soient.

Simple, allant directement à l’essentiel le récit – partiellement écrit par Valerio Zurlini – commence comme un mélodrame aride rappelant à bien des égards l’incontournable incipit du Voyage en Italie de Roberto Rossellini : par une journée ensoleillée, sur une route jouxtant une voie ferrée, une voiture s’arrête pour nous laisser découvrir un couple visiblement au bord de la rupture. La jeune femme (Aida) sort pour mieux rejoindre les fourrés afin d’aller satisfaire une envie pressante, pendant que l’homme (Marcello) semble tramer une potentielle panne mécanique susceptible de l’amener à lâchement abandonner sa compagne quelque temps plus tard – dont on devinera assez rapidement qu’elle n’est rien de plus qu’une conquête parmi d’autres aux yeux du conducteur. Triviales, humoristiquement noires, ces premières minutes annoncent tout le pathétique de ce qui va suivre durant les deux heures de métrage que constituent La Fille à la Valise : violence des rapports amoureux, chantages et fascination de la femme pour le mâle dominant allant de paire avec la réussite sociale et la sécurité de rigueur. C’est à la fois lucide, déchirant et d’une remarquable justesse.

Valerio Zurlini se concentre surtout sur la relation platonique liant Aida au jeune Lorenzo (Jacques Perrin, arborant là un édifiant physique de jouvenceau), qui n’est autre que le frère du malotru Marcello découvert à l’orée dudit drame. Servi par une bande originale de tout premier choix (la musique, très présente tout au long du film, oscille entre tubes des années 60 et morceaux intemporels revisités au clavecin) et de longs plans éludant énormément d’effets de montage à priori inutiles, La Fille à la Valise brille dans le même mouvement de son absence de gratuité tout en faisant digne étalage de ses belles ficelles émotionnelles. Rien à redire sur la présence et la prestation de la Cardinale, jouant une Aida insondable et (in)volontairement(?) manipulatrice cherchant désespérément à se dépêtrer de son milieu social : l’actrice trouve là l’un de ses rôles les plus importants, aux côtés d’un Jacques Perrin meurtri et timoré tout à fait poignant. Un classique qui, sans payer de mine, s’annonce résolument efficace et – in fine – entièrement réussi.

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