Minuit dans l’univers : Un voyage tout sauf exaltant

L’année 2020 touche à sa fin, les esprits sont déjà en 2021, espérant laisser derrière eux les bien mauvais souvenirs de cette déplorable année qui nous aura vus nous transformer en loques humaines coincées sur nos fauteuils à bouffer du streaming à ne plus savoir qu’en faire. Et pour dignement fêter ces fêtes de fin d’année que personne n’a véritablement envie de se coltiner mais dont on nous dit qu’elles sont essentielles, l’ami Netflix a pensé à nous avec le nouveau « chef d’œuvre » de George Clooney. Ne soyons pas trop acides néanmoins, car si le résultat est un ratage en forme de cas d’école sur tout ce qu’il ne faut surtout pas faire au cinéma (ou à la télé, on ne sait plus trop), on continuera à avoir beaucoup de respect pour cet Homme qui ne semble pas se lancer dans un projet juste pour produire du contenu, et dont on se demande forcément comment il a pu se louper de manière aussi spectaculaire.

S’inscrivant dans une mouvance de science-fiction contemporaine forcément au fait des inquiétudes environnementales agitant le monde actuellement (et que de sinistres personnages comme Donald Trump n’ont fait qu’aggraver par leur malfaisance évidente), le film prend place dans un monde sinistré n’ayant quasiment plus rien à offrir, à force d’en avoir épuisé toutes les richesses, obligeant à constituer des missions spatiales pour tenter d’aller y découvrir des planètes que l’on pourrait gentiment aller saccager à nouveau. Nous y suivons dans un premier temps Augustine, prénom du personnage campé par George, triste scientifique gravement malade resté seul en Arctique tandis qu’une mission est donc envoyée vers d’autres cieux. Visage lourd, encombré d’une barbe des mauvais jours, on ne peut pas dire que l’humeur soit franchement rayonnante, nous parlerions plutôt de déprime carabinée, d’où étonnement que Netflix ait jugé bon de nous l’offrir juste avant Noël, pour clôturer une année déjà désespérante. Le quotidien de ce dernier n’est donc pas des plus palpitants, jusqu’à ce qu’il tombe sur une fillette cachée dans son laboratoire, et se voit donc obligé de partir avec elle pour une odyssée qui aura tout du voyage intérieur menant l’humain dans ses derniers retranchements, et le confrontant à son instinct de vie, même quand tout paraît foutu. Après tout, pourquoi pas, il y avait matière à offrir un beau voyage ample et magistral. Il n’en sera malheureusement rien, et le seul sentiment qui persistera de la première à la dernière image sera cette profonde désespérance qui donne envie de se défenestrer tant tout est lourd, plombé, sinistre et sans vie. Le moindre élément de décor provoque une déprime sidérale, et l’on a plus d’une fois l’envie de tout stopper.  

Ceci dit, les films déprimants ne sont pas forcément mauvais, et ce n’est donc pas une raison en soi pour affirmer qu’il s’agit d’un ratage. Seulement en plus de cette ambiance n’invitant pas à la franche rigolade, il semble également évident que Clooney cinéaste (sa prestation d’acteur quant à elle restant tout à fait honorable dans le registre énoncé plus haut) ne sait pas sur que pied danser, donnant la tenace impression de ne pas savoir quoi raconter. Coincé entre deux histoires montées alternativement, entre sa propre aventure sur Terre et l’odyssée spatiale au rythme tout aussi amorphe, aucun sujet fort ne semble pouvoir émerger, au-delà du point de départ compris dès le début. Pour tout dire, il aura réussi, sur un point de départ similaire mais inversé, à faire encore plus mou et soporifique que le déjà piteux Interstellar de Christopher « Dieu » Nolan. Oui, on sait, on disant ça, on prend le risque de se décrédibiliser définitivement, mais la comparaison fait plutôt sens, même si les finalités divergeront bien évidemment.

Quoi qu’il en soit, rien à l’écran ne parvient à nous captiver un tant soit peu, tout est figé et cafardeux, les comédiens eux-mêmes semblant perdus dans ces décors aseptisés d’où aucun sentiment de vie ne paraît filtrer entre l’œuvre et le téléspectateur. Les personnages sont dénués de la moindre étincelle de vie, se balançant des répliques sur un ton amorphe, comme si les relations entre ces derniers ne possédaient pas le moindre début de sentiments, alors que cette sentimentalité devrait être ce qui les guide d’un bout à l’autre de l’histoire, étant donné que l’Amour est un peu la seule chose universelle qu’il leur reste. Au lieu de ça, même les personnages liés par le scénario, se parlent comme des robots, comme si tous les êtres humains n’étaient déjà plus. Un sentiment étrange et franchement déplaisant s’empare donc de nous pour persister jusqu’au bout, et ce twist sorti du chapeau magique, qui pourrait relancer l’intérêt en donnant justement un peu de ce cœur qui manquait à l’ouvrage, mais retombant comme un soufflé, le film se terminant subitement, nous laissant hébétés et les bras ballants.

Comment a-t-on pu en arriver là ? Voilà la seule question qui persiste à l’issue de ce triste voyage, ne proposant aucune solution à ses questionnements légitimes, tournant autour du pot pour ne rien raconter de signifiant, laissant ses malheureux personnages à leur triste sort, et nous, pauvres spectateurs, à notre déprime interloquée. S’il semble évident que Clooney réalisateur ne fera jamais partie du cercle des acteurs cinéastes importants (au contraire d’un Ben Affleck pour citer un exemple contemporain), il avait tout de même réussi jusque là à nous proposer quelques films qui sans être des œuvres majeures pouvaient au moins prétendre à une conscience typique de leur auteur. Ici, difficile de savoir ce qui a bien pu motiver ce dernier à se lancer dedans, tant tout paraît sans âme et sans vie, tout le contraire de cette personnalité qui reste comme l’une des plus intéressantes et attachantes du Hollywood maussade actuel. Nous ne lui en tiendrons donc absolument pas rigueur, mais qu’il nous soit tout de même permis de faire une grimace de désespoir, tant le spectacle s’avère plombant au possible.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*