Nightmare Island : Fantasmes et Marketing

Les nostalgiques des longs après-midis sur TF1 ont dû prendre un sacré coup de vieux avec cette revisite de L’île Fantastique. Créée à la fin des années 70, la série s’était étendue sur sept saisons et nous racontait les aventures des invités de M. Roarke, hôte d’une île paradisiaque où n’importe quel désir peut se réaliser. Il était toujours accompagné de son fidèle assistant, Tattoo. La série a été portée par deux gueules inoubliables, qui ont fait la renommée de la série et l’on inscrite à tout jamais dans la mémoire collective : Ricardo Montalban et Hervé Villechaize. Les épisodes étaient toujours construits de la même façon : deux histoires (deux fantasmes) qui se déroulent en parallèle sous la direction avisée de M. Roarke. Avec peu, voire pas, de fil rouge qui reliait les épisodes entre eux (on ne saura presque rien sur le passé et les origines de Roarke par exemple), la série avait cet avantage d’offrir une cadence de lecture aléatoire sans jamais nous perdre.

Bien qu’inscrite dans son époque, l’idée de faire revivre le concept sur grand écran n’était pas mauvaise en soit. Encore fallait-il trouver l’inspiration et amener l’histoire à un niveau plus haut que simplement dérouler des fantasmes qui tournent mal. Produit par la firme Blumhouse, Nightmare Island possède tous les checkpoints qui ont fait la réputation de celle-ci : un budget low-cost, une histoire qui parlera aux adolescents et une horreur des plus conventionnelles. Nightmare Island est de ces films qui creusent encore plus l’immense écart qu’il y a entre les bonnes productions (Insidious, Sinister, The Lords of Salem, Get Out, Whiplash) et les mauvaises productions Blumhouse (Ouija, Lazarus Effect, Unfriended, Action ou Vérité, Happy Birthdead). Quand on parle de mauvaises productions, précisons que nous pensons à des films d’horreur qui gâchent souvent un concept fort par une uniformisation tellement inintéressante qu’une simple bande-annonce suffit à comprendre tout le film. Dans quel camp se situe Nightmare Island ?

Quelques personnes sont invitées par M. Roarke à passer quelques jours de vacances dans un luxueux complexe hôtelier, isolé sur une île paradisiaque. Sur celle-ci, tous leurs fantasmes se réaliseront. Mais il faut bien faire attention à ce que l’on souhaite. Les fantasmes se transforment rapidement en cauchemars et les invités, pour survivre, devront percer les mystères de l’île.

Plus on avance dans le temps, plus les productions Blumhouse continuent à nous vendre un paquet de films d’horreur avec la promesse de bains de sang et de meurtres graphiques sans jamais verser la moindre goutte de sang. Et c’est un succès à presque tous les coups (trop fort ce Jason Blum) ! Cliché absolu du film PG-13 par excellence, le concept du fantasme du film vient en faire germer un solide dans la tête du spectateur : qu’aurait été le film s’il avait été produit par quelqu’un de nettement moins accroché à sa charte de vente ? Nightmare Island aurait eu une sacré gueule s’il avait eu plus de souplesse dans sa mise en scène. Dire que Jeff Wadlow est un piètre metteur en scène serait mentir. On se souvient du culot dont il avait fait preuve sur Kick-Ass 2 où il n’hésitait pas à verser dans la violence graphique la plus primaire et brutale, ce dont manque cruellement Nightmare Island. La faute revient indubitablement au cahier des charges de Blumhouse qui exige une dose bien spécifique afin de ne plaire qu’au public ciblé : les adolescents vierges de films d’horreur plus « adulte ». Pourtant, l’ouverture du film laissait présager un film agréable avec des possibilités sanglantes sans limite. Malheureusement, Nightmare Island échouera lamentablement à tenter de nous arracher un quelconque frisson. Pire que tout, la dernière demi-heure alignera tous les poncifs les plus ringards et les deus ex-machina les plus improbables que nous ayons vu depuis longtemps. Et puis, au risque de nous répéter, proposer un film d’horreur presque exempt de violence et de sang, c’est un peu comme si vous essayiez de danser la lambada sur du Hervé Villard : ça peut être rigolo, mais ça ne sert à rien. Nightmare Island est un produit kleenex. Aussitôt vu, aussitôt oublié.

Nightmare Island est un beau gâchis. Pourtant, les décors sont idylliques, les acteurs ne sont pas trop mauvais et y croient, et la réalisation se permet quelques trouvailles intéressantes. Le film n’est pas insupportable non plus, on a vu bien pire. Seulement, à passer toute la séance à fantasmer sur comment il aurait pu être donne crédit à nos critiques ci-dessus. Nightmare Island est un produit étriqué qui ne se donne même pas la peine de cacher le marketing fumiste du mauvais côté de la firme Blumhouse. Après un Action ou Vérité vraiment banal, il serait temps que Jeff Wadlow revoit son fusil d’épaule quant à ses producteurs. Voir du talent être gâché ainsi fait mal au coeur. Nightmare Island est à voir un dimanche après-midi pluvieux si vous n’avez vraiment rien d’autre de plus intéressant à regarder. Auquel cas, passez votre chemin…

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