Spycies : Espèces filmiques en voie d’extinction

L’espion est devenu, depuis l’exploitation du James Bond de Ian Fleming, un personnage de cinéma galvaudé. Un acteur classique du divertissement peinant à se renouveler en dépit d’un regain épileptique par Jason Bourne le temps de trois films dans les années 2000.
Dans l’animation, rien de bien flamboyant n’ont plus, outre une famille d’Indestructibles héros dont Brad Bird instille un hommage flagrant à 007 ou dernièrement Incognitos où un espion se transforme malencontreusement en pigeon. Exemple que tout est à faire en 3D pour captiver les bambins et leurs parents avec un film d’espionnage animé sachant déjouer les plans d’un classicisme navrant de studios manquant clairement d’idées neuves.

La solution est française, en collaboration avec La Chine, où Benoit Luce a créé sa société, Lux Populi. Ayant débaucher Guillaume Ivernel qui avait assuré la production artistique de Ballerina pour Gaumont en 2016 après avoir mis en scène Chasseurs de Dragons dix ans plus tôt, les deux hommes créent une collaboration sino-française pour un projet ambitieux.
À savoir les aventures d’agents secrets composés de l’exigeant, mais rebelle Vladimir et d’Hector le geek vaurien, dont le sort du monde se tiendra entre leurs pattes : suite au vol de la radiésite, matériau classé top secret sur une plateforme offshore, le tandem devra sauver la planète d’une menace climatique au cours d’une enquête menée tambour battant !
Le duo intrépide est un chat et un rat, une association fumeuse, mais excellente qui vont infiltrer un hôpital et nous entraîner dans une aventure accrocheuse. Spycies est un long-métrage rythmé ne s’arrêtant pas la moindre seconde. Et ce dès l’introduction avec une course-poursuite digne d’un blockbuster signé Michael Bay. 

Guillaume Ivernel digère parfaitement ses références entre Jackie Chan et Richard Donner permettant de créer un duo classique pour un buddy-movie divertissant. On pense indéniablement à L’Arme Fatale, mais aussi à Rush Hour par un aspect comique présent continuellement créant parfois des décrochages de tons évitables. Comme le focus sur les techniciens de maintenance de l’hôpital cassant trop souvent le rythme ou la séquence du restaurant, fusil de Tchekhov grossier et répété inlassablement pour prévenir de la chute de la course poursuite introductive.
Si l’on peut regretter une mise en scène incoercible, mais généreuse, faut-il reconnaître toute la mesure ambitieuse d’un film d’animation qui nous en met plein les mirettes. La séquence sur la plateforme est incroyable de maîtrise dans la production et l’orchestration. Le rendu de la mer est bluffante, tout comme le rendu des personnages dans leur globalité. On peut comme toucher les poils et la peau du parc animalier créé pour l’occasion rapprochant le film de Tous en Scène produit par Illumination ou Zootopie de Disney. Au cœur d’un monde futuriste qui plaira au public chinois lors de l’exploitation d’un film produit en 2018 (deux ans pour arriver en France ?), nul doute que le reste du monde n’échappera pas au charme d’un film universel qui touchera toutes les cibles. D’où la formidable idée de confondre les personnages en animaux créant une identification simple et ouverte sans le moindre spécisme dans l’exploitation internationale du long-métrage. 

Spycies est une œuvre animée drôlement bien produite assurant un spectacle intenable et charmant. Si l’on peut regretter quelques digressions comiques inhérents au cinéma chinois créant une sur-exposition de ses péripéties et rallongeant forcément le film inutilement (dix minutes en moins lui serait bénéfique), Spycies est un film pop-corn qui amusera son auditoire par une action continue et des personnages mal-dégrossis, mais attachant. Étant l’un des seuls programmes disponibles dans les salles de cinéma hexagonales en termes d’animation, ne boudons pas notre plaisir de voir enfin la production animée française être réveillée par un long-métrage fun qui ravira les petits, mais surtout les grands.

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