Ma Barker et son Gang : Stop ou Maman va flinguer !

À l’image des Rôdeurs de l’Aube, Ma Barker et son Gang s’ouvre sur un texte défilant assurant la véracité des faits repris dans le film. À savoir l’histoire d’une mère qui va mener ses quatre fils dans la criminalité dès leurs plus jeunes âges entre vols, braquages, meurtres et enlèvements. La grande histoire que ce cher Roger Corman a porté à l’écran en 1970 avec Shelley Winters dans le rôle-titre cachant la petite et véridique histoire d’Arizona Barker. À savoir une mère ayant servi d’alibi à ses gamins turbulents tombés effectivement dans la criminalité dès leurs plus jeunes, car livrés à eux-mêmes et vivants de petits larcins. Ma Barker a été l’alibi de ses enfants tout en blanchissant l’argent des méfaits, à l’image de Ma Dalton. Morris s’est en effet inspiré de ce personnage pour les aventures de ce cher Lucky Luke qui inspirera également Ma Rapetou chez Disney et sa Bande à Picsou, tout comme Ma Fratineli dans Les Goonies par Richard Donner et Steven Spielberg. 
L’image perçue aujourd’hui de ce personnage devenue une icône du banditisme américain est due en grande partie à l’imaginaire de J.Edgar Hoover qui a justifié son assassinat par le FBI lors de la fusillade ayant eu lieu dans la maison près du lac Weir en 1935. Ma, loin d’être une sainte, n’était alors qu’une petite vieille femme faisant des tartes à ses fils tout en légitimant leurs actes. 

Nous sommes alors bien loin du compte rendu par la culture populaire et ce film, Ma Barker et son Gang, le premier long-métrage produit sur le personnage en 1960. Jusqu’alors inédit en France, Artus Films dépoussière une copie propre pour garnir sa collection «  Les Classiques – Film Noir  » disponible depuis le 1er décembre 2020 en DVD.
L’histoire vous la connaissez donc, l’icône Ma Barker va trouver une représentation forte dans ce film surprenant en tout point. Bill Karn, réalisateur du film et spécialiste des gangsters après sa participation à différentes séries du type, capte d’emblée l’attention du spectateur par une mise à mort graphique dans une voiture jouant d’ironie en enchaînant avec une séquence pieuse à l’église.
La famille Barker se livre alors aux spectateurs avec une rare intelligence. Avant d’entrer dans les faits, le scénario capte le désarroi de cette mère suite à une enfance difficile l’amenant à porter ses enfants à se battre pour avoir un train de vie supérieur. La voie facile est empruntée quitte à abandonner le mari sur la route avec un dédain sans commune mesure. Le film n’excuse jamais les actes de cette mère criminelle, mais explique son parcours l’amenant à se rebeller envers cette société et à vouloir prendre sa part du gâteau.
Les fils suivront en apprenant à ne jamais se faire prendre. L’histoire suit alors les grands faits de gloire du gang de par une violence graphique saisissante. Le premier casse du fourgon en est un bel exemple tout comme la fusillade finale. Ma Barker et son Gang est une curieuse trouvaille s’inspirant par séquence du Gun Crazy de Joseph H.Lewis avec Peggy Cummings (1949) et trouvera bizarrement écho dans le Batman de Tim Burton avec une séquence de chirurgie esthétique étonnement similaire. 

Ma Barker et son Gang se révèle être une série B puissante et volontaire avec un budget de série Z. Les décors, essentiellement en studio, notamment la séquence de réception bien agaçante, voire gênante, au cœur d’une proposition qui vaut bien mieux. Le film de Bill Karn trouve heureusement le soutien de Lurene Tuttle qui incarne avec conviction le rôle de Ma. L’actrice fait preuve d’un charisme sans faille tenant une sulfateuse avec aisance tout en préparant avec amour des tartes pour ses garçons. Lurene Tuttle trouve un premier rôle de choix dans cette série B bien troussée après des apparitions chez Orson Welles dans Macbeth, chez Henry Hathaway pour Niagara ou encore chez Stanley Donen pour Donnez-lui une Chance. Elle a su justement saisir sa chance avec ce film surprenant à peine remise de son rôle de la femme du shérif dans le Psychose d’Alfred Hitchcock avant de côtoyer Billy Wilder dans La Grande Combine. Ma Barker et son Gang se conclut brillamment sur le bras de l’actrice tombant dans la mare après la fusillade, une Justice Sauvage, laquelle elle apparaîtra aux côtés de Joe Don Baker dix ans plus tard pour le film signé Phil Karlson. Ma Barker et son Gang doit beaucoup au talent de cette actrice qui se révèle à nos yeux avec ce petit film qui n’aura jamais réussi à réellement trouver sa place, première adaptation du personnage oubliée au profit du travail plus populaire de Roger Corman, alors que celui de Bill Karn vaut tout autant, voire plus. Une erreur à minima rectifiée par l’ourson Artus avec ce DVD édité timidement en France disponible pour une découverte dont les amateurs de films noirs ne regretteront pas la tentative fascinante.

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