Le défi du champion : Apprendre pour exister

Alors que l’heure est encore incertaine concernant la sortie des quelques blockbusters encore en lice pour cet été, peut-être cela permettra-t-il à quelques outsiders de se frayer une petite place et d’attirer un public qui n’aurait pas eu la curiosité de s’y intéresser le reste du temps. À ce titre, ce premier long-métrage de Leonardo D’Agostini pourrait constituer la bonne surprise du mois d’août, tant tous les éléments constitutifs d’une bonne comédie populaire sont réunis ici. Avec son sujet à potentiel évocateur pour une grande partie du public, et son équilibre tonal partagé entre humour enlevé et émotion, c’est la base du feel good movie qui, entre de bonnes mains, peut donner des résultats assez irrésistibles. Avec son protagoniste principal à qui tout sourit, jeune footballeur prodige de 20 ans au compte en banques bien rempli, il fallait de l’audace et un minimum de talent pour réussir à croquer ce milieu éloigné de la réalité de tout un chacun et nous rendre ce personnage à côté de la plaque attachant. C’est pourtant le pari que l’on pourra dire réussi dans son genre, de ce cinéaste italien ayant déjà travaillé auparavant sur des séries télé et des courts-métrages, se lançant donc ici dans la grande aventure du cinéma.

Christian Ferro est donc ce jeune joueur, interprété par Andrea Carpenzano, jouant à l’AS Roma, au talent indiscutable l’ayant du même coup starisé très jeune, ce qui a eu pour effet de le tenir éloigné de bien des choses essentielles. Indiscipliné et mal entouré, il multiplie les frasques jusqu’à ce que le président du club lui pose un ultimatum : s’il veut continuer à jouer, il doit passer son bac. Pour ce faire, le club emploie les services de Valerio, un homme solitaire dont le passé va peu à peu se faire jour, et dont les méthodes vont très vite s’avérer payantes. Entre les deux, va donc naître un rapport de confiance qui leur donnera à chacun l’opportunité d’apprendre l’un de l’autre.

Oui, on vous voit venir, dit comme ça, on peut penser à une énième comédie sur-vendue à coups de bons sentiments fabriqués, comme la France en est adepte. Et l’on suppose que chaque pays ayant sa comédie locale n’arrivant que rarement par chez nous, les Italiens doivent également être coutumiers de ces films sans âme, n’ayant que pour seul objectif de remplir le tiroir caisse. La provenance du film n’était donc pas en soi un label de qualité, même si le fait qu’il arrive jusqu’à chez nous pouvait intriguer. Et l’on sera très rapidement rassurés devant ce qui apparaît dès la scène d’ouverture comme un vrai film de cinéma, filmé dans un scope de rigueur, et pour qui le plaisir du spectateur ne se suffit pas en soi comme simple argument marketing, et devrait toujours aller de pair avec ambition scénaristique. Scénarisé par le réalisateur lui-même et deux autres personnes, l’ambition, au-delà de faire un bon film capable de divertir noblement le plus grand nombre, était surtout de raconter à quel point la starification trop fulgurante pouvait occasionner des dégâts que l’on aurait trop tendance à évacuer selon la bonne vieille rengaine du « après tout, ils ont l’argent, alors de quoi se plaignent-ils ? » ! S’attardant sur la façon dont un entourage toxique peut impacter la vie de ces jeunes gens n’ayant jamais été préparés à affronter la vie, ayant toujours été entourés par des personnes prenant toutes les décisions pour eux, et se faisant leur beurre sur leur dos, le film trouve dans cet angle principal le moteur de son scénario, grâce auquel on s’attachera facilement aux tribulations de son protagoniste certes assez tête à claques dans un premier temps, mais dont on perçoit très vite les fêlures et l’envie de s’élever au-delà de cette condition de jeune prodige dans son domaine, considéré comme totalement abruti du reste.

Ceci acquis, le plus difficile était fait et restait à nous attacher à la relation se nouant entre ce dernier et son professeur, homme vivant seul dont on se doute très rapidement que cela cache des fêlures très profondes. Et là où cette construction un brin programmatique pourrait être un frein à l’impact du film ailleurs, elle est ici une force dont se saisit le réalisateur pour livrer un film sincère et, comme dit en entame, bien dosé entre l’humour irrésistible, et moments furtifs d’émotion réussissant à être vraiment touchants. Cela, on le doit à la qualité d’écriture, mais également bien entendu à l’implication de ses comédiens, qui semblaient nés pour ces rôles. Stefano Accorsi, acteur italien très reconnu dans son pays, et que l’on connaît en France essentiellement pour son rôle dans le film générationnel Juste un baiser et sa suite, qui semble l’évidence-même pour ce type de rôle, tant au fil de sa carrière, il n’a cessé d’exceller dans cet emploi de type simple, respirant la noblesse d’âme, presque le Tom Hanks italien, toutes proportions gardées. Quant à son jeune partenaire de jeu, bien qu’il ne soit semble-t-il pas un amateur de foot ou de sport dans la vie, il a le physique de l’emploi et le naturel typique des acteurs italiens tels qu’on les imagine, volubiles et charismatiques.

Dans ces conditions, on acceptera facilement les quelques facilités survenant notamment dans la dernière partie du film, où l’on sait très bien que tout ceci finira bien, mais dont les circonvolutions auraient peut-être pu être quelque peu rabotées. Mais même cousu de fil blanc, on sent que les différentes thématiques abordées au fil du scénario tenaient à coeur du cinéaste et de ses scénaristes, et cela fait la différence avec bien des films standardisés ne semblant conçus que sur des calculs commerciaux, les vidant de toute substance. On ne peut donc que vous encourager sincèrement à tenter le coup, car des films tous publics comme celui-ci, réussis qui plus est, cela ne se voit pas toutes les semaines.

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