Knives and Skin : Trop référencé pour son propre bien

Le calme d’une petite ville de l’Illinois est troublé par la disparition mystérieuse de la jeune Carolyn Harper. Celle-ci n’est jamais revenue d’un rendez-vous nocturne et cette disparition soudaine secoue le lycée qu’elle fréquentait. Alors que la police semble bien incapable de faire quelque chose, sa mère dévastée sombre dans la dépression et ses amies font ce qu’ils peuvent pour affronter cet événement, continuant de mener leurs vies comme ils peuvent, sans grands repères moraux, tous les parents de la ville semblant être totalement incapables de faire face à la moindre pression.

En effet, dans cette ville morne, tandis qu’une adolescente vend des sous-vêtements utilisés aux adultes, qu’une mascotte ne cesse de songer à quitter la ville et que les autres tentent de trouver dans leurs relations une bouée de sauvetage, ce sont les adolescents qui apparaissent les plus mûrs du récit. Alors que la mère de Carolyn sombre de plus en plus, une autre mère de famille feint une grossesse pour se rendre intéressante auprès de son mari tout en ayant une relation extraconjugale avec un père de famille licencié incapable de retrouver un travail, laissant sa femme déprimer à la maison, celle-ci n’ayant qu’un seul intérêt, celui de vernir les ongles de sa fille. Cette communauté en détresse à la suite d’une disparition, avec ses personnages hauts en couleur n’est pas sans faire penser à Twin Peaks. Pour sa première réalisation, Jennifer Reeder a d’ailleurs bien du mal à se démarquer de ses modèles à savoir David Lynch et Sofia Coppola.

Sans ces deux cinéastes, pas sûr que Jennifer Reeder aurait fait un film puisque Knives and Skin doit beaucoup (trop) à Twin Peaks avec sa disparition, ses personnages décalés et ses effets de mise en scène et que sa mélancolie vient clairement chercher du côté de Virgin Suicides. De fait, Reeder emballe son film avec beaucoup trop d’éléments pour totalement convaincre, abandonnant des éléments fantastiques en cours de route là où elle aurait dû se concentrer sur l’essentiel, à savoir le malaise profond d’une Amérique en perdition où les adolescents errent sans repères moraux, les adultes semblant avoir laissé tomber tout semblant de responsabilités. Sur ce point-là, aidée par des acteurs au diapason de son univers légèrement décalé (Marika Engelhardt est formidable) et par de très belles séquences mi-oniriques mi-mélancoliques, Jennifer Reeder marque des points, parvenant à nous insuffler le mal-être profond de ses personnages.

La réalisatrice, qui en fait trop pour le bien de son film, multiplie cependant les personnages et les extravagances, nous perdant dans les méandres de son univers dont les contours sont mal dessinés, croulant trop sous le poids de ses références. Knives and Skin n’en reste pas moins une curieuse découverte qui a le mérite d’offrir une proposition singulière et l’on demeure certains qu’une fois débarrassée du poids de ses aînés et de ses modèles, Jennifer Reeder pourrait bien nous surprendre…

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